Critique : Twin Peaks 1.01

Le 01 octobre 2016 à 11:34  |  ~ 6 minutes de lecture
Épisode plutôt amusant qui cherche à redonner un peu d'oxygène à un récit qui a le souci de ne pas égarer les spectateurs. Au programme : un épisode entre rire et tristesse, un shériff un peu déboussolé, et une ville découpée entre proies et prédateurs.
Par sephja

Critique : Twin Peaks 1.01

~ 6 minutes de lecture
Épisode plutôt amusant qui cherche à redonner un peu d'oxygène à un récit qui a le souci de ne pas égarer les spectateurs. Au programme : un épisode entre rire et tristesse, un shériff un peu déboussolé, et une ville découpée entre proies et prédateurs.
Par sephja

Pitch Fred Madison : Alors que l'émotion liée à la mort de Laura Palmer commence à retomber, la ville de Twin Peaks retrouve son rythme habituel, ses problèmes du quotidien et ses luttes de pouvoir. Pendant ce temps, l'agent spécial Cooper interroge James Hurley à propos de sa relation avec la défunte. L'autopsie de la jeune femme viendra confirmer que Laura possédait de nombreux secrets.

 

 

L'histoire d'une petite ville sur un ton plutôt léger

 

Après un pilote long à l'ambiance très sombre, entièrement centré sur le drame qui affecte la famille Palmer, Lynch éprouve le besoin de se concentrer sur la ville en laissant de côté l'intrigue policière qui ne connaîtra que de petites avancées. L'audition des proches de Laura est une bonne astuce scénaristique pour donner une vision d'ensemble de la ville, les auteurs faisant le choix de ralentir l'intrigue pour mieux laisser le spectateur s'imprégner des différents habitants.

Épisode étonnant et plus chaleureux que le précédent, il prouve le talent de Lynch pour donner une réelle force à chacun de ses personnages, chaque comédien portant en lui un potentiel d'histoire qui donne toute sa richesse à l'épisode. Seuls quelques choix esthétiques discutables (un flashback de très mauvais goût notamment) donnent un coup de vieux à l'ensemble, reflet d'une époque où les réalisations pour la télévision n'avaient pas le même niveau de sophistication qu'aujourd'hui.

Très efficace, cette suite de portraits permet de parfaitement identifier chaque comédien et se montre d'une complexité particulièrement rare à la télévision de l'époque. Portée par des acteurs qui trouvent petit à petit le ton juste, Twin Peaks fait le choix du feuilleton, refusant toute intrigue indépendante pour préférer le développement en parallèle d'un ensemble d'intrigues, créant du coup un genre qu'Alan Ball nommera le soap réaliste.

 

 

Un épisode entre chagrin et humour

 

Conscients que la vraie héroïne du show est la ville elle-même, les créateurs, et notamment Duwayne Dunham (dont la carrière connaîtra son apogée avec Twin Peaks) ont pris le soin de faire sortir l'histoire du cadre des seuls amis de Laura Palmer pour englober Twin Peaks toute entière. Les premiers indices indiquent clairement que la recherche du coupable passera par la révélation des nombreux secrets de la communauté qui, pour le moment, emprunte les apparences d'une petite ville de montagne.

Visiblement conscient de l'aspect plutôt austère du pilote, David Lynch choisit d'apaiser le récit en proposant de nombreuses scènes comiques plus ou moins surréalistes. Dès la première séquence où Cooper rencontre Audrey Horne, le dialogue ose de discrets sous-entendus sympathiques et apporte à la série une légèreté nouvelle. Sherilyn Fenn (formidable en chipie manipulatrice) étant de loin la moins affectée par la mort de Laura, elle donne à l'épisode un ton juste, entre l'apparence charmante et la réalité inquiétante.

Petite anecdote : l'actrice avait auparavant participé à Sailor et Lula et incarnerait, selon Lynch, le même personnage dans les deux œuvres.

 

Rencontre entre Dale Cooper et Audrey Horne

 

Durant tout l'épisode, Dale et le Shériff Truman vont jouer un numéro entre humour et drame, montrant de la sagesse face à une affaire qui ne se résoudra pas en quarante minutes. L'objectif est ici de lancer les premières storylines sans brusquer un spectateur pas vraiment habitué à ce type d'œuvre.

 

 

Le Shériff Truman et le syndrome du Docteur Watson

 

Si Michael Ontkean n'a pas connu la carrière qu'il méritait, son apport dans Twin Peaks est loin d'être négligeable. En effet, le jeune shériff sert d'intermédiaire entre l'agent Cooper et les spectateurs impressionnés par sa perspicacité. Souvent enclin à une forme de distance plutôt humoristique, il servira d'inspiration au Jack Carter d'Eureka (mais j'y reviendrai plus tard) et constituera un des personnages emblématiques du show.

 

Sheriff Truman

 

Très réaliste, sa romance avec Jocelyn Packard appuie son caractère de chevalier servant maladroit, à la fois chaleureux et assez simple d'esprit. Le Shériff Truman a l'âme d'un héros, le costume du héros. Il ne possède pas les épaules pour remplir pleinement ce rôle, mais constitue un complément idéal à l'agent Cooper.

 

 

James Hurley ou le James Dean du pauvre

 

Incarné par James Marshall (sa carrière ne connaîtra pas d'autres performances marquantes), James Hurley est un personnage typique de Lynch, la prolongation pathétique du mythe de James Dean. Rebelle timide, son personnage est une copie au rabais de la star défunte, rappelant qu'à l'origine, Twin Peaks était un projet portant sur l'assassinat de Marilyn Monroe.

 

James Hurley

 

À la fois touchant et pathétique, fragile et incroyablement naïf, James Hurley a tous les traits du vilain garçon romantique et mystérieux, un marginal épargné par la folie qui règne dans cette ville.

 

 

Twin Peaks, entre chat sauvage et souris inconsciente

 

Personnage central de cet épisode, la ville de Twin Peaks aurait tout de la ville tranquille, si les apparences charmantes ne cachaient pas une vérité bien plus sordide. Car si certains sont en tout point normaux et inoffensifs, ils vivent sous la menace d'un terrible mélange de garces, de psychopathes et de criminels particulièrement tordus. Jocelyn Packard, première victime désignée, va voir combien la ville peut se montrer particulièrement cruelle et violente.

 

Panneau "Welcome to Twin Peaks"

 

La principale révélation de l'épisode est l'appartenance de Laura Palmer au second groupe, la jeune femme s'amusant visiblement à aguicher des hommes aussi différents du point de vue du caractère que de l'âge. Loin d'être une oie blanche, la jeune femme a de nombreux secrets à confesser, rendant la motivation de son meurtre encore plus mystérieuse et intéressante.

 

La justesse de la description des habitants et de leurs conflits fait de Twin Peaks une œuvre fascinante même dans ses épisodes mineurs. Tandis que chaque personnage prend sa place, la série se prépare à monter en puissance, portée par la force de personnages marquants et remarquables.

 

J'ai aimé :

 

  • Le ton plus léger qui permet de bien entrer dans le récit
  • Le casting de plus en plus convaincant
  • Les dialogues savoureux
  • Un épisode très dynamique et très riche en informations
  • Sherilyn Fenn formidable

 

Je n'ai pas aimé :

 

  • La réalisation moins forte que celle de Lynch
  • Une tendance à la répétition

 

Ma note : 14/20.

L'auteur

Commentaires

Pas de commentaires pour l'instant...

Derniers articles sur la saison

Rétro-podcast 1 : Pilote de Twin Peaks

Bienvenue à Twin Peaks.

Critique : Twin Peaks 1.07

Pour son final, Twin Peaks essaie d'impressionner en proposant un récit très dynamique centré sur des rebondissements majeurs. Au programme, un épisode qui bouleverse sans révolutionner, un portrait de deux personnages délaissés durant cette saison et qui reviennent au centre de l'intrigue.

Critique : Twin Peaks 1.06

Episode de transition assez réussi au vu de la difficile tâche qui lui incombe de clore les storylines les moins intéressantes. Au programme, un scénariste oublié, deux personnages secondaires de la série, comme une respiration avant un final inquiétant.