C'est quoi la première série de l'histoire ?
Au commencement, il n'y avait pas de série. Très longtemps après le commencement, c'est à dire 1895 ans après la naissance d'un certain Jésus Christ, Auguste et Louis, deux frères répondant au nom de Lumière, français qui plus est, inventent l'exploitation commerciale de la cinématographie à des fins de reportages. Cinquante ans plus tard, de grands sponsors s'intéressent au cinéma dans une petite boite, appelée aussi télévision, ce qui permet la création de programmes hebdomadaires diffusés avec le même générique et portant le nom du même sponsor. Ces programmes hebdomadaires ne le savaient pas encore, mais il allaient devenir un format à part entière, appelé série télévisée et engendrer bien des années plus tard de grandes stars comme Twin Peaks, X files ou plus récemment Lost.
Jusqu'à 1951 les programmes étaient tous tournés en direct depuis New York et s'apparentaient plus à du théâtre. Cette année-là, Lucille Ball et Desi Arnaz révolutionnent les émissions de télévision en créant leur propre studio de production situé sur Cahuenga Boulevard à Hollywood. Le nom de ce studio, Desilu, était une contraction des prénoms de ces deux acteurs (DESI et Lucille) et celui-ci allait devenir une légende, tout d'abord parce que le studio éponyme créa la première sitcom, et donc la première série télévisée officielle, mais aussi parce que plus tard celui-ci allait engendrer des séries comme Star Trek ou Mission Impossible.
« I love Lucy », la première sitcom des studios Desilu est donc née en 1951 des mains de ses trois créateurs Jess Openheimer, Madelyn Pugh et Bob Carroll Jr sous la production du studio Desilu. Sa première diffusion fut le 15 octobre 1951 et sa dernière le 6 mai 1957. Cette sitcom mettait en scène les aventures de l'extravagante Lucy Ricardo qui abandonnerait volontiers son statut de femme au foyer new yorkaise pour se lancer dans une carrière artistique. Mais son époux, chef d'orchestre, ne l'entendait pas de cette oreille...
Lucille Ball et Desi Arnaz, les deux acteurs fondateurs de Desilu
La sitcom en elle-même était déjà révolutionnaire, mais ce qui marqua le plus à son sujet fut le fait que trois caméras au lieu d'une étaient utilisées pour la tourner et surtout, ce fut la première émission de télévision tournée en 35mm, format habituellement utilisé au cinéma. Au final, la série s'était étalée sur 180 épisodes de 25 minutes et vit certains acteurs comme Orson Welles ou Bob Hope apparaître en tant que « guests » sur certains épisodes. Enfin, cette sitcom marqua la délocalisation de la production de New York à Hollywood.
Pendant la diffusion d'I love Lucy, en Angleterre naissait la première série télévisée Britannique: Dixon of Dock Green. Celle-ci fut diffusé à partir de juillet 1955 sur BBC One.
En France, nous n'avons pas beaucoup d'indications concernant la première série télévisée, mais ce qui est sûr c'est que le premier succès télévisé fut Thierry la fronde, qui commençât le 3 novembre 1963, suivit de près par Rocambole en 1964.
I love Lucy
Des séries et des arts
En 1919, Ricciotto Canudo Journaliste et écrivain français d'origine italienne publie dans la revue Romaine L'Epoca un texte intitulé « Défendons le cinématographe ! » dans lequel il déclare: « tous les arts, avant de devenir un commerce et une industrie, ont été à leur origine des expressions esthétiques de quelques poignées de rêveurs. Le cinématographe a eu un sort contraire, commençant par être une industrie et un commerce. Maintenant, il doit devenir un art. On veut accélérer le moment où il le deviendra pour de bon. »
Deux ans plus tard il parvint à faire entrer le cinéma au salon d'automne, une exposition d'art de Paris. En 1922, il fonde la gazette des septs arts, dans laquelle il publie l'année suivante le manifeste du septième art.
25 ans après sa naissance, le cinéma était passé de simple divertissement commercial au rang d'art. Avant lui, six arts étaient reconnus : l'architecture, la sculpture, la peinture, la musique, la poésie et le théâtre (qui incluait peut-être la photographie). Depuis, la télévision est plus ou moins reconnue en tant que 8ème art, suivie par la bande dessinée, le jeu vidéo et l'art numérique. Bien que l'on considère certains des derniers arts comme discutables, la série télévisée n'est pas encore classable dans le sens où elle ne représente encore qu'un divertissement. Je terminerai mon article de cette semaine là-dessus. La semaine prochaine, nous développerons le développement de la série télévisée dans les années 60, et nous nous intéresserons de plus près à la notion d'art et au fait que la série télévisée ne soit toujours pas prise au sérieux par la majorité des chaînes françaises.
En attendant, le débat est ouvert : si le cinéma est un art, la série télévisée peut-elle le devenir aussi ?
A vous la parole, et à mardi prochain pour la suite de cet article.