Critique : Woodley 1.01

Le 19 mars 2012 à 04:59  |  ~ 7 minutes de lecture
Un pilot brillant et étonnamment drôle qui l'inscrit dans la droite ligne de Stan Laurel pour le personnage et de Jacques Tati pour le style très visuel des gags.
Par sephja

Critique : Woodley 1.01

~ 7 minutes de lecture
Un pilot brillant et étonnamment drôle qui l'inscrit dans la droite ligne de Stan Laurel pour le personnage et de Jacques Tati pour le style très visuel des gags.
Par sephja

C'est l'histoire d'un oeuf géant 

C'est l'histoire d'un homme maladroit, multipliant les catastrophes jusqu'à ce que cela lui coûte sa famille. D'un homme obligé de travailler dans un costume d'oeuf géant toute la journée. Mais avant tout, c'est le récit de Woodley, un homme qui ne vit qu'au travers de sa fille, seul moment de bonheur dans une vie bien morne et vide. Et plus que tout, c'est le coup de coeur de ce début d'année 2012, une comédie hilarante et très originale, digne descendante des humoristes burlesques du siècle précédent.

 

Résumé de la critique 

Un épisode brillant que l'on peut détailler ainsi :

  •  Woodley en héros burlesque impayable 
  •  un sens du gag remarquable 
  •  quelques fautes de goût regrettables
  •  une série originale à découvrir

 

 

Une comédie influencée par le burlesque 

Comique australien très populaire, Woodley nous offre une série à son image, avec un goût pour le burlesque particulièrement appuyé et une écriture originale. Pas la peine d'attendre les traductions vus que les trente minutes d'épisodes ne contiennent que neuf phrases parlées, l'humour reposant sur une dynamique essentiellement visuelle. Entre Stan Laurel pour son personnage et Jacques Tati pour la construction très mécanique des gags, la série est une vraie originalité, malgré une tendance regrettable à vouloir en faire un peu trop.

Personnage lunaire et maladroit, Woodley partage sa vie avec sa fille à laquelle il est très attaché et une ex-femme qui a fini par ne plus supporter sa maladresse et son comportement lunaire. Incapable de se racheter, il bafoue quelques rares mots en sa présence, achevant le moindre discours par une catastrophe inévitable qui ne font que l'enfoncer un peu plus. Son quotidien n'est pas plus glorieux, sa vie se limitant à un travail au quotidien consistant à porter un costume d'oeuf géant pour distribuer des tracts publicitaires.

C'est avec ce contenu limité que Woodley va prouver l'ampleur de sa créativité, proposant un déluge de gags savoureux et fréquemment hilarants. Reprenant le concept des films burlesques américains, le comique australien oscille entre tristesse et hilarité, composant un personnage rêveur particulièrement attachant à la destiné tragique. Comme un miracle, la série parvient après cinq premières minutes assez maladroites à poser son rythme et son style, fréquemment brillant.

 

Le talent pour composer des gags 

Dès la première scène, un élément saute aux yeux, à savoir le goût de Woodley pour les constructions mécaniques où rien n'est laissé au hasard. Il faut ainsi laisser du temps pour laisser l'épisode se mettre en place et se laisser prendre par le rythme et le style du comédien, les premières minutes pouvant surprendre. Pourtant, l'auteur met lentement en place une routine élégante lors d'une valse absurde de toasts brulés où la dynamique entre instant de contemplation et fulgurance comique s'installe petit à petit, maniant à merveille différents registres d'humour.

Le gag du "lait pleureur", vraie trouvaille absolument brillante, est la preuve que Woodley est capable de faire deux fois le même gag tout en changeant intelligemment son sens. Très expressif, le comédien passe sans cesse de la comédie au registre dramatique surtout lorsqu'il enfile sa tenue d'oeuf, se privant alors de sa capacité de mouvement et d'interaction avec l'extérieur. Enfermé dans sa coquille, il trouve la parfaite définition de son personnage, subissant la méchanceté des autres, mais aussi les catastrophes dues à sa propre étourderie.

Il y a une vraie fantaisie dans Woodley, mais surtout ce mélange de tristesse et de cynisme envers son personnage qui rappelle définitivement les grands comiques burlesques. Réduit à l'impuissance perpétuelle dans son costume d'oeuf géant, ce héros venu d'Australie est terriblement attachant, l'épisode posant avec finesse et un certain brio les éléments nécessaires pour comprendre son histoire.

 

 

Le danger de vouloir trop bien faire 

Par son inventivité, sa créativité et son histoire profondément touchante, Woodley mériterait que l'on parle de chef d'oeuvre tant certains passages sont d'une poésie indéniable. N'excusant jamais son personnage, il donne raison à sa femme d'être partie, son étourderie le poussant à décevoir même sa propre fille, devenant par sa propre nature l'image d'un mauvais père. C'est ceci que la série veut raconter, l'histoire d'un homme en quête de rédemption, d'un bonheur qui le rendait meilleur et qu'il a perdu le jour où le destin d'un canard a pris le pas sur sa fille à ses yeux.

C'est là que la série déçoit un peu, faisant le gag de trop en cherchant à nous épater, comme celui du ventilateur moyennement inspiré. Tout part d'une vraie bonne volonté de l'auteur, mais ces petites fautes de goût sont le plus souvent dues à une mauvaise mise en valeur de certains effets comiques, comme celui des oeufs dans la première scène.  A l'image du personnage qu'il s'est créé à l'écran, l'auteur veut trop bien faire et commet le gag de trop, seul élément séparant cet épisode d'une perfection qu'il atteint dès que le costume d'oeuf est enfilé.

A l'image de son personnage, Woodley commet à quatre reprises des petites maladresses qui viennent ruiner la qualité impeccable du reste de l'épisode. Personnage lunaire au destin tragique, il incarne un mélange de naïveté et de tristesse, offrant une scène finale de course contre-la-montre superbe, laissant l'impression d'un show terriblement brillant et sympathique, mais encore perfectible.

 

Premier coup de coeur de 2012

Difficile de ne pas se montrer enthousiaste devant cette très bonne surprise qu'est Woodley, même s'il semble difficile de tenir un tel niveau de qualité durant huit épisodes. A l'heure où les comiques burlesques ont presque disparus, découvrir ce show revient à trouver une perle imparfaite, parfois maladroite, mais au charme indéniable et surprenant. Une nouvelle série comique qui mérite d'être découverte, tant l'originalité et la tendresse de son personnage principal en fond mon premier vrai coup de coeur de 2012.

En conclusion, un épisode remarquable, utilisant au minimum les dialogues pour offrir trente minutes d'humour burlesque brillant, quelque part entre Stan Laurel pour le personnage et Jacques Tati pour la construction des gags. Lunaire par son étourderie et tragique par son destin, Woodley est le héros d'une farce racontant l'histoire d'un homme qui n'arrivait pas à sortir de son costume d'oeuf où il est pris au piège au propre comme au figuré. Une oeuvre originale, très touchante, mais qui commet à plusieurs reprises le gag de trop, touchant sans l'atteindre une certaine perfection.

 

J'aime : 

  •  le comique burlesque et sa construction très élaborée 
  •  le personnage de Woodley à la fois touchant et pathétique 
  •  le final absolument brillant 
  •  les gags très originaux 
  •  la mise en scène remarquable 

 

Je n'aime pas : 

  •  quelques gags plus faibles que d'autres 

 

Note : 15 / 20 

Une série très originale et remarquable qui offre une suite ininterrompue de gags réussis et originaux, Woodley s'inscrivant comme le digne héritier des humoristes burlesques comme Jacques Tati. Portrait à la fois triste et joyeux d'un maladroit compulsif, poussé par la seule idée de ne plus décevoir sa fille, seul rayon de lumière dans une existence assez morose. Très poétique et touchant, le coup de coeur de ce début d'année 2012. 

L'auteur

Commentaires

Avatar Koss
Koss
"obligé de travailler dans un costume d'oeuf géant toute la journée" => IL l'a fait : trouver une scénario encore plus improbable que Akta människor. Sephja : il est fort.

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12.13
12.13

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