Critique : Better Call Saul 4.03

Le 13 septembre 2018 à 15:18  |  ~ 7 minutes de lecture
Où on lit une lettre et on pleure.
Par Koss

Critique : Better Call Saul 4.03

~ 7 minutes de lecture
Où on lit une lettre et on pleure.
Par Koss

Cela commence par une arnaque. Mais pas celle dont on a l’habitude : les hommes de Gus (Victor et Tyrus) font une mise en scène afin de faire croire à l’attaque des hommes de Salamanca. Les rôles s’inversent et là où Saul monte un coup, Gus s’improvise Sleeping Jimmy. Se faisant, il annonce les dizaines de plans et d’escroqueries qui seront mis en place dans Breaking Bad. Les hommes de Gus dirigent d’ailleurs Nacho de la même manière qu’un réalisateur en lui donnant des indications très précises sur ce qu’il doit faire et en lui faisant une dernière surprise afin que son jeu soit meilleur.

 

Car shooting

 

 

L’homme dans son garage

 

Les deux séries ont toujours eu cette faculté assez précieuse de montrer des hommes ou des femmes (mais il s’agit le plus souvent d’hommes) se pensant être en contrôle de la situation, alors qu’il y a toujours un élément qui vient gripper l’ensemble. C’est par exemple Hank qui trouve le carnet de Gale. Elles fourmillent de ce genre de petits détails en apparence qui viennent détruire des plans pensés longtemps à l’avance. Dans cet épisode, on voit un Gus triomphant qui vient voir Gale Boetticher (chouette retour, j’y reviens dans le Coin du Fan) juste après avoir reçu la confirmation de Juan Bolsa que l’approvisionnement pourra bientôt se faire aux USA. On voit ici l’intelligence extrême de Gus qui, à partir d’un élément imprévu (Nacho qui empoisonne Tio Salamanca) parvient à retourner la situation à son avantage et à s’affranchir du joug des mexicains. Sauf que… Sauf qu’en fait, se faisant, il se condamne à mort, puisque c’est par Gale que Walter travaillera avec Gus. L’échange des pilules par Nacho aura donc pour conséquence de tuer Gus. C’est précisément là que réside la beauté des deux séries qui fonctionnent comme un bloc unique de causalité. On pourrait d’ailleurs aller plus loin en soulignant que Nacho fait cela afin de protéger son père. Et tout commença ainsi par un vieil homme apeuré dans son garage.

 

 

La femme dans son salon

 

Malgré tout, l’épisode reste somme toute assez moyen. Plusieurs longueurs, mais jamais ennuyantes. La série fonctionne comme un bon morceau de jazz. Avec son rythme langoureux, son tempo lent et ses vrais morceaux de bravoure. Car même dans les épisodes plus faibles de la série, il y aura toujours quelque chose à retirer. Il faut attendre la fin pour que ce moment-là survienne. Kim finit par donner la lettre de son frère à Jimmy. On s’attendait tous à quelque chose d’affreux. C’est au contraire une lettre pleine d’affection que Chuck a probablement écrite pendant la période où Jim était l’homme du courrier chez HHM. Mais quand même... L’effet est surprenant. Kim pleure alors pour deux là où Jimmy semble plus intéressé par son bol de céréales. La tristesse de Wexler est d’ailleurs amplifiée par cette indifférence. On peut également imaginer que c’est Saul qui invente la lettre de Chuck qui était bien plus violente que celle qu’il lit, afin de ne pas faire de peine à Kim. Cela me semble peu probable, mais ça reste une piste intéressante tout de même.

 

Kim and Jimmy

 

Tout se termine par ce dernier plan parfait qui sépare la tête de notre héros en deux parties. C’est désormais acté : Kim est désormais la seule chose qui le rattache encore à son humanité. Cette saison risque probablement d’être celle où il va perdre la femme qu’il aime (lorsqu’elle va se rendre compte que Jimmy continue les arnaques ? Lorsqu’elle ne va plus pouvoir suivre le rythme de son client ?). Beaucoup de personnages de Better Call Saul sont condamnés de manière plus ou moins radicale : Chuck on l’a vu, Nacho (cela ne saurait tarder), Kim ou même Lalo (pas encore apparu dans la série). Le chemin de Jimmy le conduit à être reconnu par le chauffeur de taxi. La prévisibilité de la série souligne à chaque scène son aspect tragique et l’implacabilité du temps. Car, à demi caché derrière cette porte, Jimmy McGill peut choisir la voie de l’honnête travailleur, celle que son frère décrit pour lui dans sa lettre. Il n’en fera rien. Nous le savons et Saul au fond de lui aussi, tandis que la porte lentement se ferme.

 

Better Call Saul est une grande série parce que même dans les épisodes plus faibles, un élément de détail, une scène ou une chiquenaude finit par emporter le tout.

 

J’ai aimé :

 

  • Mike qui, en deux phrases, semble avoir tout compris de la situation : « Je ne pense pas que tu devrais faire ça » / « Je suis désolé pour ton frère ».
  • Le croisement des timelines : Saul qui sort de la clinique vétérinaire pendant qu’un des cousins y entre.
  • Le sourire de Gus quand il entre dans le community college pour voir Gale.
  • La critique toujours en creux du capitalisme. Il ne fait nul doute que la Mesa Verde Bank and Trust, si désireuse de grossir en 2003, fera une chute vertigineuse cinq ans plus tard lors de la crise des subprimes.
  • La dernière scène et le dernier plan, bien sûr.

 

Je n’ai pas aimé :

 

  • La sensation qu’on délaye parfois l’intrigue. La scène de l’opération de Nacho par le vétérinaire notamment.
  • Le manque relatif de charisme de Michael Mando qui joue Nacho. Même si j’aime beaucoup le personnage, l’acteur n’apporte que peu de densité à ce rôle.
  • Nous sommes à la saison 4 et je n’ai toujours aucune foutue idée de la relation précise entre Gus et Lydia. Il serait peut-être temps que cela arrive.

 

Ma note : 14/20

 

 

Le Coin du Fan :

 

  • On commence tout de suite par le plus gros morceau : Gale Boetticher. Là-dessus, il faut souligner le mensonge des deux showrunners qui nous avaient affirmé qu’un seul personnage de Breaking Bad (il ne s’est pas encore manifesté) ferait son apparition cette année. Le malheureux Gale, un des seuls personnages bons de Breaking Bad, mourra des mains de Jesse.

Il est intéressant de noter que Gale remercie chaleureusement Gus. Et pour cause : on apprenait ainsi dans l’épisode Hermanos de Breaking Bad que Gus avait versé une bourse d’étude au nom de Max Arciniega (son ami-associé-amant) et que Gale en avait bénéficié. Ce dernier recevra son bachelor de l’Université du Nouveau Mexique, en 1999.

Pour terminer sur Gale, l’acteur David Costabile a dû apprendre le difficile texte de la chanson The Element de Tom Lehrer, en deux jours entre des séquences de tournages de Billions, la série d’HBO où il a un rôle régulier.

 

  • Lorsque Gus traverse le community college, on entendrait quelqu’un dire « Jesse Pinkman ». Je vous laisse juger par vous-même. En 2003, Jesse a entre 19 et 20 ans, ce qui colle donc en termes de date.

 

  • Enfin, nous avons le droit à l’apparition d’Ira, joué par Franc Ross, qui aide Saul à voler la statue. Dans Breaking Bad, il était également le propriétaire de Vamonos Pest, la société de fumigation que Mike, Walt et Jesse avaient rachetée pour dissimuler leur business de drogues, sur conseil de… Saul.

 

Ira

 

À la semaine prochaine !

L'auteur

Commentaires

Avatar Lollie
Lollie
Bien qu'effectivement, ce ne soit pas mon épisode préféré, tu m'as donné envie de le revoir...:) (en revanche, c'est quoi cette histoire de prétendu non charisme de l'acteur de Nacho?? c'est un de mes perso, si ce n'est LE perso préféré, et l'acteur y est forcément pour qqchose..)

Avatar Lollie
Lollie
Plus un tt de même pour la critique..:)

Avatar pihug12
pihug12
> Dans cet épisode, on voit un Gus triomphant qui vient voir Gale Boetticher juste après avoir reçu la confirmation de Don Hector que l’approvisionnement pourra bientôt se faire aux USA. Je pense que c'est Juan Bolsa à la place de Don Hector. :)

Avatar Gizmo
Gizmo
Moi aussi j'aime beaucoup Michael Mando, il donne un certaine fragilité à Nacho qui le rend très attachant.

Avatar Lollie
Lollie
EXACTEMENT, Gizmo.. Merci! :)

Avatar Koss
Koss
Merci pihug12. Je corrige cela. Quant à Mando, j'aime bien l'acteur, mais son regard reste un peu vide pour moi.

Avatar Jo_
Jo_
Est-ce que ce n'est pas le but recherché, justement ?...

Avatar Koss
Koss
On se dirige tout droit vers un point Bernard là.

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