Souvenez-vous : Game of Thrones a été une bonne série. Mais ça, c'était avant. Bienvenue dans cet épisode complètement dispensable de Game Of Thrones (les fans appellent ça « un épisode de transition »)
Ami lecteur, sache que, cette semaine, je suis content. Cette semaine, c'est le retour du Game of Thrones que j'aime : celui qui est tout nul et qui ne sert à rien.
La question d'une adaptation
Cet épisode est en effet extrêmement chiant et je crois que cela tient en une chose : les personnages de cette série n'évoluent pas / plus. Tyrion est le même Tyrion depuis la saison 2. Jaime nous a montré son double visage dans l'épisode 3 et dans son monologue du bain en saison 3. Daenerys n'a plus rien à nous apprendre et Jon Snow n'a pas bougé d'un iota depuis le pilot. On connaît tous ces personnages. On sait exactement quelle va être leur réaction face à tel ou tel événement. Aucun de ces personnages ne subit d'évolution « interne ». Chaque changement de caractère de leur part est dû à des événements extérieurs. Mieux encore, ils sont bombardés, mis face à des situations qui les dépassent, pour les forcer à réagir. C'est Joffrey qui meurt. C'est Tyrion qui va en prison. C'est Sansa qui va se marier pour la troisième fois.
Tout cela est complètement artificiel et souligne en creux l'impression ténue qu'on a bel et bien fait le tour des personnages au bout de quatre saisons. J'en apprenais encore sur Claire et David en saison 4 de Six Feet Under. Jesse continuait de se révéler en saison 4 de Breaking Bad et McNulty continuait de me surprendre après quatre saisons de The Wire. Dans Game of Thrones, rien ne bouge et les personnages n'évoluent plus. C'est une pièce de théâtre où l'acte 1 serait quasi-infini.
Cette série, sous ses aspects assez racoleurs, est en fait une série très conservatrice dans sa forme. La mise en scène y est classique, confiée à des « yes-men » capable de rendre strictement tous la même copie. Le show ne prend jamais de risques, se contentant de rendre une copie propre, une copie très fidèle au livre. Incapable de briser le carcan d'où elle est issue (le livre), la série cherche constamment à maintenir l'attention du spectateur de la manière la plus putassière possible : avec du sexe et du sang.
C'est tout le problème de la question d'une adaptation réussie. Tu fais une œuvre reprenant à l'identique les codes de ton matériel d'origine (« Watchmen » de Zach Snyder adapté du comics d'Alan Moore) et on te reproche ton manque d'idées. Tu reprends une œuvre à ton compte cherchant à obtenir autre chose ( « La ligue des Gentlemans Extraordinaires » de Stephen Norrington adapté d'un autre comics d'Alan Moore) et on te reproche la trahison de l’œuvre d'origine. Game of Thrones étant devenu un objet de pop-culture extrêmement populaire, HBO n'a pas modifié sa recette lorsqu'ils ont vu que le show marchait. C'est l'option la moins risquée : celle qui ne fait pas de vagues. Et, je crois que c'est une erreur.
« It's not TV, it's HBO »
La chaîne du câble américain Home Box Office a sans aucun doute marqué un tournant dans l'histoire des séries en proposant une nouvelle vision de ce que pouvait être une série télé (cf leur célèbre slogan : « It's not TV, it's HBO »). Rétrospectivement, on peut dire qu'ils ont respecté cette part du contrat avec des séries comme : Oz, Band of Brothers, The Wire , Les Sopranos, Six Feet Under, Rome, les Contes de la Cryptes, etc.
A chaque fois, c'était des séries innovantes qui proposaient des choses vues nulle part ailleurs. Ce n'est pas le cas dans Game of Thrones. Les combats ont plus de souffle épique dans Spartacus. Les personnages sont plus fouillés dans Vikings ou dans Rome. La seule différence avec ces séries, c'est l'argent mis sur la table pour le Jeu des Trônes. La scène de Jon et de Bran l'illustre : quand le show prend des risques, c'est pour quoi ? Pour montrer une nouvelle fois deux personnages qui manquent de se croiser (cette scène n'est pas dans le bouquin). C'est vraiment le maximum de risques que tu es prêt à prendre, Game of Thrones ? C'est ça, ton petit quart d'heure de folie ?
Aujourd'hui, HBO est concurrencé de partout : par AMC qui reprend les show qu'HBO refuse pour en faire des cartons (Breaking Bad), par Netflix et son House of Cards pourtant médiocre et demain, par Yahoo et Microsoft qui ont annoncé leur volonté de produire des séries. On a annoncé à de (trop) nombreuses reprises la chute de la chaine (à la fin de The Wire, à la fin des Sopranos, etc.) et sa « quality TV ». Cela n'est jamais arrivé. Dans un marché ultra-confidentiel, HBO est désormais obligé de faire du consensuel afin d'attirer le chaland. Cette stratégie à court terme commence cette saison à montrer ses limites et laisse apparaître à travers sa violence et son clinquant, l'impression de plus en plus forte que la série n'a plus rien à dire.
J'avoue que je ne sais plus trop quoi penser avec cette série. Est-on a un tournant de son existence où elle va enfin se détacher du livre (comme les derniers plans de l'épisode précédent le laissait croire) ? La série va-t-elle finir par nous proposer autre chose qu'un zapping constant entre ces différents personnages ? Reverra-t-on un jour Sir Bondisseur ? Je continue de croire, malgré tout, que le show peut être plus qu'un « simple divertissement ». Come on !
J'ai aimé :
- « Do you think I'm easily chocked ? ». Cersei et Margeris sur un même pied d'égalité dans un plan américain sublime.
- La révélation sur Jonn Arryn, crédible quoique grossièrement amenée.
Je n'ai pas aimé :
- L'originalité totale de storyline de Daenerys : une ascension vertigineuse et une chute qui s'annonce rude. Personnages non-stéréotypés qu'ils disent...
- La violence encore et toujours gratuite de la série. Cette semaine les enfants, hop un p'tit coup d'épée dans un crâne !
- Jon Snow, ce personnage de sous-leader en toc.
Ma note : 11/20.
Bonus :
Les vrais savent.