L'espoir d'un bonheur / Le parfum de la vengeance
Emily parvient à récupérer les preuves concernant la mort de son père, prétextant avoir aperçu l'homme aux cheveux blancs en train de les dérober à Daniel. Aussitôt, lui et Conrad essaient de remettre la main dessus, seul levier qui leur permettait de garder un moyen de pression sur l'Initiative. Pendant ce temps, Amanda tente de consulter les documents secrets de Grayson Global, mais le fichier est protégé par un mot de passe et Nolan Ross semble devenu injoignable.
Résumé de la critique
Un épisode réussi que l'on peut détailler ainsi :
- une lente chute des Grayson très bien orchestrée
- une évolution d'Emily intéressante et bien pensée
- un rythme trépidant, mais une intensité dramatique moins forte que prévue
- un bilan de la saison 1
La vengeance comme acte de destruction
Ils étaient la famille la plus influente des Hamptons, le symbole évident pour Amanda de la mort de David Clarke, leur nom signifiant la cruauté de ceux qui ont fait le choix de sacrifier son père au profit de leur sécurité. Lentement, Emily aura su gagner la confiance du fils, profitant de cette position pour révéler les secrets les plus douloureux, goûtant au plaisir de les monter les uns contre les autres. Sur ce point, ce final ne déçoit pas, offrant l'occasion à l'héroïne de régler ses comptes avec Daniel, de montrer à Conrad l'ampleur de sa naïveté et d'offrir à Veronica une dernière occasion d'exprimer tout son cynisme.
Pour Daniel, la série sera restée longtemps ambiguë sur les sentiments d'Emily envers lui, laissant l'impression d'un pantin employé soit par sa mère, soit par son père, inconscient de sa nature profondément influençable. Alors que la neige commence à fondre et que le soleil revient, ce final marque la fin d'une hypocrisie, celle d'un garçon peu perspicace et jaloux qui fut incapable de percer la carapace de l'héroïne, de l'aimer suffisamment pour comprendre la vérité. A la différence de Jack dans l'épisode précédent, il n'aura vu que la surface visible, cru tous ses mensonges, incapable de différencier les mirages de la vérité.
Sa mère fut quelque part à l'origine de cette naïveté, utilisant fréquemment de son pouvoir pour protéger son fils des conséquences de ses actes. Femme protectrice désormais privée de sa famille et dépassée par les évènements, Victoria essaie avant tout de laver son nom, de se donner une dernière fois le beau rôle au détriment de Conrad. Poussée par son orgueil, ce personnage remarquable permet à Madeleine Stowe de nous offrir une dernière confrontation délicieuse avec Emily, son interprétation remarquable restant un des points très positifs de cette saison.
Pour Conrad, c'est sa tentative de fuite avec Lydia qui va lamentablement échouer, le laissant seul face au constat de son propre désastre et de son incapacité à comprendre les femmes. De ce point de vue, cette conclusion de la première saison se limite à achever l'histoire des Grayson, détruisant avec fracas et violence la parfaite illusion d'unité de cette famille. Une entreprise de destruction assez remarquable que les auteurs auront su mettre en place pièce par pièce, montrant combien la vengeance comme une entreprise de destruction à long terme qui n'implique pas forcément la mort.
La vengeance comme un acte d'amour
La bonne idée des auteurs de Revenge est d'avoir construit l'épisode, mais aussi la saison, sur l'idée qu'Emily ne cherche pas le décès des Grayson, mais leur annihilation sociale. Son plaisir est celui d'une joueuse d'échec, plaçant les éléments nécessaires pour pousser ses proies à s'entredéchirer, à révéler leurs forces et leurs faiblesses avant de sombrer dans l'infamie. La mort n'est pas un élément qui fait partie de son plan, la voyant comme une libération qui transformerait sa victime en un martyr, petite touche d'humanité qui appuie sa volonté de ne pas devenir les monstres qu'elle poursuit.
Tuer quelqu'un est donc un geste qu'Emily ne s'autorise que difficilement et à qui elle donne toute son importance, créant un certain malaise lors d'une confrontation trop directe qui la sort de sa zone de confort. La séquence d'affrontement avec James Morrison est d'ailleurs légèrement maladroite, l'équipe créative montrant un léger manque de maîtrise malgré le soin évident apporté aux cascades. Montrer les limites d'Emily, cette touche d'humanité qui la fragilise est la bonne idée de ce final, permettant de briser le masque du début de saison pour la transformer en une héroïne plus attachante, à la recherche de son propre paradis perdu.
Le point intéressant du scénario va reposer dans la construction en parallèle de l'intrigue concernant Charlotte, celle-ci fabriquant elle aussi une vengeance contre son ancien petit-ami Declan. Seulement, à la différence de sa soeur, cette entreprise de destruction est purement mesquine et ne fait que révéler sa propre détresse, détruisant un peu plus sa propre estime au lieu de la renforcer. La vengeance apparaît finalement comme une tentative désespérée de retrouver un bonheur perdu, un amour disparu que le temps a emporté avec lui.
Cette nécessité de croire en la possibilité d'un bonheur, voilà ce que la scène de mort de Sammy aura permis d'amener dans le coeur d'Emily, les scénaristes jouant avec délectation à nous faire croire en la possibilité d'un happy-end. S'amuser avec les éventualités, voilà le talent des auteurs de Revenge, même si la conclusion de son histoire avec Jack Porter reste assez prévisible. L'histoire n'en est qu'à ses prémisses et cette quête du bonheur devient lentement le véritable objectif d'une héroïne qui doit d'abord faire la paix avec les fantômes de son passé.
La vengeance amène le chaos
Cherchant visiblement à marquer le coup, les auteurs profitent des nombreux arcs en suspens pour offrir un récit dynamique, rythmé et plutôt trépidant. L'épisode va se découper autour de plusieurs confrontations, avec en point d'orgue celle entre Emily Van Camp et James Morrison. Seulement, la scène n'a pas l'impact espéré tant cet homme aux cheveux blancs manque cruellement d'épaisseur et ne possède pas la portée symbolique espérée par les auteurs. Son utilité se limite à marquer la transition entre l'histoire des Grayson et une seconde saison qui reste encore un peu trop floue et assez ouverte.
Les autres confrontations sont bien plus intéressantes pour l'héroïne, en particulier les adieux de Victoria qui vient savourer sa victoire pathétique, signe révélateur de la faiblesse d'une femme qui aura eu une foi aveugle dans sa capacité de jugement. Ce cadeau de fiançailles n'est finalement que le témoin de son incapacité à tendre les bras vers l'héroïne pour demander son pardon, une insolence qui ne lui a pas permis de conserver l'unité de sa famille, détruisant sa relation avec chacun de ses enfants. C'est sur ce point que le final est une vraie réussite, dressant le portrait d'une femme qui a fait les mauvais choix, détruisant les quelques possibilités de bonheur qui se sont offertes à elle.
En conclusion, un final très classique pour une série qui aura su trouver l'équilibre entre un soap populaire foisonnant et un drame dur et cruel, celui de la mort d'une famille sous l'effet du poids de la culpabilité. Préférant inscrire le scénario dans une continuité plutôt qu'un cliffhanger spectaculaire, les scénaristes nous offrent une conclusion cohérente avec le reste de la saison, même s'ils nous privent d'une conclusion réellement dramatique. Moins tragique qu'espérée, Revenge se conclut de la plus intéressante des manières, en ouvrant une porte pour la suite, avec la certitude que les auteurs sauront comme toute cette saison ne pas nous décevoir.
Paradis perdu
S'il y a bien eu une surprise cette année, c'est clairement Revenge, série en apparence assez anodine et très classique, mais qui est l'une des rares à faire le pari gagnant du long terme dès sa scène d'ouverture. Construisant lentement son univers, le show de Mike Kelley apparut dans un premier temps comme artificiel, reposant sur une formule légèrement bancale autour des vengeances d'Emily Thorne contre les responsables de la disparition de son père. La recette a mis quelques temps à prendre, certains comédiens peinant à entrer dans leurs personnages pendant que Gabriel Mann, Madeleine Stowe et Henry Czerny se montraient immédiatement épatants.
Seulement, si l'équilibre de l'ensemble restait maladroit, le principe des vengeances paraissait assez jouissif, l'héroïne se montrant d'une hypocrisie totalement délicieuse. Difficile d'oublier cette scène au restaurant où Daniel rencontre le frère de sa victime, première scène où Amanda Clarke en un sourire mielleux s'est imposée comme un personnage fascinant et captivant. A partir de là, Emily Van Camp est brutalement devenu plus à l'aise, incarnant une héroïne moins robotique et particulièrement attachante par les petites faiblesses qu'elle laissait apparaître.
La déclaration d'amour de Jack sur le ponton laissa alors entrevoir la possibilité d'une série plus ambitieuse que prévue, construisant une intrigue plus feuilletonnante et assez intense, devenant de plus en plus immersive. Montrant une maîtrise surprenante de leur récit, les auteurs s'amusaient à nous surprendre en particulier grâce au personnage brillant de Tyler, porté par un Ashton Holmes totalement épatant. Le thème du paradis perdu apparaissait alors par le biais de flashback émouvants, laissant entrevoir la complexité d'une histoire se construisant sur trois époques distinctes.
Avec la scène de la plage, ce fut le coup de génie des auteurs de Revenge, réussissant l'exploit de ramener le scénario autour d'une scène décisive qui marquait l'introduction de la saison. La série atteignait alors des sommets, laissant espérer un final dramatique puissant, tant le potentiel du show semblait indéniable. L'utilisation subtile du rythme des saisons, le soin extrême apporté à l'esthétique de l'ensemble confirmait les ambitions des auteurs, avec une période hivernale superbe du point de vue de la réalisation, comblant un scénario qui marquait un petit essoufflement.
Heureusement, le show aura su jusqu'au bout ne pas s'égarer de son intrigue principale, offrant des personnages fascinants même si l'absence d'Amanda et de Takeda a joué en défaveur de cette fin de saison. Moins maîtrisé, ce dernier tiers fut plaisant malgré tout, offrant des épisodes toujours immersifs, mais perdant un peu de leur intensité. Heureusement, la qualité du casting désormais au diapason avec les derniers épisodes surprenants de Joshua Bowman laissait voir les qualités d'un show qui préférait clairement se projeter vers l'avenir sans griller leurs cartouches tout de suite.
Bon choix ou mauvais choix, l'avenir nous le dira, tandis qu'Emily Thorne court après son paradis perdu, celui d'une enfance volée par des hommes cruels et une femme manipulatrice et arrogante. Une quête qui n'est qu'une course sans fin, que seul l'espoir d'un avenir ailleurs pourra l'empêcher d'accomplir sa mission, poussée par sa propre culpabilité d'avoir cru les autres contre son propre coeur.
J'aime :
- les acteurs très bons
- la réalisation impeccable
- le rythme rapide sans temps mort
- la confrontation entre Emily et Victoria
- le parallèle intéressant entre Charlotte et Amanda
Je n'aime pas :
- moins intense qu'espérée
Note : 15 / 20
Un final cohérent avec le reste de la saison, multipliant les rebondissements pour laisser entrevoir à Emily la possibilité d'un bonheur pour mieux lui retirer brutalement. Servie par d'excellents comédiens, une fin de saison qui marque l'achèvement de la destruction de la famille Grayson et conclut en beauté une saison vraiment très réussie.
Ainsi s'achève pour moi cette première saison de Revenge. Merci à SerieAll, tous ceux qui m'ont aidé et aux lecteurs pour leurs commentaires sur la série qui m'ont aidé à garder un peu d'objectivité.
A bientôt pour la saison deux.