Tout fan de séries qui se respecte le sait : une série HBO, c’est très souvent signe de qualité et il y a de grandes chances qu’elle obtienne le label « série culte ». The Sopranos, Six Feet Under, The Wire, Sex and the City ou plus récemment Game of Thrones, autant de séries qui ont laissé une empreinte dans le monde du petit écran. C’est donc avec une certaine curiosité que j’ai attaqué le visionnage du pilot de la petite dernière, Girls.
Hannah, jeune paumée
Girls, c’est l’histoire d’un groupe de filles dans New York. Pour ceux qui connaissent, on fait rapidement le rapprochement avec Sex and the City mais les deux séries sont en réalité très différentes : ici les demoiselles sont beaucoup plus jeunes (entre 20 et 30 ans) et ne sont pas pleines aux as comme pouvaient l’être Carrie et ses amies. On notera tout de même au passage le clin d’œil fait aux trentenaires lorsque Jessa s’installe chez sa cousine, une façon de rendre hommage à l’une des sources d’inspiration de la série.
Girls suit donc Hannah, Jessa et Marnie, trois amies aux caractères assez opposés, dans leur quotidien. La première, Hannah, stagiaire depuis un an dans une boîte d’édition, veut devenir « le porte parole de sa génération » en publiant son livre. Jessa est plutôt un électron libre : elle parcourt le monde et est régulièrement défoncée, essayant à sa façon de profiter de la vie au maximum. Marnie, la plus sexy des trois (avis personnel qui n’engage que moi), est beaucoup plus terre à terre et moins volatile que les deux autres. Toutes trois arrivent à un tournant de leur vie, la fin de l’adolescence, et vont devoir assumer les problèmes du monde adulte.
La série débute ainsi sur Hannah, en diner avec ses parents qui lui annonce la fin de leur aide financière. Coup dur pour Hannah qui va devoir chercher un travail pour subsister et mettre en pause son rêve d’écriture alors qu’elle se cherche toujours. L’épisode se concentre en grande partie sur l’assimilation de ce fait par Hannah et ses conséquences : la fin de la protection parentale.
Après une tentative de transformer son stage en emploi qui déboucha sur son renvoi, Hannah trouvera le réconfort chez Adam, paumé marginal vivant au crochet de sa grand-mère et qui prend plus Hannah pour un objet sexuel qu’autre chose. Suivant les conseils de Jessa, elle tentera une dernière fois de convaincre ses parents de continuer à la supporter avant de se retrouver seule.
Hannah est ainsi l’exemple typique d’une jeune paumée, pleine d’idéaux mais qui ne sait finalement pas vers quoi se tourner. La fuite de ses parents sera surement le déclencheur pour se reprendre en main et essayer de construire quelque chose de stable mais la remontée s’annonce assez difficile. Humiliée aussi bien par son patron qui n’a cure d’elle que par son copain qui la prend pour un objet sexuel, elle va avoir du chemin à parcourir pour réussir à s’affirmer.
De ce point de vue, le pilot décrit parfaitement le personnage. Lena Dunham a très bien réussit son coup, tant sur l’écriture du personnage, de l’histoire que sur l’interprétation qu’elle en livre : sans sombrer dans le cliché, elle se révèle en phase avec son temps. Loin des stéréotypes physiques habituels des séries, Hannah est une fille normale qui se cherche, tantôt à l’aise avec sa personne, tantôt complexée mais jamais caricaturale.
Les copines d'Hannah, jeunes paumées
Un peu plus en retrait, ses deux amies n’en sont pas moins réussies. Le caractère volatile et imprévisible de Jessa nous est montré par petite touche, que ce soit lorsqu’elle arrive en retard à sa soirée de bienvenue ou lorsqu’elle parle plusieurs langues pour faire état de ces voyages. Une fille qui est finalement remplie de doutes comme Hannah mais qui les cache en se réfugiant derrière une certaine frivolité et la consommation de drogues. Ce n’est qu’en fin d’épisode que l’on apprend ce qu’elle essaye de fuir, une annonce qui cadre finalement parfaitement avec son comportement et qui en est une cause logique.
La dernière fille de l’histoire, Marnie, colocataire d’Hannah, semble beaucoup plus terre à terre que les deux autres. Elle ne cache pas moins elle aussi de nombreux doutes derrière une certaine rigueur, une certaine pudeur qui la pousse à refréner ses amies ou à ne pas s’engager pleinement dans sa relation de couple. Trois filles différentes mais en proie au mêmes doutes, celui du passage à l’âge adulte, la fin de l’adolescence et la prise de conscience de la dureté du monde qui les entoure.
Et finalement le pilot rempli parfaitement son rôle, celui de nous présenter les trois personnages et leur situation pour que l’on puisse ensuite comprendre pleinement leur progression. L’écriture des trois filles est soignée de même que les personnes interagissant avec, ce qui renforce leur crédibilité. En 27 minutes, Lena Dunham a réussit à nous présenter des personnages et un univers parfaitement crédible et cohérent là où d’autres peinent à le faire sur plusieurs épisodes.
Le tout est renforcé par deux points importants : des dialogues percutants et une réalisation en phase avec son sujet. Cette dernière n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle qu’affectionnent les films du circuit indépendant, laissant une image terne, froide et peu chaleureuse, appuyant la solitude des personnages principaux dans ce monde qui ne demande qu’à les happer.
D’un point de vue purement technique, l’épisode est donc une réussite. Le contexte, les personnages, les enjeux, tout est présenté de manière simple, continue, sans temps morts et sans précipitation non plus. La forme est soignée et contribue grandement à la qualité du pilot.
Un spectateur parfois paumé
Mais comme beaucoup de séries signées HBO, celle-ci est ciblée sur un public particulier dont je ne fais malheureusement pas partie. Bien qu’intéressant, je ne me suis jamais vraiment identifié aux personnages, leurs problèmes et leurs péripéties me passant un peu au-dessus. À aucun moment je n’ai vraiment accroché à l’histoire et aux personnages tant et si bien qu’à la fin, j’avais l’impression d’être complètement en décalé, d’avoir manqué quelque chose.
Une série qui risque donc de parler à certains tandis que les autres resteront comme moi sur le carreau. Face à ce genre de série, il est difficile de se prononcer : où l’on adhère complètement, où l’on reste sur la touche mais on reste rarement sur une opinion mitigée. Quant à la conseiller ou non, je dirais que le plus simple reste de regarder le pilot : 27 minutes, ce n’est pas long et même si l’on n’adhère pas forcément, c’est toujours mieux que certaines inepties des grands networks.