L'instant après que le temps se soit arrêté...
Trois astronautes, perdus dans l'espace, se posent sur une planète à des milliards de kilomètres de la Terre et découvre un monde qui leur parait assez familier. Devant eux, un décor des années 50, avec une multitude de personnages qui restent figés pour l'éternité, comme si le temps avait stoppé sa course, sauf pour ces trois astronautes.
Le souvenir des ombres d'Hiroshima
Deuxième épisode signé par Richard Beaumont, ce volet de The Twilight Zone est très singulier et surprenant, car il repose sur une idée à la fois simple et ingénieuse, malheureusement mal mise en valeur par une histoire décevante. L'intrigue commence avec trois astronautes : Weber, Meyers et Kirby qui atterrisse sur une planète en catastrophe et découvre un monde en tout point semblable à celui de la Terre des années cinquante. Seule différence notable avec le monde réel, la présence de deux soleils agressifs dans le ciel, seul signe qui permet de différencier ce monde du nôtre.
L'autre spécificité de ce monde est que tous ses habitants sont figés dans des pauses très expressives, comme une suite de tableaux très vivants et totalement inertes. L'ambiance devient vite oppressante, tandis que les figurants réussissent une performance surprenante en gardant la pose sans ciller, donnant un rendu visuellement surprenant. Une suite de tableaux qui célèbrent la réussite et la gloire d'un personnage, de jolies compositions visuelles qui possède une touche d'absurdité qui appuie le climat oppressant du début d'épisode.
Visuellement, l'épisode est une réussite et installe un climat vraiment singulier, typique de The Twilight Zone, avec une réalité anodine qui prend une apparence mystérieuse par la rigidité de ses habitants. Signant ici sa deuxième réalisation pour la série, Douglas Heyes dirige cette étonnante performance, même si certains mouvements perceptibles viennent entamer l'illusion d'un monde parfaitement figé sans pour autant nous sortir du récit. Un tour de force surprenant, preuve de la capacité du show à produire avec peu de moyens des effets remarquables, donnant toute son originalité à un épisode qui va malheureusement décevoir par son histoire maladroite.
En pleine guerre froide, Richard Beaumont surfe sur la peur liée à un possible holocauste nucléaire, le souvenir des ombres d'Hiroshima venant faire écho à cette peinture d'un monde à l'arrêt. Un univers en négatif, dernier instant d'une humanité sur le point de disparaitre, point central de l'intrigue particulièrement mal mis en valeur.
Un épisode qui se repose trop sur son concept
Si l'idée de départ est brillante, elle fait surtout écho au premier épisode de la série, mais en proposant un trio vedette au lieu d'un astronaute solitaire. Un choix qui va se retourner contre son auteur tant Richard Beaumont ne semble pas savoir quoi faire de ce trio aussi impuissant que pathétique, ne leur offrant pas le moindre développement durant les vingt minutes de l'intrigue. Si les précédents héros de La Quatrième Dimension étaient les principaux responsables de leur passage dans cet univers étrange et décalé, ce trio sert juste de modeste excuse pour lancer une histoire peu inspirée.
Si le réalisateur se montre particulièrement inventif, le scénariste se limite lui au strict minimum, avec une histoire qui parait particulièrement confuse dès sa phase d'exposition. Les astronautes ne sont jamais incarnés, la raison de leur présence est à peine esquissée et l'auteur se limite à de vagues explications lors d'une remarque très confuse sur un champ d'astéroïdes. Clairement, l'intrigue n'est pas maîtrisée et la dimension psychologique de l'épisode n'est pas du tout utilisée, ruinant un concept de départ doté d'un vrai potentiel.
La conclusion est aussi confuse, reposant beaucoup sur le talent de Cecil Kellaway, acteur spécialisé dans les seconds rôles qui donne à son personnage une apparence à la fois inoffensive et mystérieuse très convaincante. Face à lui, Kevin Hagen, James Morrow et Don Dubbins peinent à exister, n'ayant aucun matériel à exploiter dans un épisode qui privilégie le spectacle d'une ville figée à la destinée de ses trois héros. Le cliff final est à l'image de l'épisode, visuellement élégant, mais ne raconte rien sur la nature de ce monde et les raisons de la présence de ces trois astronautes.
Une façon pour Richard Beaumont de montrer qu'une fois la mort passée, il ne reste rien d'autre que des enveloppes vides incapable de raconter leur propre histoire. Il manque les mots, le geste pour dire la motivation de ces astronautes, ce goût pour l'aventure qui a poussé ses hommes à entreprendre un voyage si loin de chez eux. Au final, l'épisode ne repose que sur son concept et manque de cette âme, se limitant finalement à un simple exercice de style sans véritable contenu.
Des explications fumeuses
Poursuivant leur thématique autour de la mort, les auteurs de The Twilight Zone envoient trois êtres humains dans un monde figé où la mort a déjà frappé, prenant ici la forme d'un vieil homme débonnaire et inoffensif. Une manière de constater combien la série échoue une nouvelle fois à proposer une vraie intrigue reposant sur plusieurs personnages principaux qui manquent d'épaisseur. Cette idée s'avère aussi passionnante à exploiter du point de vue de la forme que décevante sur le fond, incapable de donner du sens à l'histoire de Wickwire et à son existence.
En cherchant à expliquer le mystère de cette situation, Richard Beaumont s'emmêle et réduit à néant cette peur abstraite qui fait la force de son premier acte, opposant les êtres animés à des créatures figées pour l'éternité. Une mort terrifiante qui prend la forme d'une paralysie totale, où l'âme se retrouve prise au piège d'un corps figé, excellente base de départ pour une histoire qui s'égare avec son idée de voyage spatial. Le choix de centrer le récit sur trois astronautes est désastreux, mauvaise inspiration qui va gâcher la fluidité du récit en amenant dans le deuxième acte des explications fumeuses et particulièrement confuses.
Il y avait pourtant du potentiel devant ce monde où le temps s'est arrêté, création cauchemardesque d'une entité qui a enfin trouvé la solution pour amener la paix en emprisonnant les passions qui nous animent.
J'aime :
- l'idée de départ ingénieuse
- la réalisation impeccable
- le travail des comédiens
Je n'aime pas :
- l'histoire des trois astronautes
- les explications confuses et inutiles
- assez fade dans l'ensemble
Note : 12 / 20
Une très bonne idée mal exploitée par un Richard Beaumont que l'on a connu mieux inspiré, se perdant dans une histoire d'astronautes mal inspirée. La mise en scène spectaculaire de cette ville figée reste une vraie prouesse qui mérite d'être découverte, seul moment où la série se montre à la hauteur de sa réputation.