Ce cinquième épisode pose problème. Il pose problème, car d'un côté il est composé de moments forts assez sympas (je reviendrai dessus au fur et à mesure de cette critique), mais en même temps, il souffre d'un certain nombre de défauts qui peuvent laisser un goût amer en bouche. Retour sur les forces et faiblesses d’un épisode mal-aimé.

Une transition difficile

Je dirais que l'un des principaux défauts de cet épisode, c'est qu'il sert de transition entre la première partie de cette saison, davantage concentrée sur le retour de Daenerys à Westeros et ses premières batailles avec l'armée des Lannister, et sa seconde partie qui, on le devine, sera davantage axée sur les marcheurs blancs.

Les lendemains de fête sont toujours un peu difficiles...

Soyons honnêtes : ce cinquième épisode souffre pas mal de son manque d'action et de scènes épiques. D'autant plus qu'il se situe à un moment dans la saison où nous venons d'assister à une succession d'affrontements, pas toujours réussis, mais qui à chaque fois avaient le don de dynamiser le récit. Puis bon, il faut avouer qu'il était quand même très difficile de venir se placer après le barbecue géant organisé par Dany et son poto Drogon, ce dernier ayant offert un véritable spectacle aux fans.

Dans tous les cas, suite à ces affrontements successifs qui ont ponctué cette septième saison, il était quasiment certain que les scénaristes allaient temporiser le récit au bout d'un moment. C'est chose faite avec cet épisode, beaucoup plus calme et moins intense que les précédents, et dont la principale utilité est d'organiser des retrouvailles et des alliances en tout genre, histoire de préparer la suite des hostilités.

Un épisode bourré de défauts...

Deuxième défaut de cet épisode, et qui concerne cette saison en général : les scénaristes sont en totale roue libre. Ils savent qu'il ne leur reste plus que quelques épisodes pour atteindre l'ensemble de leurs objectifs et du coup, ils dégainent toutes leurs cartouches les unes après les autres, sans aucune subtilité, ni nuance.

Quand je regarde cette saison, j'imagine souvent David Benioff et D. B. Weiss (aka Chapi et Chapô) une checklist à la main, en train de se dire "Bon OK, nous n'avons plus que treize épisodes. Il faut qu'on arrive à caser ça, ça, ça... Ah oui, il faut aussi caser ça, puis ça... Surtout pas oublier ça". En soi, aucun souci avec ce principe (après tout, je préfère nettement qu'ils aient une idée de là où ils veulent aller précisément), mais le problème c'est le fait que ça se ressente dans la narration. Chaque épisode depuis le début de cette saison me donne l'impression de répondre à un cahier des charges et certaines situations, pourtant très importantes, finissent par paraître forcées ou bâclées. Je pense notamment aux retrouvailles des Stark, ou bien encore aux batailles de Castral Roc et de Hautjardin.

Ce cinquième épisode ne déroge pas à la règle et je dirais même qu'il a tendance à l'amplifier davantage. De la révélation de Gilly concernant les parents de Jon et qui est passée complétement inaperçue, à l'annonce de la grossesse de Cersei, en passant par les retrouvailles entre Jorah et Daenerys, ou bien celles entre Tyrion et Jaime, les scénaristes alignent les scènes fortes les unes à la suite des autres, mais sans jamais les approfondir réellement. Peu importe le manque d'émotion, ce ne sont que des choses de plus qu'ils ont réussi à caser sur leur très grosse checklist.

Voilà une tête qui en dit long...

Le souci, c'est que certains de ces moments forts étaient aussi très attendus par les fans. Je pense notamment aux retrouvailles entre Jaime et Tyrion qui, dans ma tête, ne se résumaient pas à un petit tête-à-tête tendu de deux minutes. Certains diront que les scénaristes ont pris le contrepied de ce que les fans attendaient ou qu'il était inutile de s'étaler davantage là-dessus, et que c'est pas plus mal comme ça. Personnellement, je continue de penser que ce moment aurait mérité d'être amené avec davantage de subtilité et de nuance. Bref, c'est chose faite : Chapi et Chapô ont encore pu checker une case de leur liste...

Que dire de ces alliances improbables qui sont en train de se tisser avec une facilité déconcertante ?

• Davos qui rend service à Tyrion.
• Les Sauvageons qui s'apprêtent à combattre aux côtés de Jorah Mormont.
• Gendry qui prend les armes aux côtés de la Fraternité sans bannière.

Les ennemis d'hier deviennent les alliés d'aujourd'hui. C'est beau, c'est joli et ça se fait avec une rapidité et une facilité à peine croyable. Il suffit d'un petit coup de gueule de trente secondes ou d'une petite remarque au détour d'une conversation pour que chaque personnage passe à autre chose. Certes, la guerre contre les marcheurs blancs se prépare et il faut mettre les vieilles querelles de côté, mais force est de constater que les scénaristes sont en train de réduire considérablement certaines intrigues qui pourtant ont ponctué la série depuis ses débuts. En plus de donner à ces intrigues l’impression de n’avoir été qu’un gagne-temps à un moment donné dans la série, cette stratégie entache pas mal la psychologie de certains personnages.

Que dire aussi de la relation de Daenerys avec Jon qui est amenée sans aucune subtilité ? Si avec cet épisode, on n’a pas compris que la mère des dragons avait flashé sur Snow, c'est vraiment qu'on est des idiots, tellement le coup de foudre entre ces deux-là est appuyé à plusieurs reprises, avec des dialogues, mais aussi avec des jeux de regards.

R'gardez comme il est content !

De même, les manigances de Littlefinger, avec son regard mesquin et son sourire forcé, n’ont plus rien de secret... en tout cas pour nous téléspectateurs. Elle paraît bien loin l’époque où ce personnage était difficile à cerner à force d’ambiguïté. Là, je trouve ses apparitions quasiment surjouées et caricaturales. Littlefinger est devenu juste une pourriture semblable aux autres, et c’est tout.

Au milieu de tout ça, qu'en est-il de la crédibilité ? Elle n'existe plus, tout simplement.

• Bronn qui arrive à secourir un Jaime portant une grosse armure en nageant sur plusieurs mètres.
• Bronn qui parvient à organiser les retrouvailles entre Tyrion et Jaime à Port-Réal (???) sans que cela ne soit remarqué, à part par Cersei (comment ? Pourquoi ?).
• Samwell qui s'échappe de la citadelle, avec femme et enfant, sans être repéré alors qu'on nous a fait croire dans les premiers épisodes que c'était un lieu hyper surveillé.
• Jon qui décide de partir à la chasse aux morts avec une équipe réduite d'hommes (mission suicide ou excès de confiance ?).
• Euh... théoriquement, les morts ne peuvent pas franchir le mur. Comment vont-ils pouvoir le faire passer de l'autre côté pour le ramener à Cersei et Daenerys s'ils parviennent à en récupérer un ?

Les exemples de scènes et décisions qui manquent de crédibilité sont nombreux, divers et variés.

Et qu'en est-il de la temporalité ? Même chose, elle n'existe plus. Nos héros semblent pris dans plusieurs espaces-temps et parviennent désormais à voyager d'un point A à un point B à la vitesse de l'éclair. Là où Jorah Mormont met deux épisodes à rejoindre sa Khaleesi depuis la citadelle, d'autres personnages ont eu le privilège de bénéficier d'un bonus nitro. C'est le cas de Tyrion, qui dans le même épisode, fait l'aller-retour Dragonstone/Port-Réal, ou de Jon qui quitte Dragonstone pour se rendre au-delà du mur. Inutile d'aborder le cas des corbeaux dont les messages atteignent désormais les quatre coins de Westeros en un rien de temps.

C'est bien simple, les scénaristes ne se prennent plus la tête et vont à l'essentiel. Ils ne se posent plus la question de la subtilité, de la cohérence ou de la crédibilité. Leur seul objectif est de parvenir à caser un maximum de choses dans le peu d'épisodes qui leur reste, quitte pour cela à rendre certaines situations ridicules ou décevantes.

... mais qui reste divertissant

Alors oui, pourquoi attribuer une note honorable à un épisode bourré de défauts ? Je vois déjà certains grincer des dents et ne pas comprendre ma logique. À ceux-ci, je leur répondrai tout simplement que je me suis habitué à aimer Game of Thrones comme cela. Les défauts de cet épisode sont des défauts qui sont présents dans la série depuis maintenant un certain temps. Ils ne sont pas nouveaux et tout comme Daenerys s'est faite au Roi du Nord, je me suis fait à l'idée que cette série ne tiendrait pas ses promesses. Alors, j'ai fait un choix : celui de l'accepter malgré ses défauts, pour ne pas avoir à bouder une série qui, je le sais déjà, va me manquer.

Ma main à couper que toi aussi tu as trouvé ça trop bô.

Alors oui, il y a beaucoup de choses à reprocher à cet épisode. Il est sans doute le moins bon de cette saison, mais il est aussi loin d’être le pire de la série. Non seulement il remplit parfaitement son rôle de transition de mon point de vue, mais il m’a aussi offert de jolis moments, comme l’instant câlin entre Jon Snow et Drogon ou encore ce survol de l’armée des morts avec les corbeaux, sans parler de la traversée du champ de bataille par Tyrion (facile, mais efficace).

J’ai décidé de laisser les scénaristes me raconter leur histoire comme ils l'entendent, sans rien attendre de particulier. Je ne sais pas s'il s'agit de la solution miracle, ni même si c’est une bonne idée, mais en tout cas, cela me permet de passer un bon moment à chaque fois. Malgré le fait que j’ai parfaitement conscience de tous les défauts de cette série, il y a une chose qui ne trompe pas : je ne m'ennuie jamais et j'aime toujours autant ses personnages et son univers. Surtout, j'ai toujours hâte de découvrir la suite... Pour moi, ça me suffit amplement.

Eastwatch est clairement un épisode décevant si nous devons le comparer aux autres épisodes de cette saison. Le manque d'action, et donc de rythme, fait ressurgir et aurait même tendance à amplifier tous les défauts que la série porte en elle depuis un bon bout de temps maintenant. Mais voilà, les quelques jolis instants qui ont ponctué cet épisode ont suffi à faire du bien à mon petit cœur et à passer un agréable moment. Un épisode décevant, certes, mais loin d'être catastrophique. 

J'ai aimé :

• De jolis moments (l’instant gros câlin entre Jon et Drogon, le survol de l’armée des morts par les corbeaux, la traversée du champ de bataille par Tyrion...).
• Beaucoup de retrouvailles…

Je n'ai pas aimé :

• … mais pas toujours réussies.
• Le manque de subtilité, de crédibilité, de temporalité et tous les trucs se finissant par "lité".
• Tout va définitivement beaucoup trop vite…

Ma note : 13/20.

Le Coin du Fan :

• Gilly (Vère en VF) lâche un missile avec la subtilité d’un éléphant : « Says here (the high septon) annulled a marriage from Prince "Rhagger”, and married him in secret, to another woman, in Dorne ». En VF, ça donne : « Il est dit que le haut septon annula le mariage du prince "Rhagger" et le maria en secret avec une autre femme à Dorne ». Cela signifie donc que Jon (fils de Rhaegar et de cette "autre femme") est l’héritier légitime du Trône de Fer, puisqu’il est le plus haut dans la lignée (et non pas un bâtard comme nous le pensions jusqu'ici). Pour y voir plus clair, voici un arbre généalogique :

Cliquez sur l'image pour l'afficher en plus grand.

• Jon le Targaryen :

• Gendry à Jon : « Nos pères se faisaient confiance ! ». Gendry pense à Eddard Stark, mais comme le vrai père de Jon est Rhaegar, cela donne une tout autre tonalité à cette phrase :

Rhaegar Targaryen et Robert Baratheon combattant l'un contre l'autre.

• La lettre que Littlefinger cache sous son lit est celle que Sansa avait été forcée d’écrire à son frère Robb en saison 2, lui demandant d’arrêter sa rébellion au Nord et de se rendre à Port-Réal pour prêter allégeance à Joffrey. Cela n’a pour autre but que de monter les sœurs l’une contre l’autre.

• Chez les Mestres, il est fait mention de « Jenny de Vieilles-Pierres » qui serait la descendante des Enfants de la Forêt. Dans le livre, Jenny est la femme de Duncan le Petit (fils du roi Aegon Targaryen et donc oncle de Daenerys). Elle était amie avec la sorcière des bois à l’origine de la théorie du Azor Ahai. Elle avait d’ailleurs convaincu Aegon de continuer l’inceste pour que justement ce soit leur lignée qui engendre l’Azor Ahai (et qui serait donc soit Jon, soit Daenerys, soit un autre personnage).

• Toujours chez les Mestres, il est fait mention de « Lodos ». C’était le roi des Îles de Fer avant qu’Aegon ne conquière Westeros. Lodos se proclamait descendant direct du « Dieu noyé » et il avait tenté d’invoquer le Kraken pour vaincre le Targaryen… Sans succès.

• « J’en ai marre de lire les exploits d’hommes meilleurs que moi ! ». Sam cite directement son père en partant de la Citadelle : « Je pensais que la Garde de Nuit t'aurait transformé en homme, ou au moins ce qui y ressemble. Tu es resté doux et gros, le nez plongé dans les livres et à passer ta vie à lire les exploits d'hommes meilleurs que toi. ».

• Game of Thrones est connue pour recycler ses troisièmes ou quatrièmes rôles. L’acteur Kevin Eldon qui joue un des deux gardes que tue Gendry était déjà apparu sous un tout autre trait :

Bonus :

À la semaine prochaine avec la critique de CaptainFreeFrag !

L'auteur

Bref, je kiffe les séries TV !!!

Cail1