Cette année, je ne suis pas très content. Je regarde les épisodes presque sans plaisir, semaine après semaine. Il y a eu des bonnes choses, mais globalement, je trouve ça poussif. Décortiquons ensemble le pourquoi du comment.
1. Les thématiques politiques
Doctor Who est un show du too-much, de la démesure, du « Everything is possible ». Lorsqu'une fiction aborde une thématique politique, sujet sensible, par excellence, elle doit le faire de façon délicate. Cette année, la série a abordé plusieurs thèmes politiques dans ses épisodes (l'avortement dans Kil the Moon, l'écologie dans In the Forest of the Night) et à chaque fois, le traitement a été peu fin : « Chaque femme a le choix » et « Nous devons protéger les arbres ». Je n'oublie pas que Doctor Who est une série initialement pour les enfants, mais être enfant, ce n'est pas synonyme d'être con. La question de l'avortement ne se limite pas à la question du choix, tout comme l'écologie n'est pas qu'une question de protéger la nature. Les choses sont plus complexes et cette année, Doctor Who est tout sauf complexe.
2. Clara
La principale critique (justifiée) qu'on a fait à Moffat l'an dernier lors de l'affreuse saison 7, c'est de ne pas avoir écrit le personnage de Clara. Celle-ci était en effet réduite à une simple phrase d'accroche « The Impossible Girl » (à prononcer avec un air très mystérieux). Malin et à l'écoute (parfois trop) des fans de la série, Steven Moffat a rectifié le tir en transformant un personnage sous-écrit en personnage sur-écrit.
Cette année, ça déborde de Clara Oswin Oswald partout. Le personnage part tellement dans tous les sens qu'il parvient à être en contradiction avec lui-même un épisode sur deux (si ce n'est au sein d'un même épisode) : « Je veux quitter le Docteur ! » « Oh puis non ! » « Oh puis si ! ». Le décalage avec la Clara de la saison précédente reste encore préjudiciable. Moffat semble nous demander d'essayer d'oublier la première Clara et j'avoue que je n'y arrive pas. J'ai en outre vraiment du mal à savoir où Moffat veut exactement en venir avec Clara. Je pense qu'on aura des réponses lors du précédent épisode, mais en attendant, je ne suis qu'à moitié convaincu.
3. Le Docteur
Là aussi le changement est brutal : on passe d'un tonitruant Matt Smith bondissant à un sombre Capaldi grognon. Il faut avouer qu'il y a de quoi perdre le nord. On avait connu un changement inverse lors de la passation entre Eccleston et Tennant. Sauf qu'Eccleston avait commencé par un personnage sombre qui s'était adouci au fur et à mesure de son contact avec Rose. La transition avait été un peu plus fluide qu'ici et surtout elle était justifiée par le scénario. Là, rien ne nous indique le pourquoi de la raison de la « noirceur » du douzième Docteur. Il a appris que les Time Lord étaient vivants, il devrait être content, non ?
J'adore les aspects sombres des Docteurs (Tennant le faisait à merveille par exemple), mais Moffat ne peut pas s'empêcher d'en rajouter trois couches. C'est quasiment martelé trois fois par épisode à quel point il est trop dark. On en a encore un bel exemple à la fin de cet épisode lorsqu'il laisse tomber les enfants. Décidément, la subtilité n'est pas le point fort de cette saison.
4. Les effets spéciaux
Trois quarts des effets-spéciaux de cette saison sont moches. Depuis l'an dernier, le budget FX de la production n'a pas connu d'amélioration et on se fade des CGI tout vilains (la statue de l'amiral Nelson par exemple, dans cet épisode). Si ça reste mieux que l'an dernier (difficile de faire pire que Dinosaurs on a Spaceship), on reste bien bien loin du niveau de 2011 en terme de beauté picturale.
5. La lassitude et Steven Moffat
On touche ici à un point beaucoup plus subjectif : Doctor Who me lasse. Ça fait sept ans que je regarde la série et jusqu'à là, ça avait parfaitement été. Le concept même de la série garantie pourtant une absence d'ennui pour le spectateur puisque Doctor Who est la série de tous les possibles. Pourtant, cette année, j'ai une impression tenace de déjà-vu. Faisons donc une p'tite liste :
- Deep Breath ? C'est The Christmas Invasion mixé à du Madame Vastra et ses amis déjà vu mille fois.
- Into the Dalek ? C'est une revisitation de Dalek.
- Robot of Sherwood ? Du Gatiss en roue-libre comme il l'est trop souvent.
- Même Listen reprend le thème principal de Night Terrors.
- La fin de Time Heist évoque beaucoup Hide.
- The Caretaker puise énormément du coté de The Lodger et de Closing Time.
- Mummy of the Orient Express ? Un « Run the monster » comme la série en a fait dix mille (c'est le principe même de la série), sans que l'épisode n'apporte vraiment un quelconque grain de sel.
Les épisodes se suivent et ne se démarquent que peu du passé (sauf Flatine et Time Heist). Je crois que tout ceci reste un peu de la responsabilité de Moffat. Cela fait maintenant quatre saisons (plus épisodes spéciaux) que l'écossais est en charge de la série et soyons honnête, on commence à le connaître par cœur. Steven Moffat, scénariste depuis le milieu des années 90, tourne un peu en rond. On connait tous les tics, les punchlines, les objets et les gadgets de ce bon vieux Steven. Vous avez vu les épisodes comme moi, vous savez comment il fait. Pire encore (ou mieux?) avec Listen, il donne l'impression d'avoir prononcé la dernière punchline de son run : « Fear makes companions of us all ». L'impression reste très prégnante chez moi que la série qui a commencé en 2005 est bel et bien terminée. Listen a mis fin à la quête initiale et tous les épisodes qui ont suivi m'ont donné l'impression d'être de mauvais bonus Dvds.
Il reste à Steven Moffat deux épisodes pour conclure sa saison, deux épisodes qui feront peut-être passer mon avis sur celle de « Mouais bof... » à « C'était pas mal ! ». Je continue de penser que l'écossais a fait son temps sur Docteur Who et que je ne vois pas ce qu'il peut dire de plus sur ce personnage et la série (avec Sherlock) qui a fait de lui un homme célèbre. J'espère qu'il le sait et qu'il tirera sa révérence après l'épisode de Noël de cette année.
À la semaine où nous plongerons en eaux sombres !
PS : Et pour toi qui te dit « Et la critique de l'épisode, alors ? », voici une nuée de mots clefs : Un épisode vide extrêmement ennuyeux / Des enfants mal écrits qui jouent mal / Un happy-end débile et mal venu / Des incohérences à se taper la tête contre le mur / Des faux raccord à la pelle / La relation Clara-Danny écrite avec les pieds et qui tend vers de la redite / La thématique du conte qui arrive bien trop tard et de façon bien trop poussive pour sauver l'épisode (mais belle idée quand même).
Je t'embrasse.
Le Coin du Fan :
- Le Docteur mentionne que la tempête solaire est similaire à celle de Karabraxos.
- Le Docteur reprend les paroles de Clara dans Kill The Moon "I walk your earth, I breathe your air"
- A nouveau on trouve la présence du running-gag des "round things" dans le TARDIS.
- L'épisode semble donner une explication pour l'inefficacité du tournevis sur le bois : "This is a sonic screwdriver. It interacts with any form of communication you care to mention. Sadly, trees have no moving parts and don't communicate."
- Les mots du Docteur envers Clara lorsqu'il dit que l'espèce humaine oubliera rappelle le dialogue entre Seven et Ace dans Remembrance of the Daleks :
Doctor - Do you remember the Zygon gambit with the Lock Ness Monster ? Or the Yetis in the Underground ?
Ace - The what?
Doctor - Your species has the most amazing capacity for self-deception, matched by only its ingenuity when trying to destroy itself .
Ma note de l'épisode : 05/20