Souvenez-vous : Game of Thrones a été une mauvaise série. Mais ça, c'était avant. Bienvenue dans la renaissance de Game of Thrones.
Sublimer l'Aftermath
C'est Wikipédia qui le dit : « Aftermath est un mot anglais signifiant « suites, répercussions », pour désigner les conséquences d'une catastrophe. Il est fréquemment utilisé dans des titres d'œuvres artistiques. »
L'Aftermath, donc, est sans doute l'un des types d'épisode les plus difficiles à écrire. Il suffit juste de regarder la tête des épisodes 10 de cette série. C'est, en effet, plutôt facile de montrer les conséquences d'un évènement tragique en nous soulignant les aspects les plus prévisibles ; ça l'est beaucoup moins d'en tirer parti pour faire évoluer les personnage. Qu'est-ce que je m'attendais donc à voir dans cet épisode ?
- Cersei triste : Check.
- Jaime triste, mais ça-va-en-fait : Check.
- Stannis qui réagit : Check.
- Tyrion qui se demande ce qui lui est arrivé : Check.
- Les Tyrells qui font la fête au Champomy : Check.
Tout cela, bien sûr, on l'a. Dans de multiples scènes. Sauf qu'à chaque fois, il y a un petit plus. Le bonus track de fin d'album qui fait plaisir :
- Cersei est triste, mais subit l'affront de son père et de son frère.
- Jaime est triste, mais montre qu'il n'a décidément rien du chevalier au grand cœur que certains se plaisent à voir en lui.
- Stannis réagit, mais c'est son plus proche conseiller qui trouve la solution et qui annonce la fin de saison pour le clan de la Sorcière Rouge.
- Tyrion se demande ce qui lui est arrivé, mais se prépare déjà à rebondir.
- Les Tyrells font la fête au Champomy sans qu'on sache vraiment s'ils étaient les vrais commanditaires du meurtre du Roi. À ce titre, le double langage de leur dialogue est parfaitement utilisé.
Chaque scène nous montre de l'inédit et creuse davantage la psychologie des personnages. En évitant la redondance et le prévisible, l'épisode sublime son simple matériel de base et transforme l'épisode en bien autre chose. Quelque chose de plus excitant.
Sublimer Tywin
Dans le monde de Westeros, personne n'est vraiment heureux.
Sam n'est pas heureux. Il a ramené Gilly en sécurité derrière les murs de Chateaunoir mais il reste bloqué par sa propre fonction. Cersei n'est pas heureuse. Elle a sans doute fait tout ce qui était possible pour plaire à son père et elle a perdu deux de ses enfants (remember Myrcella). Jaime n'est pas heureux : il est amoureux de sa sœur, à en commettre l'irréparable. Ayra n'est pas heureuse : son compagnon de route est une brute et elle ne va pas tarder à devenir sans cœur à son tour. Petyr Baelish n'est pas heureux. Il a de l'argent, du pouvoir, la fille de la femme dont il était amoureux, mais toujours pas de titre. Podrick n'est pas heureux. Lui, il a un titre et de l'argent mais a perdu un ami (dans une scène d'adieu vraiment émouvante).
Dans le monde de Game of Thrones, tout le monde cherche ce qu'un autre possède.
Sauf Tywin Lannister.
Tywin Lannister a tout : de la fortune, du pouvoir, des enfants puissants et un héritier. Le personnage m'a toujours fasciné. J'ai toujours l'impression assez diffuse que c'était lui qui contrôlait le jeu des Trônes (impression erronée à mon avis). L'épisode confirme qu'il dispose d'un bon paquet d'informations qu'il n'était pas censé connaître. On ne sait pas vraiment ce qui anime Tywin Lannister. Dans les livres, il n'est pas un personnage "point de vue". On ne connait ainsi jamais le fond de sa pensée. Aimait-il son petit-fils ? Trouvait-il sa folie pratique ou encombrante ? Il désapprouve la mort de Ned Stark, mais ne fait jamais rien pour cadrer Joeffrey. La seule ligne qu'il suit, c'est celle de la préservation de sa famille. À ce titre, il s'avère être un très bon pratiquant de la realpolitik.
Le traitement de la politique, justement, est le plus gros reproche que je puisse faire à cette série. Game of Thrones (comme House of Cards) donne l'apparence de traiter de politique. Il n'en est rien. Elle montre au contraire son aspect le plus spectaculaire : trahisons, assassinats, murmures et complots. Pas plus que Franck Underwood ne prend de décisions, on n'a jamais vu un Lannister prendre une décision politique, depuis le début du show. Ce sont des personnages qui règnent sans jamais rien décider. Si tout le monde se met à interpréter l'aspect politique du show à sa sauce, c'est précisément parce que cet aspect n'existe pas. C'est juste une putain de transposition de la guerre des Deux-Roses. Avec des dragons.
De ce point de vue, la première saison de Game of Throne était une réussite. Au-delà des intrigues, elle parvenait à traiter de la question de la difficulté de la pratique du pouvoir par Ned Stark. C'était intéressant, c'était finement écrit et c'était globalement réussi. C'était même tellement réussi que les showrunnersont avaient décidé, dès la saison 2, de sortir cette thématique du show... Jusqu'à aujourd'hui. La scène de discussion sur la sagesse entre un Tommen parlant et un Tywin discourant ne dure pas très longtemps. Cinq minutes tout au plus. Ce sont ces cinq minutes qui redonnent à la série un peu de couleur. Exactement la couleur qui lui manquait pour redevenir une grande série. L'espoir renaît...
Parvenant à briser les chaînes de sa condition pré-déterminée, ce « Breaker of Chains » renoue avec ce qui a toujours été le mieux réussi dans le show : la question du pouvoir, le péplum et l'émotion. Pourvu que cela dure.
J'ai aimé :
- Tout le monde est coupable et personne ne l'est vraiment.
- Arya et Clegane : la petite sitcom de GOT qui donne de la consistance à Westeros.
- L'émotion ressenti à chaque apparition de Ser Davos. Encore une très belle scène de lecture.
- La transition « fesse ». Monteur de GOT, tu sais où me contacter.
- Les cinq dernière minutes du péplum final. De grande classe.
Je n'ai pas aimé :
- La scène de viol de Cersei. Ultra gênante. Et c'est peu dire.
- La mollesse des scènes de Sam.
- C'était quand même – en fin de compte – un épisode très aftermath.
Ma note : 15/20
Bonus :