Le jeu s'arrête là où le drame commence
Emily décide d'envoyer à Conrad l'aveu de son père concernant la paternité de Charlotte, marquant la fin des négociations en vue du divorce. Celui-ci s'arrange pour réaliser un test de paternité pour confirmer la trahison de son épouse pendant que Victoria organise une rencontre avec Amanda Clarke qu'elle pense responsable de cette révélation. Pendant ce temps, Daniel se prépare à faire sa demande officielle à Emily, malgré la tournure tragique des évènements.
Résumé de la critique
Un épisode remarquable que l'on peut détailler ainsi :
- un couple sur le point de se détruire
- une histoire de jalousie entre deux femmes
- des comédiens particulièrement remarquables
- un affrontement qui risque de faire des dégâts
Un divorce par destruction mutuelle
Tous les éléments étant en place, Revenge peut lancer l'intrigue autour du divorce des Graysons, élément central d'un scénario toujours impeccablement construit. Après avoir laissé paraître les mensonges de Victoria et avoir fournit à Emily une révélation inattendue sur Charlotte, les scénaristes poursuivent leur progression, poussant une nouvelle fois le scénario vers l'avant. Emily fournit à Conrad la preuve dont il va se servir pour détruire sa femme, mais aussi lui-même en révélant les secrets d'une famille aux fondations horriblement instables.
C'est ce manque de bases solides et les mensonges qui vont venir détruire le couple Grayson, les enfants devenant des armes que les époux se renvoient à la figure. Victoria, en faisant de Daniel un atout dans son jeu, a modifié les règles de la séparation, transformant cette rupture en une lutte de pouvoir brutale et irraisonnée. Perdant le contrôle de la situation, Victoria passe à des solutions extrêmes sur lesquelles Emily n'a aucun contrôle, laissant apparaître le visage complexe d'une femme qui a bâti sa vie sur la manipulation et le mensonge.
Le scénario confirme l'importance de tout le travail préparatoire réalisé en amont par les auteurs, permettant aux personnages d'afficher toute leur complexité, surtout que la révélation sur Charlotte va détruire Conrad. Trahi et brisé, il est un homme qui cherche à tourner la page, à trouver un moyen de sauver la face et de paraître moins pathétique, affaibli par la sincérité de ses sentiments. Un portrait saisissant qui permet de mieux voir le vrai visage de Victoria, celle d'une opportuniste qui a appris à privilégier la raison au détriment de la passion.
En fait, la vraie héroïne de cet épisode est l'épouse Grayson, une femme détruite qui perd tout son pouvoir, mais n'a clairement pas l'intention de se laisser faire. A la manière de Tyler, elle se débat pour conserver chaque lambeau de son pouvoir, quitte à recourir à des méthodes particulièrement extrêmes. C'est sur ce point que le parallèle avec Emily devient le plus évident, les deux femmes partageant une vie construite sur le sacrifice de soi.
Un soap ne peut être écrit qu'au féminin
Avec cet épisode, Revenge recentre le récit autour du conflit entre Victoria et Emily, poussant les personnages secondaires à ne pas se mettre au milieu d'un affrontement qui sent le souffre. La tournure des évènements prend alors une vraie tonalité tragique, abandonnant le style léger des premiers épisodes pour des scènes élaborées où la noirceur devient une constante pendant que l'univers autour des Grayson commence à tomber en ruines. Le dernier mensonge de Victoria vient réveiller en Emily la source première de sa colère envers cette femme, à savoir une jalousie totale qui fait que la fin justifie les moyens.
L'histoire n'est plus au jeu des premiers temps, mais à la soif d'Emily de se mesurer à celle qui lui a volé son père, jetant sur elle le regard d'une petite fille incapable d'accepter de voir quelqu'un se mettre entre son père et elle. Le point central n'est plus la trahison, ou l'intrigue autour de l'attentat, mais bien de savoir si Victoria aimait son père ou non, s'il s'agit d'une manipulatrice cruelle ou d'une victime d'un mari avide de puissance. Le final apporte une réponse brutale, amenant à l'inévitable confrontation entre ces deux femmes en donnant petit à petit du sens au meurtre de Daniel.
Victoria et Emily se ressemble bien plus qu'elles ne le croient et cette ressemblance se cristallise totalement sur l'affection qu'elles portent toutes les deux sur le fils Grayson. Un nouvel exemple de la qualité d'écriture remarquable de ce show, aucun point du récit n'étant vraiment laissé au hasard dans cette troisième partie de saison. La disparition de Daniel va les affecter toutes les deux de manière tragique, montrant combien chez les personnages féminins de Revenge la raison et les sentiments sont toujours entremêlés, élément fondamental pour la création d'un vrai soap.
Des qualités d'écriture indéniables qui font que Revenge s'impose désormais totalement comme une oeuvre inévitable de cette saison 2011-2012. Des personnages très complexes, un coup de théâtre final particulièrement intelligent et subtil qui donnent à cette série une dimension émotionnelle et narrative particulièrement inattendue. Et surtout, des comédiens remarquables qui ont pris totalement la mesure de leurs personnages, offrant une performance collective particulièrement impressionnante.
Un casting royal
Pour faire exister cette bataille entre les Graysons ou entre Victoria et Emily, la série peut compter sur des comédiens impeccables qui appuient parfaitement la tonalité dramatique de cette intrigue. Le plus flagrant concerne Emily VanCamp qui abat enfin son masque glacial du début de saison pour donner plus d'expressivité à Emily lors d'une demande en mariage terriblement symbolique. L'autre séquence intéressante concerne son aveu à Amanda qui donne enfin l'occasion au spectateur de voir le vrai visage de son héroïne lors d'une scène importante.
Cette confession permet de donner de la crédibilité à la connexion entre Emily et Amanda, Margarita Levieva méritant pleinement de voir son rôle un peu plus développé, sortant du registre du simple obstacle pour devenir un peu plus. Mais évidemment, c'est le couple Madeleine Stowe - Henry Czerny qui attire toute l'attention, la comédienne montrant un vrai talent à teinter sa froideur d'une multitude de nuances. L'idée de faire que son fils pense à un viol sans qu'elle ne prononce jamais le mot prouve combien elle sait utiliser les apparences pour pousser les personnes à tirer leurs propres conclusions.
Conrad incarne quant à lui un homme blessé, détruit, sauvant son pouvoir et son royaume au détriment de sa famille et de sa fierté de père. Un rôle complexe superbement maîtrisé par un comédien qui nous fait partager la souffrance de son personnage, sauvant un empire qui devient totalement inutile, entièrement dédié à la base à satisfaire son épouse. Un empire qui symbolise son orgueil, convaincu que donner à cette femme un pouvoir infini et une existence luxueuse suffirait à lui ouvrir les voies de son coeur et à lui donner son amour.
L'amour se teinte pour lui de la couleur du mensonge, l'obligeant à repousser celle qui lui rappelle encore trop combien sa faiblesse l'a lentement mené à sa perte. Une description poignante d'une question terrible que tout homme connait, à savoir l'impossibilité de lire la vraie nature des sentiments d'une femme, l'amour n'étant finalement aux yeux des hommes qu'un acte de foi.
Un règlement de compte entre femmes
Avec cet épisode, les hommes se retrouvent définitivement terrassés par un affrontement au féminin dont le point central devient Daniel, un garçon qui représente la proie parfaite pour Emily. En une phrase, l'affection qu'elle croyait ressentir pour lui s'est évaporée, laissant ressortir la détermination et la colère d'une fille venue prouver sa supériorité à celle qui lui a volé son père. Imprévisible, le scénario nous mène peu à peu vers des fiançailles tragiques en se débarrassant en une réplique de l'aspect sentimental de cette relation pour laisser entrevoir le visage manipulateur et cruel d'Emily.
En conclusion, un épisode très réussi qui confirme la richesse de ce show, recentrant le récit sur l'affrontement à venir entre les deux personnages principaux qui cause déjà ses premiers dommages collatéraux. Perdant lentement son trône, Victoria en vient à utiliser des moyens extrêmes pour se sauver, plaçant Daniel en première ligne dans son combat pour rester au sommet. Un épisode qui abandonne le schéma habituel de la série pour verser dans une dramatique forte, faisant lentement monter la tension dans l'attente du meurtre de Daniel dont les conséquences paraissent de plus en plus impossibles à mesurer.
J'aime :
- les comédiens sont remarquables
- la scène de la demande, à la fois kitsch et sombre
- la séquence finale est remarquable
- le ton plus tragique du récit
- le scénario parfaitement maîtrisé
Je n'aime pas :
- rien
Note : 15 / 20
Un épisode remarquable, très bien construit, avec une qualité de jeu et d'écriture surprenante pendant que la tension monte à son paroxysme à l'approche du meurtre de Daniel. Une série qui se trouve une âme forte dans des personnages féminins magnifiques, à la fois complexes et particulièrement cruels, laissant espérer un affrontement de plus prometteur.