On sème...
Après avoir vu ce final de saison, je me suis dit qu'il valait mieux me poser, réfléchir et revoir l'épisode avant d'en faire la critique. J'en ai profité pour lire les premiers retours des fans qui furent une bonne source d'inspiration. Non pas que l'épisode en lui-même ne se suffisait pas, mais n'étant pas vraiment d'accord avec certains avis, je vais profiter de cette critique pour m'expliquer.
Depuis la mort de Robert Baratheon, quatre arcs narratifs principaux se sont mis en place. Là ou nous étions habitués à un fil rouge principal tressé d'arcs plus ou moins importants, Game of Thrones réussit ce que je considère être un tour de force : mener à bien quatre histoires de front. Il n'y a de finalité dans aucune d'entre elles, et si le spectateur cherche un champion parmi les familles, celui qui combinera savamment honneur, force, courage et force, il l'a visiblement perdu avec la tête d'Eddard. L'orientation semble désormais être favorable à Robb, mais la dernière scène de cet épisode brouille une fois de plus les pistes.
Dans Game of Thrones, on observe une histoire où ce ne sont ni la bonté ni l'honneur qui font gagner les protagonistes. Il n'y a pas de maître du côté obscur, ni de seigneur noir. Mais seulement des familles qui se battent pour le pouvoir avec différents objectifs. Et il nous est désormais difficile de prédire qui sera mis à l'honneur au final. Certes, Robb se bat pour venger son père et son frère, mais les Targaryens -ou plutôt la - ne sont pas non plus dépourvus de légitimité tant leur pouvoir semble supérieur à celui des autres familles. Il ne faut pas non plus oublier -si j'ai bien compris l'histoire encore une fois- que le premier roi Targaryen est celui qui a uni les royaumes avant que son descendant se fasse battre par Robert Baratheon venu chercher sa femme.
A côté de ces deux familles, les Lannister semblent être les plus fourbes, même si personnellement je ne vois que Cersei, la cougar incestueuse d'un mauvais œil. Joffrey agit comme un enfant capricieux sur le trône et j'irai même jusqu'à dire que son comportement n'est pas odieux, mais plutôt stratégiquement stupide. L'épisode nous le montre, en éliminant Eddard, il s'est tiré une balle dans le pied en pensant tuer une rébellion dans l'œuf. La scène du barde ne m'a pas semblée être un comble d'ignominie : un barde est dénoncé parce qu'il chante une chanson déshonorant feu le roi et il se fait couper la langue. Nous savons tous que Joffrey n'est pas un enfant roi bon et miséricordieux. Le pouvoir et sa mère lui sont montés à la tête et la seconde scène le concernant, sur le pont, en est le parfait exemple : Joffrey à peur de manquer de légitimité.
Enfin, quatrième arc, celui du mur et de la Garde de nuit. Dans une autre série, nous aurions pu nous attendre à ce que Jon devienne un héros du jour au lendemain. Ce ne sera pas le cas ici. Jon est devenu l'archétype du personnage cornélien en mode bâtard. Un homme qui ne sait plus vraiment où se trouve la frontière entre l'honneur et la haine.
Ces quatre arcs concluent leur première partie en cette fin de saison et non pas en ce dernier épisode. J'ai ressenti les choses de la manière suivante : les parties Lannister et Stark se sont conclues par la mort d'Eddard et ce dernier épisode sert d'introduction à la deuxième partie de leur histoire, à savoir la guerre à proprement parler. Les arcs concernant Daenerys et le mur se sont conclues avec ce dixième épisode avec l'entrée en guerre du mur et la révélation de Daenerys.
Ayant lu pas mal de choses concernant le découpage, je m'en vais vous expliquer ce ressenti en détail.
… et on moissonne.
La première partie de l'épisode est consacrée aux conséquences directes de la mort d'Eddard. Elles servent de prémices aux bouleversements profonds qui se préparent au sein du royaume. Les vingt premières minutes de l'épisode sont donc réparties entre Stark et Lannister. Les trois premières scènes présentent la peine des Stark. Arya tout d'abord, suivie de Bran et enfin Catelyn et Robb. Le spectateur pourrait voir une certaine preuve de démagogie ou de manque d'audace dans le fait de ne pas laisser simplement des points de suspension sur ces histoires en attendant la deuxième saison. Après tout, les scénaristes auraient pu décider de ne consacrer l'épisode qu'au mur et à Daenerys. Moi, j'ai vu dans cet épisode un désir de conclure tous les arcs tout en laissant l'axe chronologique de l'intrigue à zéro.
Après les trois scènes consacrées aux Stark, les suivantes concernent les Lannister et la guerre. La première s'intéresse à la main mise de Joffrey sur la cour, puis l'intronisation de Robb, le sort de Jaime, suivie d'une des quatre scènes qui font perdre du rythme et des points à l'épisode et sur lesquelles je reviendrai plus tard, pour finir avec l'état des lieux de la guerre par Tywin, et Tyrion nommé main du roi.
Une fois ces vingt premières minutes passées, l'épisode se tourne vers la conclusion du premier chapitre de l'arc Targaryen et de celui du mur. Du côté des dragons, Daenerys perd son fils, puis son Khal de mari et finit par être révélée, tout ceci en trois scène très intenses. Chez les Nightwatch, Jon s'enfuit, puis revient pour finir par une marche vers la bataille du mur.
Les deux dernières scènes sont dignes d'un final de saison avec bien entendu une large préférence pour le final de Daenerys. Le découpage de l'épisode à certes sacrifié beaucoup de rythme, c'est-à-dire ce à quoi tout téléspectateur est en droit de s'attendre pour un final de saison, au profit d'un certain réalisme chronologique. Cela ne m'a pas choqué, loin de là. J'ai suivi cet épisode avec beaucoup de plaisir et tout aurait été parfait sans quatre scènes qui ne servent strictement à rien d'autre -selon moi- qu'a nous faire sortir de l'intensité dramatique de l'épisode.
Les bémols
Les quatre points qui séparent cet épisode de la note maximale ne sont dues qu'a Cersei, Littlefinger, Varys, Shae (la « compagne » de Tyrion) et au vieux conseiller. A part pour du remplissage, je ne vois pas bien l'intérêt de mettre ces scènes au milieu de l'épisode. Cersei et l'l'androgyne sont deux énormes cheveux dans la soupe, sans queue ni tête. La conversation entre Varys et Littlefinger est sûrement bien trop subtile pour qu'une personne n'ayant pas lu les bouquins comme moi y voit autre chose qu'une conversation banale et inutile (je me suis demandé si il ne s'agissait pas des prémices d'une éventuelle trahison à venir, juste pour nous montrer qu'ils n'avaient ni dieux ni maîtres, mais la conversation n'est pas assez claire).
Même si j'apprécie énormément le personnage de Tyrion, on aurait certainement pu se passer de sa conversation avec Shae, ou la placer dans d'autres circonstances. Je me fous pas mal actuellement de savoir si Shae va devenir la compagne de la main du roi ou pas. Enfin, que veut dire le fait que le conseiller soit en fait pas si rabougri que ce qu'il laisse paraître, et qu'il ait en fait sûrement toute sa tête? Si ce sont des questions que les scénaristes voulaient laisser en suspens, mais elles sont, dans cet épisode, totalement noyées par le flot d'informations importantes sur les arcs principaux déjà bien assez nombreux et profonds.
Conclusion
L'épisode s'ouvre et se ferme sur deux magnifiques scènes. Le premier plan sur l'épée est parfait, autant que la scène tant redoutée de l'apparition des dragons. Je l'ai trouvé dans son ensemble aussi bon que le précédent, également réalisé par Alan Taylor (un Monsieur qui à sur son CV des épisodes des Sopranos, Boardwalk empire, Mad Men, Six feet under, Carnivale et OZ tout de même). A savoir que les deux épisodes précédents étaient de Daniel Minahan, mais nous reviendront sur le casting technique de la série lors du bilan.
Outre les quatre petites scènes inutiles, le découpage ne m'a pas plus choqué que ça, au contraire, et j'ai trouvé une certaine audace dans le fait de tempérer l'épisode. En tout cas, je sais ce que je dois lire cet été, et je suis bien content d'avoir trouvé une série à me mettre sous la dent en attendant Breaking Bad. Nous attendrons donc la fin de la seconde saison pour faire entrer Game of thrones au panthéon des grandes séries, mais je lui prédit sans prendre trop de risques un avenir radieux, surtout au niveau de la critique. Prions les anciens dieux pour que les audiences suivent longtemps.
Ce que j'ai aimé :
- L'audace de l'épisode dans son découpage.
- L'introduction et la conclusion de l'épisode : sublime.
- En me mettant à la place de Daenerys sur la scène finale, je me suis dit que moi aussi, je serais le maître du monde à sa place.
- Des plans toujours aussi beaux.
- Des interprètes toujours aussi bons (Maisie Williams, premier rôle, mais a mon avis pas le dernier.)
Ce que je n'ai pas aimé :
- La scène entre la cougar incestueuse et son androgyne
- La scène entre Varys et Littlefinger
- La scène entre Tyrion et Shae
- La scène du vieux conseiller qui raconte sa vie (mais rattrapée par la jeune fille callipyge)