Mad Men est un soap. Ceux qui la regardent s'en sont aperçus avec le temps, et, non, ce n'est pas un défaut. La preuve avec cet épisode, qui remet entre autres sur la table les infidélités de notre mystérieux Don Draper avec une classe et un sens scénaristique exemplaires.
Un retour en arrière pour Don Draper ?
Oui, mais en fait non. A première vue, c'est en tout cas ce dont on a l'impression. En effet, parallèlement à Pete, Don se remet à avoir une maîtresse, comme au temps où il était en ménage avec Betty. Alors j'avoue que personnellement, j'ai trouvé que cette relation sortait un peu de nulle part. C'est dire, sans le previously on, je ne me serais pas souvenu qu'il la connaissait déjà.
Néanmoins, une fois passée cette mise en place un peu maladroite, cet épisode permet un contraste très intéressant entre Don et Pete, qui vivent des situations similaires mais se déroulant d'une manière complètement différente. Ainsi, l'épisode commence avec Pete et sa femme, qui, chacun de leur côté, flirtent avec deux autres personnes. Là où Trudy s'en sert comme d'une petite distraction gentillette qui se termine dans la minute, les intentions de Pete sont en revanche beaucoup moins inoffensives, essayant sans doute de se remettre de sa séparation avec sa précédente maîtresse lors de la saison 5.
Puis, vient ensuite le ressort classique du soap, à savoir la rencontre entre la femme et la maîtresse, qui survient ici pour Pete comme pour Don. Sauf que là où Don garde son côté mystérieux et est doué pour sauver les apparences (ce qui ne l'excuse bien évidemment pas pour autant, hein), Pete ne parvient pas à garder son infidélité secrète très longtemps. D'ailleurs, lorsque l'on assiste à la scène où Trudy décide de prendre les choses en main face à un Pete désarçonné, on découvre que finalement elle ne lui repproche pas vraiment son infidélité, mais le fait qu'il ne la cache pas assez bien ! Une fois de plus, on se rend compte de la condition féminine à cette époque là, où l'infidélité (masculine) est quasiment la norme.
Pete Campbell, ancêtre du beauf d'aujourd'hui ?
Concernant Don, son infidélité lui cause beaucoup plus de dommages psychologiques que «publics». Car en effet, la double vie qu'il mène en permanence n'arrange pas sa crise d'identité, qui commence à s'accentuer en ce début de saison. Double vie d'ailleurs parfaitement illustrée par la mise en scène lorsque qu'il découvre en rentrant chez lui sa femme en train de discuter avec sa maîtresse. Filmés en champs/contrechamps, les trois personnages ne se retrouvent jamais dans le même plan, et lorsque c'est finalement le cas lors à la fin de la scène, Don ne croise jamais le regard des deux femmes en même temps.
Don Draper, c'est la réunion de ces deux modes de vie, de ces deux masques. Et, comme quelqu'un le cul entre deux chaises, à force de jongler entre l'une et l'autre, il va finir par tomber. Et c'est justement là que sa situation conjugale différe des saisons précédentes. Car on sent que malgré tout ce qu'il dit à sa maîtresse, il éprouve un attachement sincère à Megan. De l'amour, peut-être pas, mais il n'y a qu'à voir la scène où il apprend que Megan a fait une fausse couche pour s'en rendre compte qu'il n'agit pas comme avec Betty. Encore plus qu'avant, Don ne sait pas ce qu'il veut.
Au final, on a l'impression que l'infidélité est comme une drogue pour lui : dès que quelque chose va un peu de travers dans sa vie, il ne peut pas s'en empêcher. D'ailleurs, la scène au restaurant entre lui et sa maîtresse pourrait être interprétée comme une tentative de s'en débarasser indirectement. Son lieu de travail est également affecté, puisqu'il saborde volontairement sa réunion avec Jaguar. Encore plus évident, alors qu'un nouveau concurrent à Heinz semble plus efficace, il préfère rester fidèle à son client d'origine.
Trauma, fausse couche et trahison
Mais les infidélités de Pete et Don ne sont pas les seuls éléments tenant du soap dans cet épisode. En effet, on apprend également que Megan a fait une fausse couche. Bon, voilà encore un élément qui, je trouve, sort un peu de nulle part. On a un peu l'impression d'une intrigue sortie du chapeau des scénaristes pour appuyer le thème de l'épisode. C'est sans doute en partie vrai, mais, malgré tout, cela permet de renforcer le lien entre Megan et Don. Le comportement de ce dernier lorsqu'il l'apprend pourrait d'ailleurs être considéré comme une attention qui sonne faux lorsque l'on connaît le passé du personnage. Mais sincèrement, je ne pense pas que ce soit cette fois-ci le cas.
Un regard appuyé, une main tenue, pas de cigarette à la bouche : trop sincère pour Don Draper ?
Pour rester dans la partie un peu what the fuck, j'avoue que j'ai pour l'instant du mal à saisir les passages dans la maison close. Certes, cela garde une certaine cohérence avec les quartiers pauvres de New York montrés lors du season premiere. Mais c'était fait par l'intermédiaire de Betty. Ici, à moins d'un sacré trou de mémoire, nous ne connaissons aucun des personnages présentés, et l'intrigue n'a aucun rapport direct avec le reste des personnages de la série. Du coup, bon, c'est bien mis en scène et je me serais presque cru dans Boardwalk Empire, mais ça me laisse dubitatif. Nul doute que j'aurais matière à en reparler dans une autre critique, car ça me surprendrait que les scénaristes en restent là.
Du côté de Joan, eh bien encore une fois, on ne la voit pas beaucoup. J'ai un peu l'impression que les scénaristes ne savent plus trop quoi faire de son personnage. Pourtant, montrer son implication en tant qu'associée pourrait être très intéressant. Ou alors, c'est tout simplement parce que en 2h15 de série, ils n'ont pas eu le temps de développer une intrigue la concernant, ce qui est possible car la série prend son temps, et le fait bien. Quoi qu'il en soit, sa courte apparition était réussie, avec des répliques piquantes face à un client particulièrement graveleux (c'est peut-être celui avec qui elle avait été obligée de coucher, je ne m'en souviens plus). On sent tout de même que malgré sa force de caractère, le machisme ambiant des hommes commence à peser sans pour autant qu'elle puisse y changer quoi que ce soit.
En fait, la meilleure surprise de cet épisode, c'est Peggy, qui commence à entrer en concurrence avec l'agence qu'elle a quitté la saison dernière. Elle a encore quelques scrupules à tromper ses anciens collègues pour récupérer leur client, mais on sent que l'ambition va sans doute finir par l'emporter. En tout cas, c'est assez amusant de la voir se comporter comme le faisait Don avec elle, et j'ai hâte de voir la suite de son évolution.
J'ai aimé :
- Un bon équilibre entre les personnages dans chaque épisode (sauf Joan)
- Une gestion savoureuse et toujours classe des intrigues « de ménages »
- La mise à plat du personnage de Don Draper tout en évitant la redite
Je n'ai pas aimé :
- En deux épisodes, presque pas de Joan !
- Les passages dans la maison close, un peu out of show
Ma note : 13/20.