Pitch au raisin
Un comique de Stand up qui travaille dans une boîte appelé Mr V est assassiné pour une sombre histoire d'argent. En effet, la patronne du club et son homme de main Vic sont en affaire avec un mystérieux dealer nommé Le Français. Convaincu que le club est la plaque tournante d'un trafic de drogue, Frank Drebin va s'infiltrer en se faisant passer pour un comique au chômage.
Des adieux un peu décevant
Ce sixième épisode a beau être le dernier de Police Squad, il ne fut pas tourné dans cet état d'esprit, l'annulation trop rapide du show n'ayant pas permis aux ZAZ de réaliser un épisode de clôture digne de ce nom. La série s'achève donc par un épisode assez standard, doté de quelques scènes mémorables et qui fut surtout le lieu de la rencontre entre le réalisateur Joe Dante et son acteur fétiche Dick Miller.
L'histoire va s'avérer décevante, la faute à un décor (un théâtre de stand up) qui ne va pas fournir la possibilité aux auteurs de débrider leur imagination. Heureusement, les séquences classiques du show fonctionnent parfaitement avec une séquence d'ascenseur bien pensée et une scène au laboratoire de désossage de voiture mémorable. La série s'achève dans une certaine tristesse par une chute plutôt bâclée, si l'on excepte la destruction finale du décor plutôt prémonitoire.
La réalisation de Joe Dante est assez paresseuse et se contente du strict minimum en sous-développant l'intrigue au profit de scène de stand-up pas forcément très inspirées. Devant un scénario aussi plat et sans enjeu, tout va rapidement reposer sur les épaules de Leslie Nielsen qui va fournir un numéro étonnant où ses multiples talents vont pouvoir s'exprimer.
Leslie Nielsen, un sérieux inaltérable
Sans remettre en cause le talent des ZAZ, il est clair que cet épisode est largement sauvé par la performance de l'impassible Leslie Nielsen qui donne une fois de plus de sa personne, mouillant la chemise au propre comme au figuré pour sauver certaines séquences de l'ennui. Le comédien montre alors toute la palette de son jeu, respectant parfaitement la règle numéro un du comique : ne jamais rire à ses propres blagues.
D'un calme et d'un sérieux à toute épreuve, Nielsen reste dans son personnage dans toutes les situations, gardant ainsi les spectateurs dans l'histoire malgré le chaos qui règne autour de lui. D'une sobriété remarquable, il constitue l'élément central du show (et des films à venir) et devient le champion de l'humour involontaire, apportant une touche de charisme étonnant supplémentaire à cette parodie de feuilletons policiers.
Loin de miser sur la facilité de l'humour grimaçant et gesticulant, Frank Drebin est un modèle de sobriété et se montre toujours incroyablement digne et ridicule à la fois. Acteur surprenant, puisant dans son expérience personnelle, il crée de toute pièce le lieutenant Drebin au fil des épisodes, lui donnant un style si particulier qui font de lui un personnage totalement inoubliable. Sans le moindre doute, il constitue la principale raison qui m'a fait sortir la série de la poussière des placards où elle est rangée depuis presque vingt ans.
La séquence de la morgue
Pour ce dernier épisode, les ZAZ vont nous donner une occasion de nous réjouir avec une scène totalement culte et révolutionnaire du point de vue de l'humour. Cette séquence prend place dans une morgue où Ed et Frank vienne retrouver le légiste et va être une suite ininterrompue de gags invraisemblables, avec en fond sonore le son terrifiant d'une scie découpant... on ne veut pas savoir quoi !
Pour les années quatre-vingts, cette scène ose beaucoup en montrant des cadavres entassés au hasard, avant d'être compressés à l'intérieur d'un box sans le moindre ménagement. Totalement invraisemblable, cette scène est à la fois stressante et irrésistible, mélange étrange entre la provocation et un furieux esprit potache qui fait le charme unique du style ZAZ.
Que reste-t-il vingt ans après de Police Squad ?
Seul et unique série estampillée du trio Zucker-Abrahams-Zucker, Police Squad n'a eu qu'une carrière courte et va s'avérer un échec public, l'écran télévisé ne permettant pas au trio de s'exprimer pleinement. Malgré un pilote irrésistible (qui vaudra même une récompense aux créateurs du show), la série va peiner à retrouver un second souffle, victime de scénarios pas toujours très inspirés et d'un Alan North qui n'arrivera jamais à trouver sa place.
Pourtant, ce show atypique et unique va lentement gagner en popularité avec le succès du portage cinématographique des aventures de Frank Drebin. La redécouverte des épisodes de cette série fantasque au début des années quatre-vingt dix va marquer entre autres des comiques français baptisés les Nuls. Ce mélange entre absurde, humeur potache et jeu de mots foireux va les inspirer, Alain Chabat reconnaissant à de multiples reprises son influence (ainsi que toute l'oeuvre des ZAZ d'ailleurs)
Alors que reste-t-il de Police Squad au bout de vingt ans ? Et bien, le regain de curiosité des années quatre-vingt dix va s'estomper lentement, laissant le show retomber dans l'anonymat, tout comme ces auteurs. Mais malgré tout, il demeure le souvenir d'un Leslie Nielsen au sommet de sa carrière, en train de créer le rôle de sa vie (il est aussi génial dans Planète interdite) qui lui procurera une popularité incroyable. Par son style tout en retenue, il nous prouve combien un acteur comique n'a pas besoin d'artifice pour être drôle s'il a du talent et constitue à mes yeux l'anti De Funès.
Mais voilà, la série s'achève déjà ainsi que ma série de petites vignettes sur un show trop méconnu, une parenthèse de folie dans l'histoire des séries télévisées. Le temps est venu de reculer dans le temps jusqu'en 1967, à l'orée d'un nouveau moment important de la télévision. Mon petit doigt me dit que cela devrait aussi être intéressant.
J'aime :
- la scène de la morgue
- Leslie Nielsen royal
- le désossage de la voiture
Je n'aime pas :
- that's all folks !
- la scène du ventriloque vraiment ratée
- une intrigue décevante
Note : 12 / 20
(98)