Critique : Better Call Saul 2.03

Le 09 mars 2016 à 18:06  |  ~ 7 minutes de lecture
Où Jimmy et Mike se retrouvent à faire des choix contre leur gré.
Par Koss

Critique : Better Call Saul 2.03

~ 7 minutes de lecture
Où Jimmy et Mike se retrouvent à faire des choix contre leur gré.
Par Koss

J’y ai vraiment cru. À la fin, j’ai vraiment cru que Gus allait faire son apparition dans ce hangar désaffecté, en pleine nuit. Ce n’était que Nacho qui annonçait à Mike la tempête à venir. Vince Gilligan et Peter Gould savent bien qu’on l’attend, mais ce ne sera pas pour cette fois. Cette impatience que j’ai ressentie traduit exactement ce qu’est ce début de saison : une attente. On attend que quelque chose se passe (« What did I miss ? Anything blows out ? » dit Jimmy à Kim). Dans de très nombreux cas, ce genre d’épisodes de « transition » au mieux ennuie, ou au pire agace. Pas dans Better Call Saul. Même dans ce cas, on apprend deux, trois trucs chez les deux personnages principaux de la série.

 

Better Call Saul Texas

 

 

La spirale du mensonge

 

Lorsqu’on a appris ce que pensait Chuck de Jimmy, on a été très surpris. Mais, si on regarde le déroulé de cet épisode, peut-on réellement estimer que Chuck a tort de se méfier de son frère ? Jimmy ment. Il fabrique des fausses preuves. Il passe au-dessus de sa hiérarchie. Là où la série est maligne, c’est qu’elle nous montre qu’à chaque fois, c’est Chuck qui le « pousse » à commettre ses actes. Le fait-il par pur sadisme ou cherche-t-il à vérifier que son frère est fiable ? Dans les deux cas, Sleeping Jimmy est une victime.

Sauf que Saul Goodman n’est pas une victime. Il sait très bien ce qu’il fait. C’est juste un homme qui ne veut répondre à rien ni personne. Un homme qui n’aime pas beaucoup la difficulté. Là-dessus, son passé d’arnaqueur et la bague de Marco qu’il porte constamment au doigt jouent énormément. Faire du fric facile, Jimmy sait le faire. Parler ou raconter n’importe quoi, Saul en est un expert. Au fond de lui, je pense que Jimmy McGill a un égo surdimensionné. Il reste persuadé que c’est lui qui a raison, qu’il sait ce qu’il faut faire. Le problème, c’est qu’il est persuadé que les autres ne le voient pas. Alors il fait tout pour le prouver, à son frère, à Kim, à tout le monde, etc.

 

Tableau Better Call Saul

 

Et la mise en scène démontre très bien cela. Il y a notamment ce plan où Jim quitte son bureau en passant devant le tableau de « l’homme qui glisse ». Au premier plan, on aperçoit tous les voyants peu à peu s’allumer en vert. En un plan, on observe toute la dualité de notre héros : ce que les gens voient en premier et ce qu’il est vraiment (un homme qui pense trouver des solutions).

Celle qui se tient au milieu de cette dualité, c’est Kim. Elle voit le talent de l’homme qu’elle aime. Elle le lui dit, d’ailleurs, dans cet épisode. Le problème, c’est que la « voie de Kim » est celle de la rectitude morale absolue. Et ça, Saul Goodman ne peut s’y résoudre. C’est viscéralement impossible pour lui. Jimmy aurait dû expliquer à son patron qu’il avait fait tourner la vidéo. Avec son naturel bagou, il avait tous les moyens pour l’en convaincre. Il ne le fait pas, parce qu’il a trop peur du refus ou de l’échec. On peut aussi interpréter ça comme de l’auto-sabotage. C’est plus fort que lui, il doit passer par des voies parallèles pour arriver à ses fins.

 

 

La spirale du crime

 

Mike se retrouve confronté au même problème. Cela avait été une surprise en saison 1, le légendaire tueur à gages se refusait à tuer. Il avait un code. Là où la série est très forte, c’est qu’elle joue parfaitement sur la temporalité. Jonathan Banks a vieilli et il est censé jouer un Mike plus jeune. De fait, et immédiatement à l’image, il apparaît aux yeux du spectateur comme plus affaibli que dans Breaking Bad. Alors oui, on accepte beaucoup plus facilement l’idée que Mike ne tue pas. On l’intègre mieux encore, depuis qu’on sait pour la perte de son fils.

C’est justement sa famille qui va le pousser à briser ce code. Si Chuck est indéniablement la kryptonite de Jim, c’est Stacey qui l’est pour Mike. Comme souvent dans l’univers Breaking Badien, plusieurs interprétations sont possibles : Stacey souffre-t-elle de T.S.P.T., (Trouble de Stress Post-Traumatique) lié à la perte de son mari ? Y a-t-il réellement quelqu’un qui lui en veut ? A-t-elle, elle-même, fait le trou dans le mur de sa maison ? Les coups de feu entendus par elle viennent-ils d’une arme ou de la voiture du distributeur de journaux ?

 

Saul Goodman filme

 

Sur ce point précis, la série étale tout son génie. En effet, l’argent que Mike va essayer de chercher pour rassurer sa belle-fille (parce qu’il se sent coupable de la mort de son fils), il n’en fera jamais profiter Stacey et Kaylee. On l’a vu dans Breaking Bad, cet argent est balancé par Jesse en pleine nuit dans un quartier résidentiel, exactement comme le ferait… un livreur de journaux. C’est en soulignant ce genre de détail ironique que le spin-off prouve pleinement son utilité et vire totalement au sublime.

 

Dans cet épisode de transition, nos deux héros sont chacun à leur manière poussés à briser leur code respectif, pour ou à cause de leur famille. Maintenant que leurs intentions sont clairement posées, la saison peut accélérer le tempo. Je l’espère, tout du moins.

 

J’ai aimé :

 

  • Une mise en scène de très haute tenue.
  • Le méta de l’épisode. Lorsque Jim décrit un épisode type d’Arabesque, on jurerait qu’il parle de Breaking Bad et de ses rebondissements un peu soapesques parfois.
  • La pub réalisée par Jimmy. Assez géniale.
  • Découvrir un film de sous-marin que je ne connaissais pas. On ne le dira jamais assez : vive les films de sous-marins !

 

 

Je n’ai pas aimé :

 

  • C’est encore un peu trop lent.
  • La légère frustration sur la non-présence de Gus.

 

 Ma note : 14/20.

 


Le coin du fan :

 

  • Mike répare un ours en peluche rose qu’il donne à Kaylee. Le même ours en peluche qu’il utilise des années plus tard, dans l’épisode 2 de la saison 5, comme distraction.

 

     Ours en peluche Better Call SaulOurs en peluche Breaking Bad

 

  • Ice Zebra Station (le film de sous-marin que je ne connaissais pas et que regardent Kim et Jimmy) est le nom utilisé par Saul pour l’une de ses nombreuses fausses sociétés.

 

Ice Zebra Station

 

  • Les deux étudiants employés par Jim pour faire la pub sont les mêmes que ceux de la saison 1 qui l’avaient aidé à réaliser « l’arnaque de la pancarte ».

 

L'arnaque du panneau

 

  • Des p’tits malins se sont amusés à appeler le numéro qui apparaît à la fin de la pub. Forcément, l’équipe de Better Call Saul avait prévu le coup et fait installer un répondeur automatique, que vous pouvez écouter par ici. À noter qu’avec d’autres numéros laissés par la série, il est aussi possible d’appeler Jimmy ou Nacho.

 

Qui va devoir tuer Mike ? Nacho est-il envoyé par Tuco ? Jimmy va-t-il se faire virer ? Toutes les réponses, la semaine prochaine !

L'auteur

Commentaires

Avatar CaptainFreeFrag
CaptainFreeFrag
"J’ai aimé : [...] Le méta de l’épisode." Ce moment où tu sais que c'est Koss qui a écrit la critique avant même de scroller jusqu'au bas de page.

Avatar Koss
Koss
Héhé :) Franchement, entre le film de sous-marin, Arabesque et la publicité, je me suis régalé.

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