Adieu New-York, bienvenue dans l'enfer des banlieues chics
Tout commence pour Tessa Altman par une boîte de préservatifs trouvée dans sa commode, poussant son père à déclencher un départ précipité de New-York et sa débauche pour une vie plus saine dans une banlieue typique. Seule avec son père, la jeune femme va découvrir un monde terrifiant, avec des codes étranges, surtout pour une fille n'ayant jamais connu sa mère et possédant un goût pour les vêtements pas vraiment raccord avec son nouvel univers.
Résumé de la critique
Un épisode réjouissant que l'on peut détailler ainsi :
- un casting impeccable
- un récit qui oscille entre cliché et ironie
- une série formatée, mais qui s'amuse à franchir la ligne avec intelligence
- un potentiel indéniable
Petite souris des villes et gros rat des champs
Tessa est une jeune New-Yorkaise qui, par la faute d'un père trop protecteur, se retrouve en pleine banlieue avec ses maisons avec jardin, son silence terrifiant et son climat effrayant. Autant dire que l'acclimatation va être périlleuse, surtout que, tout comme son père, elle va se trouver comme un éléphant dans un magasin de porcelaine dans cet univers hyper formaté. Pour jouer ces deux rôles, Jeremy Sisto et Jane Levy crèvent l'écran, formant un couple père - fille parfaitement crédible et assez touchant.
Car le talent de Suburgatory est de jeter un regard à la fois acide et tendre sur cet univers, profitant de ce pilote pour nous initier à la mode du Red Bull et à une notion du beau assez troublante. Le portrait pourrait être à charge et raterait sa cible si les comédiens ne montraient pas une certaine nuance dans leur jugement des autres, conscients de leurs propres défauts, typiques des habitants venus de la grande ville. Tendus et toujours sur le qui-vive, ils se laissent lentement apprivoiser par ce nouvel univers, trouvant dans Dallas un personnage vraiment intéressant pour faire le lien entre les deux univers.
Car plus qu'une histoire de déménagement, Suburgatory est l'histoire d'une jeune femme qui découvre le manque d'une mère qu'elle n'a jamais connu alors qu'elle commence à envisager sa sexualité.
Entre subtilité et moment de franc délire
Signée par Emily Kapnek de Aliens In America, cette comédie explore l'histoire d'un changement, Tessa se retrouvant totalement perdue hors de sa zone de confort. Incapable de faire face aux changements à venir, son père tente d'aller dans un univers totalement sous contrôle, inconscient de la nature profondément infernale de ce monde où la mère est un élément central. Alternant tendresse et délire assumé, la série joue dans le domaine balisé de la comédie douce-amère, respectant le cahier des charges entre tendresse et regard acerbe.
C'est dans cet univers uniformisé et terrifiant qu'elle va trouver en Allie Grant une amie providentielle, jeune femme prise dans l'enfer d'une famille à la fois anodine en apparence et pourtant totalement dérangée. Le clin d'oeil à Weeds est flagrant et répété, avec un jeu de mot hilarant sur le mot "pot" entre l'héroïne et l'ancienne fille de Voldemort (qui a l'air d'avoir hérité d'une famille plus que bizarre). Sans opter pour une grande originalité, Suburgatory a une vraie intelligence dans la description de cet univers, usant avec intelligence de ce sale esprit qui permet d'oublier ses aspects les plus prévisibles.
Une série familiale qui sait se faire subversive
Loin d'être un show d'une grande originalité, Suburgatory possède un talent vraiment remarquable, celui de savoir prendre un format parfaitement classique et de laisser son héroïne apporter sa touche de cynisme qui fait la différence. La série reste un teen show classique, à mi-chemin entre "10 things I hate about you" et "Daria", essayant avant tout de placer le spectateur dans une position confortable en évitant l'étalage de provocation. Le regard est acerbe, mais sait utiliser les clichés pour conserver un ton léger et non moralisateur.
En tant qu'héroïne, Tessa hérite des meilleures répliques, poussant la série vers une approche plus acide qu'elle emprunte par instants pour marquer son identité. Les auteurs montrent un soin particulier dans la mise en place de l'univers du show, tout en offrant quelques séquences vraiment drôles comme celle de l'écho assez irrésistible. Plus que sa fille, c'est le père qui va montrer une vraie difficulté à s'intégrer, malgré la présence d'un ami dont la moindre répartie est un grand moment d'absurdité, preuve de la qualité d'écriture des auteurs.
Hélas, la série reste encore maladroite et certains gags sont vraiment de trop (le pool texting), sans pour autant venir gâcher le potentiel de cette série particulièrement bien construite.
Une des comédies de la rentrée
Précédée d'un bon bouche-à-oreille, Suburgatory ne déçoit pas et se montre même au-dessus de mes attentes, offrant quelques séquences comiques plus que prometteuses. Dotée d'un vrai potentiel, la série possède la qualité de casting et d'écriture pour devenir l'une des comédies de l'année, malgré son format assez classique. Un show légèrement ironique, cynique juste ce qu'il faut, qui se permet même un final assez tendre et plutôt malin, montrant que la voie du bonheur pour Tessa et son père se trouve bien ici, dans cette banlieue à première vue terrifiante.
En conclusion, une vraie surprise avec un show qui mérite de remporter un certain succès, montrant une qualité d'écriture et de construction des personnages indéniables. Construit comme un faux soap légèrement amer, Suburgatory propose un divertissement très solide, porté par un récit très dynamique et efficace. Un pilote non exempt de défauts, mais qui donne clairement envie de poursuivre l'aventure avec Tessa et son père, à la découverte de cet univers proche de l'enfer.
J'aime :
- un univers à la fois crédible et délirant
- des touches de mauvais esprit réjouissant
- un récit dynamique et rarement ennuyeux
- le casting absolument parfait
Je n'aime pas :
- parfois prévisible
- quelques gags de trop
Note : 13 / 20
Une bonne surprise que ce Suburgatory, comédie douce amère portée par un casting impeccable et une narration dynamique et efficace. Entre subtilité et franc délire, la série impose des codes originaux dans un univers hyper formaté et parvient à nous faire partager le désarroi de cette fille qui commence à découvrir un nouveau monde particulièrement angoissant.