Maintenant que je t’ai attiré sur cette page avec mon titre racoleur, laisse moi te poser une question, ami lecteur : cite moi une série geek ? A 95%, je suis certain que ta réponse est The Big Bang Theory. Soit, c’est une série avec des caricatures de geeks mais ce n’est pas la seule (fort heureusement d’ailleurs). The It Crowd, que la légende décrit comme étant la série à l’origine de TBBT, fait partie de ses séries geeks moins répandue mais beaucoup plus intéressante que la série de Chuck Lorre. Composée de quatre saisons diffusées de 2006 à 2010 sur Channel 4 (oui, la série est anglaise pour ceux qui ne le sauraient pas), le doute a longtemps plané sur une hypothétique cinquième saison. Et finalement, dans l’indifférence la plus totale, un épisode final a été mis en chantier pour apporter une conclusion à la série.
Le texte qui suit est la critique de ce dernier épisode.
Retour chez Reynholm Industries
Après autant de temps entre le dernier épisode de la quatrième saison et ce spécial, le plaisir de retrouver Moss, Roy et Jen suffit à lui seul à justifier l’existence de l’épisode. On est sur un spécial prévu pour les fans et rayon fan service, c’est plutôt bien fourni. Clins d’œil de personnages récurrents (ah, Desmond de nouveau gothique), reprises de gags ou même allusions directes à des épisodes passés, il est inutile de préciser que quiconque n’a jamais vu la série passera à côté de la moitié des vannes (d’ailleurs je ne comprendrais pas l’intérêt de commencer à regarder une série par son final).
Et même si certaines de ces références ne sont pas toujours amenées de façon subtile, c’est suffisant pour toucher la corde nostalgie et faire resurgir les souvenirs liés à l’épisode en question. Pas de prise de tête, ça passe tout seul.
Fort heureusement, l’épisode n’est pas non plus qu’un pot pourri de références et offre aussi une nouvelle histoire à chacun de nos personnages. Il faut dire qu’avec une durée de 40 minutes, l’épisode a de quoi développer quelque chose de sympathique. Malheureusement, cette durée va être plutôt préjudiciable : les quarante minutes se font sentir et on a parfois l’impression d’être face à du remplissage, surtout dans la seconde partie où les intrigues de chacun ont du mal à se combiner.
Moss hérite d’une intrigue assez classique pour le personnage : il manque de confiance en lui et cherche conseil pour améliorer ça. Reynholm lui conseille alors de porter un pantalon pour femme et, effectivement, l’effet est radical sur Moss : beaucoup plus confiant en lui, il fait des prouesses. Si la première partie de l’intrigue du personnage est particulièrement fun (la première émission Game Board est à hurler de rire, de même que la parodie de Superman), on sent que cette histoire de pantalon finit par peser sur Graham Linehan qui a beaucoup de mal à y apporter une conclusion. On a donc droit à quelques scénettes ridicules autour de Moss qui ne supporte plus le pantalon : Richard Ayoade en fait des caisses et on en vient à regretter que ce pan de l’épisode n’ai pas juste duré que 20 minutes.
De son côté, Roy a enfin trouvé l’âme sœur, mais son inadaptabilité sociale lui joue des tours. Là encore, l’intrigue est assez classique pour le personnage. Elle offre offre quand même quelques moments drôles. En revanche, l’intrigue du début avec Jen essayant de draguer le serveur du café du coin est ni intéressante, ni drôle. Heureusement que Moss assure la première partie niveau fun parce que les deux autres sont un peu pauvres de ce côté-là.
Quant à Reynholm, si ses premières interventions avec les autres sont plutôt réussies (le coup de l’espionnage des employés est magique), une fois lâché seul dans la nature, il finit lui aussi par tourner en rond. Son retour en grâce ne viendra qu’à la toute fin de l’épisode, lorsqu’il retrouve les trois autres. Là encore, il est dommage que le personnage n’ait pas été mieux exploité pour ce final.
Ne jamais fâcher les internets
Heureusement, les intrigues de Roy et Jen vont se croiser en milieu d’épisode pour sortir l’épisode de la débandade vers laquelle il se dirigeait. En jetant son café à la tête d’une clodo et en insultant un nain (les blagues sur les nains, ça marche toujours), Jen et Roy deviennent la cible de tout le pays et d’internet. Comme le dit Roy, ils ont fâché l’internet. S’en suit alors une série de quiproquos et de petits gags autour de ça, plus ou moins drôles selon la maîtrise qu’en a Linehan mais dans l’ensemble efficace.
Parce que, pour en revenir à ce que je disais en introduction, la différence entre Big Bang Theory et The IT Crowd est là : la maîtrise de son sujet par son créateur. Moss et Roy (et Jen indirectement) sont bizarres mais pas complètement asociaux ou autistes : ils sont normaux pour leur milieu. Quiconque a déjà été dans une vraie boutique informatique (et pas dans une grande surface où les vendeurs se contentent de lire l’étiquette) ou a eu affaire à un service informatique peut en attester : parfois, ces mecs (il n’y a pas de filles ou alors elles ressemblent à des mecs) sont carrément bizarres. Et ce sont des Moss et Roy en puissance et pas des caricatures de geeks.
Et le principal reproche que je peux faire à The Big Bang Theory comparé à The It Crowd, c’est de nous présenter des caricatures qui se contentent d’accumuler des références à Star Trek parce que ça fait « hype ». Dans BBT, les vannes sont à un niveau : si tu ne comprends pas, tu entends les rires préenregistrés et tu as l’impression d’être passé à côté de quelque chose, tout simplement parce que les scénaristes ont sortis une référence à un comics que personne ne connait. The It Crowd est beaucoup plus subtile là-dessus : oui, il y a des blagues faciles, oui, il y a des références geeks avec des rires préenregistrés mais les scénaristes les rendent accessibles au plus grand nombre.
Quand les Anonymous ou Twitter sont détournés dans ce final, il n’y a pas forcément besoin de tout savoir là-dessus pour comprendre les blagues. Quelqu’un qui ne connait pas les Anonymous va trouver marrant ce mec masqué qui menace Roy et Jen parce que c’est du n’importe quoi. Quelqu’un qui connait, même un peu, le groupe, va rire aussi parce que la caricature est bien faite. Il n’y a pas vraiment de sensation de laisser sur la route des gens.
Quant aux vrais geeks, les vrais de vrais, ils trouvent aussi leur compte dans les multiples références masquées. Que ce soit le sous-sol, les T-Shirts de Roy ou la façon de dire quelque chose, la série est truffée de références que seuls les initiés peuvent comprendre. Et contrairement à BBT, il n’y a pas toujours de rires préenregistrés sur ses références, ce qui évite la frustration d’être passé à côté de quelque chose. The It Crowd est universelle et parle à tous, initiés ou non.
Et le gros point négatif de ce final, c’est d’être un final. Parce qu’à le regarder, même si l’intrigue est parfois mollassonne, même si quelques trucs tombent à plat, on a envie que ça continue. Même s’il n’est clairement pas le meilleur épisode de la série, cet épisode offre quand même de francs moments de rigolade, ce qui est déjà beaucoup vu le niveau des comédies actuelles. Le plaisir de retrouver les personnages pour un dernier tour de piste compense largement les quelques errements de l’intrigue qui souffre du passage au format 40 minutes. Et même si une bonne partie des blagues sont à connotations geek, celles-ci restent quand même assez universelles pour que tout un chacun puisse y trouver son compte.
Un dernier épisode que les fans apprécieront et qui leur permettra une fois de plus de regretter que The Big Bang Theory ne soit pas aussi drôle (oui, c’est du troll gratuit).
J’ai aimé :
- Retrouver Moss, Roy et Jen
- Les références aux épisodes passés
- Game Board
Je n’ai pas aimé :
- Les intrigues un peu longuettes
- Reynholm qui est un peu sous-exploité.
- C'est fini
13/20