Ce qu'il y a de bien avec l'épisode de Noël de Doctor Who, c'est sa régularité : tous les ans, sous le sapin, un joli cadeau nous attend. Parfois, malheureusement et malgré un bel emballage, la tante Ilda vous offre un cadeau un peu pourri. Cette année, Doctor Who, c'est ce cadeau. Celui dont personne ne veut.
Sideckick, Clouds and Punchline
Comme l'an dernier, l'épisode commence très mal. Depuis la disparation des Pond, le Docteur se refuse d'intervenir dans les activités terrestres. Ayant planté son Tardis dans l'Angleterre victorienne, il reste dans les nuages. Seul.
À bien y réfléchir, on dispose là d'une assez bonne idée de départ qui aurait pu fonctionner si elle avait été correctement exploitée. Le problème avec une série aussi vieille que Doctor Who, c'est que certaines situations ont tendance à se répéter. Surtout lorsqu'il s'agit de faire le deuil des compagnons. Que ce soit dans l'épisode Rose ou Runaway Bride, à chaque fois le Docteur est triste. Et nous aussi, à force de voir les mêmes mouvements se répéter. L'approche qu'a Steven Moffat de ce deuil n'est ni originale, ni particulièrement passionnante. La frustration du spectateur nait surtout de la sensation que l'exploit de proposer quelque chose de neuf n'est pas loin. L'idée d'un escalier en colimaçon perdu dans les nuages montre la tentative de Moffat d'innover... Avant qu'il ne se replie sur ses habituelles techniques.
Je n'aurais jamais cru écrire cela un jour mais le showrunner anglais commence à m'agacer avec ses tics d'écritures. La caractérisation des personnages en est le plus parfait exemple. On passe l'épisode à se demander pourquoi et comment ils sont là (j'avais manqué la résurrection de Strax, pour ma part) avant de se rendre compte qu'ils ne reposent que sur du vide. Leur écriture est basée sur une seule idée, avec dans l'ordre : Starx l'idiot drôle, Vastra la mystérieuse détective et Jenny heu... la lesbienne sympa ? C'est franchement désolant de voir Moffat réduit à de pareils raccourcis bancals. L'accumulation de punchlines en mode automatique peine à masquer la faiblesse du scénario. Au bout du compte, l'intrigue ne décolle jamais vraiment et le spectateur plonge dans un ennui assez profond.
Clara Who ?
Comme l'an dernier avec l'apparition surprise des Ponds, l'épisode aurait très bien pu contenir ce petit quelque chose qui ne fait jamais perdre confiance dans la série. Cette année, ce truc en plus est tout trouvé : Clara Oswin Oswald est la nouvelle compagne. Mieux, elle est « the woman who died twice ».
Ah, c'est sûr que dit comme ça, ça claque pas mal. Mais sache que je t'ai vu venir de loin Steven et qu'encore une fois, tu me l'a fait à l'envers. Dans le cerveau de l'anglais, on imagine aisément la mécanique « Bim, nouveau personnage. Bim, une idée. Bim, une punchline ». Et caetera.
Cette fois, je ne marcherai pas, parce que je sais où tout cela va nous mener. Je continue de penser que l'idée de faire une septième saison est une mauvaise idée. Ces épisodes qui s'accumulent depuis septembre n'ont rien de commun avec ceux qui vont être diffusés au printemps. Si les premiers nous offraient un pot de départ (raté) des Ponds, les seconds se présentent comme une longue introduction aux cinquante ans de la série et la mort-résurrection du Docteur.
Pour combler nos attentes entre-temps, Steven Moffat déballe un seul et unique fil rouge : Clara Who ? Qui est vraiment cette compagne et pourquoi peut-elle revivre deux fois ? Le problème ici, c'est encore une fois celui de la redite. Construire un mystère autour d'un compagnon du Docteur a déjà été fait deux fois par Moff : River Song et Amy Pond. Si la première a été utilisée jusqu'à l'écoeurement, la seconde n'a pas débouché sur grand-chose. Je continue de croire que quelque chose de « bien plus grand » était prévu pour la rouquine (il suffit pour cela de revoir The Eleventh Hour), mais que l'absence de temps et d'idées ont débouché sur une solution bâtarde. J'espère de tout coeur que Clara ne partira pas dans la même direction, mais rien ne me permet d'avoir confiance dans ce personnage.
Si j'avais adoré le personnage dans sa première apparition, tout chez elle, ici, m'a agacé. Clara est clairement too much. Tout dans son habitude, ses gestes, ses paroles et son baiser au Docteur (WTF ?) sonnent faux. Si j'avais une idée précise de ce que pourrait être le compagnon parfait pour Eleven, c'est immédiatement à l'over the top Clara que j'aurais pensé. Elle est exactement ce que Moffat veut. Elle est un miroir parfait du Docteur !
Or, la perfection ne m'intéresse pas. Les compagnons qui m'ont toujours le plus fasciné (Wilfried, Donna et Rory) sont précisément ceux qui avaient le plus de failles dans leur histoire personnelle. Avoir un double du Docteur du Tardis ne me parait nullement excitant. Quant à son intrigue, j'avoue que je m'en fous pas mal, Steven Moffat ayant depuis longtemps dépassé les bornes du retournement improbable de dernière minute.
The Snowmen pose les bases de ce que sera l'introduction à LA saison que tout le monde attend, sans se montrer absolument convaincant. Il faudra bien le talent conjugué de Mark Gatiss et de Neil Gaiman pour enfin apporter quelque chose de neuf dans la série. Car franchement, entre la réutilisation d'idées usées et d'anciens personnages et le recyclage de thématiques, depuis combien de temps Steven Moffat n'a-t-il pas pris de véritables risques avec « Doctor Who » ?
Bonus - le coin du fan :
- 1) La menace de l'épisode « The Great Intelligence » était déjà apparue dans deux épisodes classiques de Doctor Who : « The Abominable Snowmen » et « The Web of Fear ». Dans ce dernier épisode, le Docteur combattait l'ennemi dans le métro de Londres ; métro que le Docteur n'a de cesse de pointer du doigt dans cet épisode de Noël. Se faisant, Steven Moffat crée une sorte de préquel à ces épisodes classiques et complète la trilogie.
- 2) La seconde référence est faite pour les fans de la pause en milieu d'épisode comme moi. Ainsi, sur la tombe de Clara apparait sa date de naissance : 23 novembre 1866. Et le 23 novembre est la date de diffusion du tout premier épisode de Doctor Who. Joli clin d'oeil.
J'ai aimé :
- Loin de l'aspect « visite à l'intérieur d'un estomac » du précédent, il est vraiment pas mal ce nouveau générique.
- Le Tardis a un escalier en colimaçon ! Sur un nuage !
Je n'ai pas aimé :
- Le sur-abus de références méta : trois « The Winter is coming », c'est sympa, cinq « Doctor Who ? » beaucoup moins.
- Un épisode familial trop infantilisant pour être pris au sérieux, ne serait-ce que cinq minutes.
- Strax, Vastra et Jenny : et si quelqu'un pouvait m'expliquer votre utilité précise ?
Ma note : 09/20.