Critique : Switched at Birth 1.16

Le 11 février 2012 à 20:05  |  ~ 8 minutes de lecture
Un épisode qui aborde le thème central de l'identité, qu'elle soit biologique, sociale ou ethnique, avec une subtilité particulièrement discutable.
Par sephja

Critique : Switched at Birth 1.16

~ 8 minutes de lecture
Un épisode qui aborde le thème central de l'identité, qu'elle soit biologique, sociale ou ethnique, avec une subtilité particulièrement discutable.
Par sephja

Cogito ergo sum 

Angelo a disparu et Regina et sa mère s'affrontent sur ce point, poussant Daphne à se réfugier du côté des Kennish qui s'apprête à recevoir la visite de la mère de Kathryn. Réputé pour son franc parler et son manque de tact, celle-ci va se montrer particulièrement intéressé par la fille Vasquez, délaissant Bay qui se voit proposer un projet artistique par son école. Pendant ce temps, Simone tente de pousser Toby à lancer sa carrière de musicien en solo. 

 

Résumé de la critique 

Un épisode moyen que l'on peut détailler ainsi : 

  •  l'importance des valeurs dans l'identité 
  •  une série qui ne sait pas parler de la lutte des classes 
  •  un discours tolérant asséné sans aucune subtilité 
  •  une intrigue qui enfonce des portes ouvertes 

 

 

L'identité comme une quête 

Pour cet épisode, SaB se pose la question de l'identité par le biais de l'arrivée de ma mère de Kathryn qui vient marquer une pause dans la progression de la saison. Nous voici donc devant un épisode qui délaisse la narration au profit d'un discours moral tournant autour de la notion d'identité concernant directement Bay et de Daphne. Pour simplifier une question assez vaste, les scénaristes l'abordent de trois points de vue : génétique, social et évidemment ethnique. Un thème intéressant pour une série sur l'échange et la difficulté du partage qui ne va pas vraiment réussir à convaincre, la faute à un écriture qui manque cruellement de finesse. 

Commençons par l'identité génétique incarnée par la mère de Kathryn, laquelle va tenter d'établir une vraie connexion avec Daphne, abandonnant Bay qui se sent à juste titre mise de côté. L'intrigue met dans un premier temps mal à l'aise, trop prévisible et montrant un manque de finesse particulièrement consternant, appuyant sur l'idée pourtant intéressante que la famille est avant tout définie par le lien génétique. Si le démarrage est médiocre et cliché, la suite se montre plus inspirée, montrant l'attachement indiscutable de John et son épouse à leur fille officielle tout en soulignant la difficulté qu'ils ont à se connecter avec leur fille biologique. 

Entre frustration et incompréhension, cette intrigue apporte un touche d'émotion assez forte par les scènes d'opposition de Kathryn à sa mère autour de la question de la place de Bay dans le tissu familial. Plaçant les valeurs morales avant la génétique, SaB définit la parentalité comme quelque chose qui se construit avec le temps, reniant les fantasmes autour de l'amour inné et la construction d'un lien mystérieux et pré natal entre la mère et l'enfant. Une vision morale de l'identité assez intéressante, offrant le meilleur arc de cet épisode qui doit beaucoup à la performance touchante de Meredith Baxter. 

 

Souris des villes et rat du ghetto 

Bon, venons en à la partie la moins intéressante de cet épisode, reposant sur Daphne, la question de l'identité sociale et le fait que la jeune sourde se soit "embourgeoisée". Dans le collège de Bay, elle retrouve une amie de sa banlieue populaire, une hispanique qui va souligner combien le fait d'habiter avec les Kennish l'a changé, lui donnant des manières d'un autre monde. Ce qui m'agace dans cet épisode n'est pas en priorité l'accumulation de clichés sur la bourgeoisie et les classes populaires, mais bien la naïveté de Daphne qui semble convaincu que le contexte de son quotidien n'a pas d'effet sur elle. 

Au-delà des barrières sociales, il s'agit de souligner la façon dont la jeune sourde a coupé les ponts avec ses anciennes amies, offrant un point de départ qui va bien plus loin qu'une simple opposition entre riches et pauvres. En emménageant chez les Kennish, elle a brisé des liens et trahit des amitiés avec tout un pan de son existence, prouvant l'importance du choix dans la construction d'une identité en insistant sur la façon dont les choix que l'on fait et le temps qu'on accorde aux personnes nous définissent en tant qu'individu.

Seulement, au lieu d'explorer ce point de vue, SaB nous offre une suite de saynètes balourdes où l'amie du ghetto vient se confronter à l'amie bourgeoise de Daphne pour mieux prouver sa supériorité. De ce point de vue, le monde se divise entre les pauvres et les riches qui ne peuvent s'entendre, séparés par une barrière invisible de la classe sociale, théorie cynique qui définit l'individu par les clichés qu'il emporte avec lui. Une vision simpliste de l'identité sociale, thème pourtant majeur dans une époque où les réseaux sociaux semblent vouloir redéfinir le concept de lutte des classes. 

 

 

Débat sur l'identité nationale 

Dernière approche de la question de l'identité, l'épisode va poursuivre dans sa lancée en enfonçant une porte ouverte concernant le cas de l'identité culturelle. Sans lien avec la génétique, cette part de nous-mêmes est le fruit d'une sensibilité à certaines formes culturelles, fruit d'une éducation qui nous rend plus apte à déchiffre certains codes sociaux plutôt que d'autres. Pour être plus clair, l'identité nationale se définit par le fait que l'on soit plus sensible à une expression culturelle dont on comprend les codes plutôt qu'une autre, l'ignorance amenant à la construction de clichés simplistes, base du racisme populaire. 

Ce que le scénario envisage maladroitement comme un défaut n'est que le fruit d'une éducation, un apprentissage qui définit notre identité par la capacité à comprendre certaines expressions culturelles plutôt que d'autres. L'idée que la mère de Kathryn pense que Bay est mauvaise élève à cause de ces racines latines est une erreur classique où le génome est envisagé de manière déterministe, bien mis en évidence par les scénaristes. Un thème complexe mal abordé qui dénonce les clichés par des raccourcis simplistes (ou clichés, si vous voulez) et n'arrive pas à dire clairement que l'identité nationale est, par nature, le fruit de l'éducation par nature multiculturaliste. 

L'intention est bonne, mais le discours trop simpliste donne au final un épisode décevant, pointant trop tardivement l'art comme une soif d'universel, quelque chose qui transcende la culture et touche à l'humain avant tout. La scène où Bay demande l'aide de sa mère biologique pour corriger sa peinture est plutôt bonne, rattrapant les nombreuses fautes d'un scénario qui, à force de vouloir démontrer, aura oublié de raconter une histoire digne de ce nom. 

 

La bonne parole assénée à coup de massue 

Série sur l'identité et la famille, SaB nous offre un épisode très intéressant du point de vue idéologique, mais qui montre une tendance à asséner ses vérités avec un manque de subtilité flagrant. L'intrigue de Daphne et Simone est un vrai désastre, suite de sketchs artificiels soutenant l'idée que l'intolérance est avant tout le fruit d'une absence de dialogue. Si le principe n'est pas idiot en soi, les auteurs oublient de créer un contexte crédible, donnant à cet épisode des allures de pamphlet sur le thème de l'identité. 

En conclusion, un récit qui me rappelle combien je déteste les pamphlets et privilégie le fond à la forme, utilisant l'intrigue du jour pour défendre la philosophie utopiste du show. Si les intentions restent honorables, seul l'histoire de la confrontation entre Kathryn et Bonnie parvient à donner un peu d'humanité à un épisode vraiment trop en rupture avec le précédent. La façon dont le cas d'Angelo est évacué reste le point le plus gênant de cette histoire à l'apparence d'une simple parenthèse, offrant des storylines annexes qui ne servent qu'à faire du remplissage. 

 

J'aime : 

  •  les scènes entre Kathryn et sa mère 
  •  la qualité de l'interprétation de Lea Thompson et Meredith Baxter 

 

Je n'aime pas : 

  •  un épisode qui marque une rupture regrettable 
  •  l'intrigue de Daphne sur fond de lutte des classes 
  •  l'histoire trop prévisible 
  •  une utilisation regrettable de nombreux stéréotypes 

 

Note : 10 / 20 

Un épisode clairement en rupture avec la progression de la saison et qui cherche à évoquer le thème de l'identité avec beaucoup de maladresses et de lourdeur. Seule la storyline de Kathryn sauve l'épisode, conflit assez touchant entre une mère et sa fille là où le reste de l'épisode multiplie les clichés.

L'auteur

Commentaires

Avatar Natas
Natas
Je suis d'accord avec toi, cet épisode est pas super. Mais j'ai aussi aimé les scènes entre Kathryn et sa mère...

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