Critique : Game of Thrones 4.07

Le 20 mai 2014 à 14:20  |  ~ 10 minutes de lecture
Et « Game of Thrones » devint « The Tyrion Lannister's show ».
Par Koss

Critique : Game of Thrones 4.07

~ 10 minutes de lecture
Et « Game of Thrones » devint « The Tyrion Lannister's show ».
Par Koss

Chaque série possède cette ligne fragile qu'il faut veiller à ne pas franchir. Un auteur américain a même inventé un terme pour ça, c'est le célèbre : « Jump The Shark ». Pour les trois du fond qui ne suivent pas, cette expression est tirée de la célèbre sitcom Happy Days où, à force d'épisodes et de saisons, la série était arrivée à court d'idées. Dans le second épisode de sa cinquième saison, le personnage de Fonzy décide, dans un défi, de sauter par-dessus un requin en ski-nautique. Beaucoup de spectateurs ont alors considéré que la série avait atteint le point de non-retour en terme de crédibilité. Depuis, le terme a été généralisé pour les séries où chacun guette le moment où sa série préférée va « Jump the Shark » (en oubliant que Happy Days a encore duré six saisons après le dit-épisode).

 

Un moment comme cela peut être multi-forme : un avion qui s'écrase sur Wisteria Lane, une prise d'otage pendant un accouchement dans Grey's Anatomy, David Duchovny qui arrête The X-Files, Walter White qui décide de cuisiner de la meth', etc. Dans les sitcoms, cet aspect des choses prend un tour tout particulier. Je crois que le moment « JTS » de la grande majorité des sitcoms, c'est que le trait de caractère d'un personnage emblématique du show est de plus en plus exagérée. Souvent, c'est le personnage dont le trait comique est le plus efficace. Si How i met your mother a beaucoup diminué en qualité après la saison 4, c'est aussi parce que les scénaristes ont de plus en plus basé tous leur gags sur le personnage de Barney. Le risque est exactement le même avec le personnage de Sheldon dans The Big Bang Theory, qui a frôlé plusieurs fois la ligne rouge.

 

 

Sansa in the snow

 

 

Alors, quel rapport avec Game of Thrones ? Le rapport est que la série a depuis le début été portée par des personnages forts, complexes et intéressants. Au premier rang de ceux-là, on trouve le plus célèbre d'entre tous : Tyrion Lannister.

 

 

Pas Tyrion </3

 

 

J'ai toujours pensé que le moment où la série ne se reposerait plus que sur les épaules de Tyrion serait le moment de son déclin. Pour moi, ce moment est arrivé. Précisément dans cet épisode-là. Oui, celui que vous venez de voir. Parce qu'en vérité, il y a un sacré paquet de trucs qui partent en sucette :

 

 

1) Les dialogues :

 

La première scène entre Arya et The Hound est particulièrement savoureuse sur ce point. Je vous laisse savourer en VF (c'est toujours plus drôle en VF) :

 

 

Arya : Rien ne peut être pire que cela.

L'homme qui agonise : Peut-être que rien ne l'est.

Arya : Rien n'est mieux, ni pire que quoi que ce soit, Rien, c'est juste rien.

 

[…]

 

The Hound (en tuant l'homme) : C'est là qu'est le cœur.

 

Génie. Il n'y a pas d'autres mots. C'est fabuleux, fantastique et Jean-Claude Vandamesque à souhait. J'en ai pleuré de rire. Comme jamais avec cette série. Si je ne savais pas que cette série était tirée d'un roman, je ne l'aurais jamais cru. Les yeux fermés, on dirait les dialogues de « Double Dragon ». Avec moins de baston.

 

 

Arya in the moutain

 

Le plus dramatique avec cette scène, c'est qu'elle aurait dû donner le ton de l'épisode. Passée la scène d'aftermath de l'épisode précédent entre Jaime et Tyrion, c'est cette scène qui ouvre l'épisode. « Why go on living in a world of such unending misery, and why keep watching a show that is so relentlessly bleak ? » demande Arya. Ce qui intéressant avec l'arc d'Arya, c'est de montrer les conséquences du chaos de la guerre provoquée par LittleFinger sur les hommes. On aborde ici une thématique commune à la fois à The Wire et à The Walking Dead : Comment se recontruire alors que tout espoir est perdu et que le monde est peuplé de « monstres » ?

 

Sauf que cette scène est complètement noyée dans un emballage nanard de mauvais dialogues et de situations qui bégayent. Encore une fois Game of Thrones, tu avais du bon matériel que tu as préféré gâcher pour faire du sang.

 

 

2) L'absence d'investissement sur de plus en plus de personnages :

 

C'est la règle numéro 1 d'un bon scénario : pour continuer à suivre un show, il faut s'attacher aux personnages. Et pour s'attacher aux personnages, il faut qu'ils évoluent. J'ai déjà abordé ce problème dans une précédente critique, mais là, ils poussent le curseur encore plus loin. Le nombre de scènes « inutiles » atteint ici un nombre assez critique. On ne savait pas déjà qu'Arya devenait de plus en plus psychopathe ? Que Jon Snow était brimé par ses supérieurs, comme Harry Potter face au Ministère de la magie quand il tente de les prévenir de l'arrivée de Voldemort ? Que Daenerys avait du mal à prendre des décisions politiques (même si à la limite, la scène apporte un peu plus) ? Qu'Arya devenait encore plus psychopathe (oui, c'est la double peine dans cet épisode) ? Et que Mélissandre avait des seins ?

À force ça lasse. À force d'avoir vu la X-ième scène de répétition inutile de la série, le spectateur se lasse. Sur ce point, cet épisode n'est pas pire que les précédents. C'est juste celui de trop ; l'épisode qui fait déborder le vase. Le pire, c'est je commence même à me détacher complètement de personnages pour lequel j'avais beaucoup d'affection et d'intérêt (Arya au hasard). En choisissant cette voie classique du « Wait and see before something big is about to happen », la série prend le risque de perdre son spectateur en chemin. C'est ce qui est en train de m'arriver et je le regrette.

 

 

Tyrion <3

 

 

Seules restent les scènes de Tyrion qui illuminent tout : la scène de séparation (qui fait écho à celle avec Podrick) avec un Bronn honnête jusqu'au bout, la scène avec Jaime et surtout celle avec Oberyn Martell, parfaitement portée par la musique qui fait quasiment tout.

Alors, pourquoi cela ? Pourquoi ces scènes fonctionnent quand tout le reste marche moins / ne marche plus ? Qu'est-ce qu'il y a de différent ?

 

Tyrion in jail

 

 

J'y vois trois raisons :

 

  1. L'acteur. C'est peu dire que Dinklage est bon. Ce mec, tu lui fais jouer un porte-manteau, il arriverait quand même à te faire pleurer. Ce n'est pas le seul très bon acteur du show (on parle quand même d'une série avec Liam Cunningham, Dianna Rigg et Charles Dance), mais c'est probablement LA révélation de la série : presque personne ne le connaissait avant ; maintenant, c'est une star.

  2. Le contexte. Même dans une saison où Tyrion est davantage en retrait (comme la saison 3), il se passe quand même des trucs. Regarder Tyrion évoluer, c'est la garantie de regarder une série où il se passe des trucs et où il y a des rebondissements. Regarder Tyrion, c'est se souvenir de ce qu'a été la série.

  3. La psychologie du personnage. Il y a deux critiques de cela, j'ai dit que ce personnage n'évoluait pas. Je re-précise ce que je voulais dire : il n'évolue que par des facteurs externes. Et comme le nombre de choses qui lui arrivent est élevé, le personnage évolue. Tyrion est formaté à être « le nain », un rôle dont il essaye de s'émanciper en saison 1 (il ne peut pas rechercher la prouesse physique et va dans les arts intellectuels) et contre lequel il s'est rebellé en saison 2. Dans cette dernière, on voit (dans la bataille de la Néra notamment) qu'il peut faire preuve d'un courage qui le fait exceller dans les deux catégories. Sauf que tous ses espoirs sont réduits à néant en saison 3. De ce fait, il redevient le nain, non pas le nain qui n'est pas chevalier à cause d'une infirmité physique, mais le nain social, l'autre, le monstre de foire. Ce début de la saison 4, c'est une série de provocations et de menaces contre lui en soulignant qu'il est un nain et il ne fait rien contre (le discours de Shae au procès). Malgré tous ses efforts et son intelligence, Tyrion ne sort pas de sa condition sociale. Il reste exactement le même enfant décrit par Oberyn : celui qui accepte d'être un « monstre ».

 

 

 

Décidément, la pause de deux semaines que prend la série va faire du bien à tout le monde. Surtout à moi. Vivement que ça défouraille dans la neige. Oui, vivement...

 

 

J'ai aimé :

 

  •  Sansa et la liberté. Sansa arrive sous la neige dans la cour des Eyrié. En un travelling avant, on comprend tout : la sensation d'être libre pour la première fois depuis la saison 1 et le rappel de son enfance. Exactement le genre de scènes qui manquent à la série.
  •  Le retour de Hot Pie, personnage dont la séparation avec Arya m'avait ému. Content de le revoir ici en guest-star culinaire.

 

 

Je n'ai pas aimé :

 

  •  Le non clif' de fin: « Oh mon dieu, Lydia meurt ! JE NE L'AVAIS PAS DU TOUT DEVINE DEPUIS TROIS EPISODES ! » No. Comment.
  •  Le théâtre de boulevard de Game of Thrones : Petyr et Sansa s'embrassent tout pile au moment où Lisa passait par là. Comme ça, par le plus grand des hasards. Sors de ce corps Jean Lefebvre !
  •  Le générique de la série qui ne change pas. La scène la plus importante de l'épisode se passe aux Eyrié... qui n’apparaît pas dans le générique. C'était déjà le cas il y a deux épisodes.

 

 

Ma note : 09/20.

 

 

Merci infiniment à Benjamin Brunet pour sa co-écriture du paragraphe sur Tyrion et pour ses conseils, précieux.

 

 

Bonus :

 

 

L'auteur

Commentaires

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Galax
@Maxou > Bien évidemment il passera à côté de perles mais s'il demande nos avis pour la Saison 8 c'est qu'il a peut-être pas envie de se farcir une centaine d'épisodes en 3 mois, ce qui est compréhensible. Et Doctor Who c'est pensé à 90% du temps pour qu'on puisse prendre à n'importe quel moment (sauf la Saison 6). Il a intérêt à vite voir le reste si ça lui plait par contre ;)

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Et bin s'il veut connaître ton VRAI avis, tu lui dis de tout regarder depuis 2005 et pi c'est tout !!! (Non, je ne suis pas un extrémiste, je ne lui demandes pas de regarder depuis 1963... ^^)

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En plus, l'intrigue de Moffatt a démarré dans la saison 4 (River dans la bibliothèque) donc en plus, il raterai une partie de l'histoire actuelle... A moins qu'il ne démarre de la saison 8 mais je ne sais pas si toutes les intrigues lancées ont été résolues dans la saison 7... (ne pas me répondre à cette question, merci d'avance !)

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dewey
Je suis de l'avis de Maxou sur ce coup. Et pas pour qu'une question de perles, mais de compréhension globale et de vécu de l'oeuvre. Certes, The Eleventh Hour (le premiere de la saison 5) est un point de départ comme un autre vu qu'il ouvre une toute nouvelle ère dans la série, mais il ne réexplique aucunement les règles et le background de la série (à la rigueur le fonctionnement du TARDIS, mais la saison 5 ne reviendra pas sur les Time Lords, la Time War, les ennemis déjà apparus dans les précédentes saisons, ... tout ça ne sera pas réintroduit ni réexpliqué, la série considérant, à raison pour ceux qui suivent dans l'ordre, que ça à déjà été fait auparavant. Et mis bout à bout, ça fait un paquet de trucs. Le seul moyen d'avoir toutes ces expliquations, c'est la saison 1, qu'on l'aime ou non (et après tout, rien ne garanti qu'il ne va pas l'aimer. La saison 1 à aussi, comme toutes les autres, ses grands moments et ses grands épisodes). Elle a au moins le mérite de réintroduire le show à merveille, et de rendre la série limpide même pour ceux qui ne connaissent pas l'ancienne série). Après, peut être que le premiere de la saison 8 sera une introduction du même acabit après tout, j'en sais rien. Mais j'en doute quand même pas mal. D'une part, parce que comme l'as dit Koss, c'est le même showrunner, Steven Moffat, à la tête de la série depuis la saison 5 qui est toujours au commandes. Il réutilisera certainement quelques détails de son run, voir même de celui de RTD, sur quelques plans, aussi minimes (ou très importants) puissent-ils être. Et puis, en commençant par la saison 8, BadJokes arrivera en plein milieu d'un run de compagnon. En effet, "Rose" (le pilote) introduit une nouvelle compagne qu'on découvre au cours de cet épisode, pareil pour "The Eleventh Hour". Le premiere de la saison 8 ne fera pas cela, puisqu'on à Clara qui est là depuis un certain temps, et je ne pense pas qu'on va revenir des masses sur ce qui s'est passé en saison 7 de son côté. Aussi, un autre point qui pourrait faire mal, c'est que s'il commence par la saison 8, il y a de fortes chances, vu la fin de la saison 7 (restons vagues pour Maxou ^^), qu'il se spoile rétroactivement un gros détail de l'ère RTD (Saisons 1 à 4), qui risque certainement de lui pourrir un peu le visionnage quand il décidera d'y revenir. Parce que les chances qu'on réévoque pleins de points de ces dernières sont quand même fortes. Ce que je viens de dire s'applique d'ailleurs aussi s'il voit la fin de la saison 7 avant les 4 premières saisons. Donc non, pour moi, il devrait commencer de la première saison. Vraiment.

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MembreSupprime2
OMG ! Dewey, c'était parfait ! Merci ! :)

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bedsouin
La critique est bonne et beaucoup moins caricaturale que celle du premier épisode. Après tout, on a le droit de passer à côté des choses, perso ça m'arrive pour 90% des séries que j'aborde parce que le départ moyennement convaincant combiné à ma flemme finissent par me convaincre de ne pas me taper les looooongues saisons qui suivent. En revanche j'ai du mal avec les comparaisons et les listes de séries "meilleures". Il faudrait veiller à comparer ce qui est comparable. Le point commun est certes le format série, mais ensuite dans vos longues listes, je ne vois pas tellement d'autre point commun. Et si on tient à tout prix à comparer par rapport au niveau d'emballement et "impression de qualité", ça relève totalement des goûts. D'ailleurs, tout ce qui est évoqué ici (critique + commentaires) relève des goûts perso. Notamment en ce qui concerne la mise en scène de GoT, que je trouve personnellement irréprochable. Personnellement dans ce qui est plus ou moins récent, je ne relève que deux séries qui parviennent à me convaincre totalement à tous les niveaux : Got et Mad Men. On est loin des 30, et je n'y arriverais probablement jamais. ET beaucoup s'offusqueraient de cette courte liste, à commencer par Koss qui serait en désaccord avec au moins la moitié de la liste ^^ Bref, je reviens sur mon début : mauvaise critique, mais très bon avis.

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Koss
@Bedsouin : - "on a le droit de passer à côté des choses," => Et je passe à coté de quoi, en l'espèce ? - "j'ai du mal avec les comparaisons et les listes de séries "meilleures"" => L'intégralité du site sur lequel tu as posté ce commentaire est basé sur ce principe. :D Mais oui, je suis d'accord sinon. Je l'ai fait juste pour répondre qu célèbre : "T'façon, ya rien à la hauteur de GOT en ce moment". Ce qui est faux. - "Notamment en ce qui concerne la mise en scène de GoT, que je trouve personnellement irréprochable." => C'est une mise en scène ULTRA classique. Ya pas plus classique que ça. C'est pareillement mis en scène que The Good Wife, Rome, Desperate Housewives, etc. La réalisation de GOT n'a rien qui sort de l'ordinaire. - "D'ailleurs, tout ce qui est évoqué ici (critique + commentaires) relève des goûts perso. " => Tout relève des gouts persos. Tout est subjectif. Ya jamais rien d'objectif dans ce que j'écris, dans ce que tout le monde écrit. L'objectivité, ça n'existe pas. Du coup, je ne comprends pas ça : "mauvaise critique, mais très bon avis. ". Qu'est ce que tu voulais dire ? :)

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