A l’heure où le cinéma investit le monde des séries, les attentes se font de plus en plus grandes : après Steven Spielberg avec Falling Skies et plus récemment Extant, Steven Soderbergh avec The Knick (sortie prévue le 8 aout prochain sur la chaîne Cinemax), ou encore Jane Campion avec Top Of The Lake, c’est le maître du cinéma fantastique Guillermo Del Toro qui se lance sur le petit écran avec cette adaptation de son roman éponyme, premier d’une trilogie. Le pilot diffusé dimanche dernier sur la chaîne câblée FX ravive avec brio la mode des vampires et des morts-vivants.
Un pilot qui tient en haleine, de bout en bout
La série est un genre propice au fantastique : le mystère s’y dévoile lentement, le suspense se fait plus fort au rythme des épisodes, les cliffhangers parfois trop évidents poussent le spectateur à continuer sa quête insatiable de vérité. Le pilote de The Strain pose mille questions, et ne donne que des fragments de réponses. Surfant à la fois sur le succès des séries post-apocalyptiques, en premier lieu desquelles The Walking Dead, et sur la mode (quelque peu en berne) de nos amis aux dents pointues, Guillermo Del Toro et Chuck Hogan nous offrent une série pourtant unique (adaptée de leur propre comic-book), qui mêle scientifique et mystique, rationalité et cauchemar.
Le pilote s’ouvre sur l’intérieur d’un avion en provenance de Berlin, s’apprêtant à atterrir à l’aéroport JFK de New York. En apparence, pas de problème : les passagés sont encore assoupis dans l’appareil plongé dans une semi-obscurité déjà angoissante. En vérité, l’avion porte en lui la « souche » (traduction littérale de The Strain) d’un virus mortel, inconnu et incontrôlable, qui prend la forme d’une créature monstrueuse et surnaturelle. Sur le tarmac, c’est ébahi qu’on découvre cet avion « mort », qui est pourtant loin de l’être…
C’est alors qu’intervient notre (anti)-héros, le docteur Ephraim GoodWeather (ironie du nom ?), chef du CDC (Centers for Disease Control and Prevention) de New York. Père aimant mais mari absent, il est en plein milieu d’une thérapie de couple quand on l’appelle à la rescousse, et c’est assisté de ses deux collaborateurs fidèles - l’un deux étant d’ailleurs interprété, je tiens à le préciser, par Sean Astin, le Sam Gamegie du Seigneur des Anneaux ! - qu’il se rend à l’aéroport. Alors qu’ils pénètrent à l’intérieur de l’avion, certains des passagers « ressuscitent » miraculeusement. Ils sont loin de se douter que les autres se réveilleront, eux aussi, déjà contaminés.
L’homme face à la contamination
The Strain offre la vision d’une humanité au bord du gouffre et de sa réaction face à l’irruption d’une menace virale. Sujet brûlant, donc, à l’heure des H5N1 et autres maladies contagieuses. Le virus progresse à une vitesse vertigineuse alors que Goodweather et son équipe semblent incapables de le contenir. Métaphore d’un monde anxiogène, ultra-performant mais pourtant impuissant face aux dangers de la nature, la série joue avec notre peur de la contamination mondiale, une contamination qui pourrait être le fait d’un complot d’une minorité. Ici, un vieil homme riche au teint vampirique semble, du haut de son luxueux building new-yorkais, tirer les ficelles.
L’identification avec les personnages se fait donc très rapidement. L’intrigue, d’abord resserrée sur Goodweather et ses problèmes familiaux, s’élargit au fur et à mesure que le virus progresse. Du même coup, les points de vue se multiplient : à la rationalité scientifique vient s’ajouter l’incompréhension et la crainte de la population. Et au milieu de la foule hystérique, un seul homme semble être capable d’apporter une réponse, loin d’être acceptable par la communauté scientifique.
Le pilote de The Strain est donc selon moi plus que prometteur : à mi-chemin entre The Walking Dead et Helix, il évite pourtant une ressemblance trop marquée. Plus complexe, plus poétique aussi dans sa réalisation, l’épisode mêle subtilement l’univers du surnaturel et du concret, et on retrouve bien là la patte de Guillermo Del Toro. Une série divertissante et intelligente, donc, qui invite à une réflexion sur les limites du progrès scientifique et l’importance des croyances, religieuses ou mystiques.
Ma note : 17/20.
Ce que j'ai aimé :
- Le rythme effréné, la tension permanente pendant l'épisode.
- La réalisation soignée, les effets spéciaux réussis.
- La diversité des personnages.
- La complexité de l'intrigue.
Ce que je n'ai pas aimé :
- Les problèmes familiaux de docteur, à mon sens inutiles.
- Que l'épisode se termine ^^.