Critique : Torchwood 4.05

Le 11 août 2011 à 19:42  |  ~ 7 minutes de lecture
Episode très réussi du point de vue formel et qui propose une vision de l'humanité particulièrement sombre. Au programme, Torchwood en pleine action, Oswald Danes au sommet de sa gloire et un final controversé et ambitieux.
Par sephja

Critique : Torchwood 4.05

~ 7 minutes de lecture
Episode très réussi du point de vue formel et qui propose une vision de l'humanité particulièrement sombre. Au programme, Torchwood en pleine action, Oswald Danes au sommet de sa gloire et un final controversé et ambitieux.
Par sephja

Pitch miracle day partie 5 

Alors que les camps pour recevoir les patients se mettent en place dans toute l'Europe et les Etats-Unis, l'équipe de Torchwood désire de se séparer pour découvrir la réalité sur les réels objectifs de Phicor. Les Nations-Unis créent au même moment une nouvelle nomenclature du vivant au travers de trois catégories et lancent l'opération de classification de tous les êtres humains. Gwen Cooper part quant à elle aux Pays de Galles pour tenter de sauver son père tandis que Jack part suivre le discours d'Oswald Danes à Los Angeles. 

 

 

En préambule, je tiens à signaler qu'une partie de cette critique contient un spoiler assez fort sur le final. De plus, la nature de cet épisode fait qu'il m'est impossible de le passer sous silence et sachez bien, pour les personnes qui tomberont malencontreusement sur cet article, qu'il est conseillé  de voir l'épisode avant. Vous me lirez ensuite si le coeur vous en dit. 

 

Le mouvement comme preuve de vie  

Torchwood arrive à mi-parcours et l'épisode assez moyen de la semaine dernière avait prouvé la nécessité pour l'intrigue d'avancer et de se développer, ce qu'elle va faire avec l'apparition des camps pour accueillir les personnes malades ou mortes cérébralement. La vie a perdu et une nouvelle nomenclature du vivant est mise en place, fondée sur le principe de viabilité, à la manière d'un triage aux urgences. L'équipe de Torchwood choisit d'investiguer en infiltrant un camp du Pays de Galles pour Gwen et un à Los Angeles pour Rex, Esther et le docteur Juarez.

Après un démarrage assez lent, Torchwood retrouve des couleurs en lançant chacun de ces personnages au coeur de l'action, Jack continuant de poursuivre Oswald Danes dans son ascension sous le signe de Phicor. Chacun investit le camp que ce soit du point éthique avec le docteur Juarez en inspectrice zélée, mécanique avec Rex qui se fait passer pour "mort" ou administratif avec Esther placée au coeur du système. Gwen hérite pour sa part de la partie plus émotionnelle de l'épisode pendant que Jack se place au niveau politique  en essayant de découvrir qui tire les ficelles. 

Bref, cet épisode ne traine pas en besogne, marquant l'étape importante de la mi-saison en proposant une mission d'envergure assez crédible qui permet de couvrir tous les aspects du Miracle Day. Avec une pointe d'autosatisfaction, les auteurs montrent encore une fois toute la force de leur concept de départ, mais surtout propose une thématique extrêmement sombre sur la mort et sa gestion bureaucratique. L'humanité est trop pleine et se doit de se débarrasser des "vivants' en trop, créant comme  toujours une nouvelle classification pour justifier leurs actes.

Plus que la menace qui pèse sur le monde, c'est la cruauté de l'humanité qui est mise ici en exergue dans un monde où le pire devient la seule solution et où le cauchemar se drape comme toujours dans les habits du bien public. Difficile en tout cas de voir une porte de sortie pour un monde qui se rend coupable de pires atrocités sous le prétexte de réguler la vie en recréant de toutes pièces le processus de mort.

 

Un polar ambitieux et efficace

Avant d'aborder l'aspect éthique et complexe de cet épisode, j'ai fait le choix de m'intéresser avant tout à ce volet du point de vue technique afin de dépassionner le débat qu'engendrera cet épisode. A la manière d'une unique enquête de grande ampleur, Torchwood propose d'investir un lieu unique, justifiant au passage l'existence de chacun de ses personnages. Il devient vite évident que tout le premier acte a été écrit dans le but de cette opération, comme les scénaristes s'amusent à l'évoquer en parlant de l'inutilité d'Esther avec une pointe d'humour. 

Difficile de s'ennuyer, la partie la plus faible de l'intrigue revenant à Gwen Cooper qui hérite d'une histoire assez maladroite qui a pour seul mérite de redonner un peu de place à Rhys. A la recherche des ombres qui tiennent les commandes, Jack Harkness surveille Oswald Danes, personnage mystérieux qui s'amuse toujours autant de l'ironie de la situation. Le miracle inverse les valeurs et change le sens de la foi et des miracles, donnant enfin une place peu enviable à la religion qui peine à exister réellement dans un monde sans mort. 

Un épisode fort, à la hauteur de ce que j'attendais de Torchwood, à savoir une construction ambitieuse et sombre au travers d'un récit de science-fiction digne de James Morrow. Russell Davis a une idée derrière la tête : parler de la vie et de la mort sous sa forme la plus polémique avec une subtilité assez surprenante.

 

L'homme, la mort et la morale (Spoiler Alert)

Une phrase bien connu tiré des tables de la loi décide que la règle de base de la vie en communauté est la suivante : "Tu ne tueras point". La vie est, par essence, un miracle, le seul et unique par son aspect précieux, sa gratuité et son mystère qui peut être abordé du point de vue scientifique par la médecine ou mystique par la foi en un mouvement religieux quel qu'il soit. Enterrer consiste à rendre hommage à ce que le défunt a été, signe indispensable à la construction d'une communauté où la vie est par définition un bien inestimable.

Dès lors, prendre la vie, voler ce miracle à quelqu'un et le laisser pour mort est un crime inexcusable, mais aussi une marque de pouvoir, celui de briser la destinée de vulgaires inconnus et de les traiter comme des êtres sans la moindre valeur. Dès lors que la mort n'existe plus, la vie cesse d'être un miracle, mais plutôt un poids dont il est impossible de s'échapper, une banalité qui justifie dans le cas de souffrances abominables le recours à l'exécution massive. Les usines de mort deviennent alors un élément de salubrité publique, servant à éviter le développement à outrances de bactéries et de souches de maladies incontrôlables.

Il n'est pas question de génocide évidemment, mais d'usines de mort, une solution de facilité aux conséquences insupportables, fruit d'une panique qui a pris une classe dirigeante totalement débordée. Loin de l'idéologie raciste à l'origine des camps de la mort nazi, les états envisagent juste une reconstruction à l'échelle administrative d'un processus de régulation de la population mondiale. Seulement, le passé et le souvenir de la monstruosité de la seconde guerre mondiale ne peut être effacé et l'exécution d'un des personnages clés du show sert à souligner la monstruosité de cette pratique.

Difficile de voir quel est le but recherché par Phicor, mais l'essentiel semble être dit avec cet épisode qui prouve l'importance de la mort, libération pour ceux qui ont trop souffert, mais crime pour les idiots qui s'octroient le droit de décider qui doit vivre ou qui doit mourir. Espérons que la suite ârvienne à exploiter ce thème avec suffisamment de subtilité pour éviter les écarts car Torchwood vient de s'aventurer en terrain glissant. Et c'est justement ce que l'on attendait d'eux. 

 

J'aime : 

  •  un récit dynamique et plaisant 
  •  des personnages bien exploités 
  •  une thématique forte superbement mis en valeur par le discours d'Oswald 
  •  une direction artistique remarquable 

 

Je n'aime pas : 

  •  un démarrage poussif, conséquence du faible épisode précédent
  •  l'intrigue de Gwen qui tombe dans le piège du pathos

 

Note : 14 / 20

Retour d'un Torchwood d'un bon niveau, avec une intrigue aux conséquences morales et humaines suffisamment lourdes pour donner de l'ampleur aux épisodes à venir. Le miracle prend toute son ampleur et devient un cauchemar à l'échelle planétaire en inversant les échelles de valeurs. Culotté et assez prenant. 

L'auteur

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