Tandis que Glee sombre continue dans sa troisième saison, ses créateurs Ryan Murphy et Brad Falchuk ont lancé le 5 octobre sur FX leur nouvelle série : American Horror Story. Elle raconte les événements pas très catholiques que va subir la famille Harmon après avoir emménagé dans un manoir hanté. Et pour le coup, ils n'ont vraiment, mais alors vraiment pas eu de chance.
Un univers très référencé
Après avoir vu le pilote, la série apparaît comme une sorte de condensé "fourre-tout" et pas très subtil de nombreux personnages/lieux/événements paranormaux issus des films d'horreur qui ont "bercé" (hum) notre adolescence. La série de FX participe ainsi à la mode des séries qui reprennent un genre très codifié, encore peu exploité dans les séries télévisées, c'était le cas récemment de The Walking Dead par exemple. Après les fans de films de zombies, c'est donc au tour des fans de films d'horreur d'être ravis. Car si American Horror Story ne mise effectivement pas sur l'originalité, elle est en tout cas très efficace et sans temps mort.
Cette efficacité passe par des références à gogo, ce qui à l'avantage d'intriguer le spectateur en même temps de réutiliser des recettes ayant déjà fait leur preuve. Du coup, en quarante-cinq minutes, on peut voir un sous-sol hanté, un fantôme, des apparitions, un psychopathe (voire plusieurs), un homme défiguré/possédé, ou encore un homme en latex. Ca fait beaucoup de monde dans un seul manoir !
Mais la référence qui reste la plus marquante est celle faite au chef d'oeuvre d'angoisse de Stanley Kubrick sorti en 1980 : Shining. En effet, l'état psychotique latent de Ben et ses troubles du sommeil font écho à la situation de Jack dans le film. L'homme défiguré, qui dit avoir entendu des voix, a assassiné sa femme qui lui disait qu'il travaillait trop ("All work and no play makes Jack a dull boy"), et vient compléter la référence. Il est également question dans l'épisode d'un rituel indien avec du sang, ce qui rappelle fortement l'évocation du cimetière indien dans le film, ainsi que l'image marquante du sang se déversant depuis un ascenseur. Enfin, et c'est probablement la référence la plus évidente, la présence des jumeaux (ils ont quand même changé le sexe, fallait pas faire du copier/coller non plus) est mise en scène de la même façon que dans le film de Kubrick. Manquait plus qu'une gâterie par un homme en peluche et le compte était bon. Ah mais en fait, ça y est presque : on remplace juste la gâterie par une mise en cloque et un homme en peluche par un homme en latex.
Une mise en scène cohérente
Sans égaler le brio de la réalisation de Shining et la direction d'acteur, il semble donc évident que Ryan Murphy a tenté avec American Horror Story de recréer l'ambiance oppressante du film. Il est donc naturel que cette ambiance se ressente également dans le montage et la bande son, même si la série se démarque un peu plus de ce côté-là.
Cette ambiance glauque ne plaira clairement pas à tout le monde, mais elle a au moins le mérite d'être cohérente de la première à la dernière minute. De ce point de vue, le générique est d'ailleurs très représentatif et donc très réussi. En effet, nous avons droit à une exploration d'une cave où sont exposées des babioles toutes plus bizarres les unes que les autres, dans laquelle viennent s'intercaler des images subliminales et des photos d'enfants (qui me font personnellement bien peur). Les violons stridents, les petits craquement faisant penser à des insectes et les grands coups de tubas rappelant un peu la bande sonore d'Inception viennent ajouter à l'ambiance déjà lourde. On est face à l'un des meilleurs générique de ces dernières années. Le générique de fin est lui aussi original à sa façon en intercalant à nouveau des images subliminales inédites ou extraites de scènes de l'épisode.
A "l'intérieur" de l'épisode, cet univers visuel et sonore se traduit par un montage très rapide et donc très décousu pouvant en destabiliser certains, ainsi qu'une bande sonore composée essentiellement de violons, pouvant rappeler celle de True Blood dans ses moments les moins romantiques.
Des personnages, avec de vrais morceaux de psychopathes dedans
Car oui, les personnages d'American Horror Story sont tout sauf ressemblant à ceux de Terra Nova (un exemple pris totalement au hasard). Ils ont tous un côté psychotique plus ou moins latent, du mari qui voit la gouvernante quarante ans plus jeune, à la femme qui reprend sa libido grâce à un homme en latex, en passant par l'adolescent criminel carrément psychopathe ou encore la voisine aux intentions douteuses. D'autant plus que Ben a l'idée remarquable d'exercer son métier de psychologue chez lui, dans son manoir. Tranquille quoi. Mais bon, il faut admettre que scénaristiquement ça permet pas mal de choses. Quant aux acteurs, ils sont vraiment convaincants, notamment Evan Peters (Tate) et Jessica Lange (Constance). Du coup, le psychopathe qui sommeille en moi est tout simplement ravi.
La série, malgré son abondance de "citations", semble développer également le thème de l'inconscient à travers les angoisses et les peurs les plus enfouies des personnages. A ce propos, je trouve incroyable à quel point un simple jogging arrive à faire passer les émotions d'un personnage dans de très nombreuses séries (et films). Pour revenir à l'inconscient, je trouve que malheureusement ce pilote peine à vraiment développer cet aspect, mais après tout ce n'est que le premier épisode et il s'agissait avant tout d'accrocher le spectateur.
Bon, sinon, je pourrais très bien vous parler de l'intrigue de l'épisode en soi, mais en fait on s'en fout. Dans American Horror Story, on a juste envie d'être intrigué, de frissonner. Et même si, pour être honnête, l'ensemble ne fait pas vraiment peur, la série est joussive et très addictive pour peu qu'on aime l'ambiance ou que le côté "fourre-tout" un peu démonstratif ne dérange pas trop. Car ce qui est important finalement dans une série, c'est d'être fasciné par l'ambiance. Et pour ma part, c'est le cas ici, même si je préfère Homeland ou Borgia. Pour le moment, je suis cette série avec grand plaisir, l'avenir nous dira si ce plaisir deviendra coupable ou non. American Horror Story n'est donc peut être pas la meilleure série de cette rentrée, mais assurément un OVNI télésivuel.
J'ai aimé :
- l'ambiance glauque mais tellement joussive
- le côté psychopathe des personnages
- le générique
- le rythme très soutenu
Je n'ai pas aimé :
- le manque de subtilité à la limite, encore que ça me gêne pas tant que ça
- le trop léger développement du thème de l'inconscient
Note : 15/20.