Critique : Person of Interest 1.02

Le 28 mars 2012 à 16:19  |  ~ 8 minutes de lecture
Un divertissement plaisant pour une série impressionnante du point de vue formel, mais encore trop rigide pour convaincre vraiment.
Par sephja

Critique : Person of Interest 1.02

~ 8 minutes de lecture
Un divertissement plaisant pour une série impressionnante du point de vue formel, mais encore trop rigide pour convaincre vraiment.
Par sephja

Une machine en quête d'une âme 

John Reese hérite d'une nouvelle mission inattendue, la machine ayant sorti le numéro de Theresa Whitaker, une jeune femme censée avoir été assassinée avec toute sa famille quelques années auparavant. Harold Finch le charge de mettre la main sur ce fantôme, lui offrant malgré tout son assistance pour percer les secrets de cette affaire singulière. Surtout qu'au même moment, un tueur à gages se met à la recherche de la même jeune femme.

 

Résumé de la critique

Un épisode plaisant que l'on peut détailler ainsi :

  •  une intrigue sans surprise, mais efficace 
  •  un show pris entre l'homme et la machine 
  •  une mythologie qui s'impose efficacement
  •  un épisode de mise en place solide

 

 

Un héros qui rentre dans son costume 

Après un premier épisode très rigide et impersonnel, Person of Interest revient avec une intrigue qui s'inscrit dans une certaine continuité et va s'efforcer d'installer une début de routine dans les relations entre le duo vedette du show. Reese et Finch vont occuper une place centrale dans cette intrigue, travaillant de concert pour retrouver cette jeune femme qui s'efforce de demeurer invisible, appuyant l'impossibilité d'échapper au système dans l'univers de la série. Un univers étouffant et rigide qui appuie le sentiment de paranoïa, séparant le monde entre le visible et l'invisible, l'identifiable et l'anonyme. 

Reese est un héros très classique, incarnation du soldat aux services ici de l'orphelin, Jim Caviezel donnant à son personnage un style très vertical qui s'accorde avec celui calculateur de Finch. Conscient d'agir pour le bien, il prend l'initiative autant sur ses alliés que ses ennemis, affichant une touche arrogance qui le rend imprévisible et attachant. Malgré tout, certaines séquences commencent à faire apparaître des failles intéressantes dans son armure, une difficulté à gagner la confiance de l'autre qui donne toute sa force au final de l'épisode.

A la manière d'une profession de foi, les scénaristes montrent ici que les héros de Person of Interest sont près à se mettre en péril pour de parfaits inconnus. Malgré quelques rebondissements tirés par les cheveux, le show montre une vraie efficacité et une esthétique séduisante grâce à un travail étonnant sur la photographie. Un contrôle du tempo du récit et de la gestion du timing qui vient contrebalancer les errances d'un scénario parfois confus, les limitations du champ d'investigation des deux héros restants assez importantes pour l'instant.

 

Un univers numérique au bord de l'asphyxie 

Occupé à chercher une aiguille  dans une meule de foin, les héros de PoI profitent des ressources d'un univers technologique très crédible, le moindre objet permettant d'identifier son propriétaire. Ainsi, les images portent fréquemment les traces d'une technologie qui analyse tout, resserrant le cadre du réel au seul champ des caméras de surveillance. Loin d'être des hommes libres et épanouis, Finch et Reese paraissent enfermés dans leur propre costume, les bons dans le temps durant l'épisode soulignant la progression de cette rigidité alors que le réseau prend lentement l'être humain au piège. 

La gestion des flashback est une vraie réussite, donnant la place du narrateur omniscient à ce superordinateur qui peut s'appuyer sur les enregistrements des caméras pour justifier la navigation entre les époques. Personnage central de l'intrigue, cette machine est finalement le coeur de cette série, élément de scénario très pratique permettant de projeter le récit et le spectateur dans toutes les dimensions envisageables, temporelles et géographiques. Enfermé derrière l'écran, l'ordinateur cherche à se connecter  avec l'être humain, essayant de s'extraire de sa position de témoin passif des passions humaines pour montrer les signes d'une conscience et d'un besoin de donner du sens à l'existence.

A sa manière, Person of Interest est l'exact opposé de Touch, me poussant à vouloir en reprendre les critiques, opposant la logique divine et imprévisible de l'univers de Tim Kring à celle organisée et déterministe de Jonathan Nolan. Une confrontation intéressante qui en font les deux shows marquants de cette année, rencontre entre deux styles visuels et deux philosophies totalement contradictoire, entre ceux qui entrevoit la vie comme une surprise de chaque jour et ceux qui l'envisagent comme une construction logique et organisée, avec la nécessité d'un objectif à atteindre. 

 

 

Une mythologie intéressante, mais fragmentaire

Si Person of Interest est un show assez classique dans sa forme, la série possède une vraie mythologie qui repose essentiellement sur le mystère que porte en eux les deux personnages principaux. Cherchant à poser des bases solides, les scénaristes optent pour une déconstruction bien pensée de l'histoire de Finch en fragments, chaque retour dans le passé dévoilant une partie des étapes de construction de son monstre. Cette créature numérique, sur lequel l'homme tente encore vainement de se donner une illusion de contrôle, est le corps de la série et sa nature immatérielle le rend d'autant plus fascinant.

Si la création de Harvey représente le symbole d'une certaine soif de pouvoir, le détective Carter est le symbole de la nécessité d'un contre-pouvoir, posant un jugement objectif sur le bien-fondé des activités des deux hommes. En retrait par rapport au duo vedette, la jeune policière se limite à une participation anecdotique, mais absolument nécessaire pour venir équilibrer la confiance que Reese accorde à son nouveau partenaire. Moyennement convaincant jusqu'ici, ce personnage est un investissement pour l'avenir, symbole de l'imperfection actuelle du show, mais aussi des promesses qu'il porte avec lui.

Si le potentiel de la série est très grand, l'épisode paye le prix d'une progression très prévisible, la mission du jour manquant d'une réelle touche d'imprévisibilité. Très élégante au niveau du concept, PoI n'a pas encore de vraie routine sur laquelle s'appuyer pour offrir des épisodes vraiment convaincants et apparaît pour l'instant comme imparfait, symbole d'un univers où le réseau, fruit de la paranoïa des hommes, vide lentement le monde de sa substance première : le coeur.

 

Une gestion impeccable du tempo

Si le final peine à surprendre et paraît assez tiré par les cheveux lors de la séquence du téléphone, la forme et la photographie sont particulièrement remarquables, donnant un aspect profondément immersif à cette intrigue. Très travaillée formellement, la scène d'action finale fonctionne étonnamment bien, jouant la carte d'une sobriété qui s'avère assez payante. Essayant de varier les approches des scènes d'action (dont une très réussie en hors champ), PoI reste une série embryonnaire qui se permet le luxe d'expérimenter, se renforçant secondes après secondes. 

En conclusion, un épisode supérieur au pilote qui donne un peu d'épaisseur au duo Finch - Reese, laissant poindre une mythologie fascinante sur une version numérique du mythe de Prométhée. Manquant d'une routine forte pour fonctionner pleinement, PoI laisse entrevoir de belles dispositions et des qualités esthétiques impressionnantes par sa réalisation soignée et sa photographie impeccable. Seul le comportement trop rigide et un peu poseur des deux héros empêche encore de jouer vraiment le jeu d'une intrigue classique et prenante, mais qui peine encore à surprendre. 

 

J'aime : 

  •  le travail sur la forme impeccable 
  •  la mythologie convaincante 
  •  la gestion de la chronologie de l'épisode

 

Je n'aime pas : 

  •  une intrigue principale assez prévisible 
  •  des personnages encore un peu poseur 
  •  un manque de routine dans le déroulement du récit assez flagrant 

 

Note : 12 / 20 

Un épisode intéressant qui confirme tout le potentiel du pilot, montrant des qualités esthétiques et formelles qui rendent l'ensemble assez immersif. Hélas, le côté encore un peu poseur des personnages et l'intrigue principale assez prévisible empêche de faire preuve d'un réel enthousiasme devant la création encore trop rigide de Jonathan Nolan.

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