Dans Boardwalk Empire, j'aime non seulement lorsque les épisodes se concentrent sur un ou deux personnages, mais j'aime également lorsque l'épisode dans son entier parle d'un thème en sous-texte des différentes intrigues. Et c'est le cas de cet épisode, qui permet d'explorer la violence chez les personnages, qu'elle soit implicite ou non.
La violence comme souvenir
Cette violence, c'est celle qui s'exprime chez Richard Harrow, que l'on revoit enfin après quelques épisodes d'absence. Chez lui, la violence est principalement contenue, cachée, comme si son masque lui facilitait la tâche, malgré lui. La violence, dans cet épisode, il en est surtout témoin à travers une bagarre dans un bar, dont un des combattants lui rappelle en quelque sorte Jimmy. Pas directement, l'homme n'ayant pas grand chose à voir avec son ancien ami et frère d'armes, mais à travers un médaillon que Richard vient rendre le lendemain. Une référence à la guerre est ainsi faite lorsque Richard lui cite un diction. Un peu plus tard dans l'épisode, cela l'amènera d'ailleurs à regarder d'anciennes photos de Jimmy, dans une scène courte mais assez émouvante. Cette fois-ci à visage découvert, comme s'il voulait symboliquement ne rien lui cacher.
Mais Richard n'est pas la seule personne qui souffre de l'absence de Jimmy. C'est également le cas de Gillian, dont on avait entrevu le deuil difficile lors de l'épisode précédent. Il est d'ailleurs dommage que la plupart des scènes la concernant jusqu'alors se soient déroulées dans sa maison close (qui n'est pas très passionnante), ou encore qu'elle ne soit plus du tout en relation avec Richard ou le fils de Jimmy une fois passé le premier épisode de cette saison. Clairement, les scénaristes auraient pu faire quelque chose de beaucoup plus intéressant du personnage.
Néanmoins, cet épisode lui redonne un peu de valeur avec sa manière très particulière de faire le deuil de son fils. En effet, après avoir rangé tous les portraits de son fils et où l'on se dit qu'elle a franchi une étape importante, elle se met à accoster un homme qui ressemble comme deux gouttes d'eau à Jimmy puis couche avec lui. Le deuil de son fils passe donc par une sorte d'inceste symbolique, seul moyen qu'a trouvé Gillian pour accepter sa mort. Elle se met même à l'appeler James. Difficile de dire ce que va devenir ce personnage, mais il est probable que la maison close restera d'actualité car c'est le seul lieu pouvant reconnecter son intrigue au reste des personnages, d'autant plus qu'il s'agit de l'héritage de Jimmy.
La violence comme héritage
Un autre type de violence se fait également sentir au sein du foyer Thompson. Plus discrète, mais aussi plus inquiétante, elle semble cette fois-ci découler du changement de comportement de Nucky, qui est devenu depuis ce début de saison un gangster à part entière. Le fils de Margaret, malgré son innoncence concernant l'incendie, transporte avec lui une violence latente. Il garde un couteau au cas où «le vagabond reviendrait». Si son but premier est de rassurer sa soeur, sa santé psychologique est beaucoup plus inquiétante et on peut se demander si la présence fréquente d'Owen n'y est pas pour quelque chose.
Cette violence transparaît aussi chez Margaret, de façon différente. Elle ne sait pas trop comment réagir face au délit dont son fils est accusé, puis finit par lui donner une fessée. Mais on sent qu'elle se force presque, et la douleur physique qu'elle inflige est finalement à peu près la même que la douleur morale qu'elle ressent. Cette douleur à l'idée de frapper son enfant va devenir culpabilité quand elle apprendra par Owen que son fils était innoncent et que donc elle l'avait puni à tort. Vers la fin de l'épisode, après avoir entendu du bruit dans la serre, elle ira même jusqu'à prendre un fusil pour s'y aventurer, en ayant du coup presque la même réaction que son fils.
Une intrigue mafieuse confuse
Paradoxalement, la violence chez les mafieux est beaucoup plus implicite, et fonctionne davantage via les menaces avant de parfois exploser d'un seul coup. Malheureusement, ce n'est pas le cas dans cet épisode et les relations entre mafia, politique et police, avec Nucky au centre, restent ici plutôt calmes. Pire, je les trouve même assez ennuyeuses, même si la mise en scène est toujours impeccable et les dialogues classieux.
Le meilleur exemple en est Gaston Bullock Means, nouveau personnage de cette saison, qui franchement n'a pas apporté grand chose pour le moment. J'aurais largement préféré qu'on se concentre sur le quatuor Nucky/Luciano/Rothstein/Rosetti, tellement ces personnages ont un charisme impressionnant et sont intéressants. Sans parler bien sûr d'Al Capone qu'on n'a pas vu depuis deux épisodes -il est vrai qu'il est assez déconnecté du reste pour le moment. Au lieu de ça, on nous ressort Remus et Harry Daugherty, qui ne sont certes pas dénués d'intérêt mais qui apparaissent une fois tous les trois épisodes (voire plus pour certains). Difficile dans ces conditions de construire une intrigue qui ne soit pas un confuse.
En fait, dans ce monde d'hommes, seuls les quelques personnages féminins apportent la fraîcheur nécessaire aux intrigues mafieuses. Dans cet épisode, il s'agit d'Esther, qu'on n'avait pas revue depuis sa confrontation avec Van Halden pour coincer Nucky dans la saison précédente. Et de Billie, qu'on voit peu dans ce sixième épisode, mais qui me donne l'intuition qu'elle peut mettre Nucky en danger dans ses relations avec les autres gangsters, comme en témoigne l'appel téléphonique de Means à Billie.
Du côté d'Esther, si la ficelle scénaristique pour qu'elle croise le chemin de Nucky est un peu grosse, la confrontation entre les deux se révèle assez savoureuse. D'abord déterminée à lui donner une peine de prison conséquente, elle accepte ensuite l'invitation à dîner de Nucky qui la convainc de s'en prendre à Harry plutôt qu'à lui. Cela pourrait donner quelque chose d'intéressant si cette relation donnait suite dans les épisodes suivants. En tout cas, il va falloir que les scénaristes démêlent toutes leurs intrigues car ça commence un peu à surchauffer.
J'ai aimé :
- Certains passages avec Richard et Gillian
- Le thème sous-jacent de la violence
- L'ensemble qui respire toujours autant la classe
Je n'ai pas aimé :
- Une intrigue mafieuse qui décidément ne passionne pas dès que Gyp n'est pas dans les parages
- Peu de scènes marquantes
Ma note : 13/20. Cet épisode ne comporte pas de grandes scènes et souffre d'une intrigue mafieuse un peu mollassonne, néanmoins l'ombre de Jimmy se fait davantage sentir et cela donne souvent de bonnes choses dans la série.