Critique : Doctor Who (2005) 11.01

Le 27 octobre 2018 à 17:58  |  ~ 6 minutes de lecture
Doctor Who X Predator.
Par Koss

Critique : Doctor Who (2005) 11.01

~ 6 minutes de lecture
Doctor Who X Predator.
Par Koss

Le renouvellement est l’essence même d’une série comme Doctor Who. Son socle même. Aussi bien dans la caractérisation de son personnage principal que dans la création de la série. Car au fond, tout peut être un nouveau point de départ : une nouvelle saison, un nouveau ou une nouvelle compagnon ou compagnonne, un nouveau tournevis, un nouveau showrunner, et donc une nouvelle Docteur. C’est un reboot constant, tout pile dans l’esprit actuel des franchises cherchant un nouveau souffle. Vieille de plus de cinquante ans et déjà novatrice. À l’exercice périlleux du "nouveau départ" ultra rodé par la série (l’ancien showrunner avait pratiqué l’exercice pas moins de trois fois), Chris Chibnall s’en sort… Pendant trente minutes.

 

 

Gender fluid

 

Il faudra penser un jour à remercier les gens qui se sont occupés du casting suivant les époques de la série. À une exception près, ce fut un sans-faute. Jodie Whittaker ne joue pas le Docteur. Elle est le Docteur, et ce dès le moment où elle se relève. On touche ici du doigt une appréciation plus subjective que toute autre, mais son accent, son phrasé et ses mimiques ont immédiatement fonctionné sur moi, probablement plus d’ailleurs que Capaldi n’a jamais réussi à le faire (là aussi, à une exception près). Il est intéressant de constater que Yaz, qui incarne pourtant la figure de l’autorité (une première dans la série post-2005), ne remet jamais en doute le fait de suivre cette femme bizarre qui s’agite dans tous les sens et qui raconte n’importe quoi. Le spectateur ne doute jamais un seul instant que cette nouvelle personne ne peut être autre chose que le Docteur, tel qu’on l’a toujours connu et ce peu importe son genre, sa couleur de peau, sa sexualité, etc. Alors forcément face à tant de nouveauté, elle a encore du mal à s’ajuster et plusieurs épisodes seront nécessaire pour qu’elle trouve sa véritable personnalité (il en a toujours été plus ou moins ainsi avec la série). De fait, elle incarne l’humanité dans sa diversité. Sans TARDIS et capable d’improviser un nouveau tournevis sonique au fond d’un garage, elle montre ainsi que tout le monde peut être le Docteur. Il suffit juste d’avoir des sous-vêtements farfelus. Dans une Angleterre post-Brexit repliée sur elle-même, ce message d’ouverture et la diversité des compagnons sonnent comme un beau message d’espoir.

 

La nouvelle Docteur et ses compagnons

 

Dans une époque où les extrêmes et le réchauffement climatique ne cessent de s’accentuer et où les blockbusters sont au mieux, des replis nostalgiques, cyniquement post-modernes ou au pire, sombres, le show immortel se pose en contre-point parfait. Tout cela est très bien aidé par la réalisation et l’immense travail du chef opérateur. Ce n’est pas compliqué : Doctor Who n’a jamais été aussi bien filmée. C’est beau et ce, à tous les plans. La lumière joue d’ailleurs un rôle très particulier au sein de l’épisode, s’échappant du corps du Docteur, elle est la présence rassurante qui permet à chacun de se dépasser (Ryan et son vélo), de s’affirmer (Yaz et sa hiérarchie) et de dépasser son deuil (un des derniers plans de l’épisode où ils prennent le thé tous ensemble).

 

 

Narration pas fluide

 

Avec une telle base technique, la série part sur les chapeaux de roue. Les trente premières minutes sont entraînantes et tout s’enchaîne à merveille : le vélo, la rencontre avec l’oignon géant bleu, le train, la chute du Docteur, etc. Au bout de cette période de temps, le script commence malheureusement à patiner. Les personnages se retrouvent dans plusieurs endroits à la suite, sans que des liens soient vraiment faits entre eux. On assiste à de pures scènes de remplissage (le kebab) ou à de la vraie feignantise de scénario (le frère de la sœur disparue qui laisse une vidéo sur son ordinateur). L’ensemble dure un peu plus d’une heure, là où il y avait probablement du contenu pour une bonne quarantaine de minutes. C’est d’autant plus problématique que le scénario est un copié-collé de Predator 2. Le costume de la créature y fait d’ailleurs immédiatement penser.

 

La nouvelle Docteur

 

Cette année et pour la première fois depuis 2005, le show dispose d’une "writers room" à l’américaine. Les deux précédents showrunners pitchaient une idée et demandaient aux différents scénaristes de développer. Pour cette saison 11, Chris Chibnall a décidé de travailler plus en collégialité, n’hésitant pas à faire partager ses idées avec d’autres personnes. Pas un membre de cette équipe n’a donc vu le parallèle avec le film de Stephen Hopkins. Pour un épisode censé incarner le renouveau, cela apparaît comme quelque peu contradictoire. Malgré ces soubresauts et son incapacité à tenir son script jusqu’au bout, Chibnall délivre une belle idée à la fin avec la mort de Grace. Même si celle-ci avait été spoilée par l’intégralité des bandes-annonces de la saison 11 (où elle n’apparaissait tout simplement pas), elle construit le groupe des trois compagnons autour d’une histoire commune. Mieux, elle les fait directement se confronter à ce que tout compagnon qui voyage (trop) longtemps avec le Docteur finit par croiser : la mort. De ce fait, on peut espérer par la suite de beaux développements sur ces trois personnages, qui restent encore dans une relative zone de flou narratif.

 

Scénariste moyen et showrunner pas encore confirmé, Chris Chibnall parvient pourtant, avec l’aide précieuse de Jodie Whittaker, à faire ressortir ce qu’il y a de mieux dans la série et qui lui manquait cruellement depuis tant d’années : l’espoir. Mais ne nous trompons pas, Steven Moffat aurait sorti un script comme celui-ci, nous lui serions tous tombés dessus. À raison.

 

J’ai aimé :

 

  • Jodie Whittaker.
  • La lumière, vectrice de narration.
  • Graham, directement mon compagnon préféré des trois.
  • Les trente premières minutes.

 

 Je n’ai pas aimé :

 

  • Les trente dernières minutes.
  • Predator cette semaine. Perdus dans l’espace, la semaine prochaine. Et après ?
  • Le final un peu ridicule sur les grues.
  • No more Nardole.

 

Ma note : 14/20

L'auteur

Commentaires

Avatar OmarKhayyam
OmarKhayyam
"Scénariste moyen et showrunner pas encore confirmé, Chris Chibnall parvient pourtant, avec l’aide précieuse de Jodie Whittaker, à faire ressortir ce qu’il y a de mieux dans la série et qui lui manquait cruellement depuis tant d’années : l’espoir. Mais ne nous trompons pas, Steven Moffat aurait sorti un script comme celui-ci, nous lui serions tous tombés dessus. À raison." La grosse différence entre Chibnall et le Moffat en bout de course c'est peut-être que Chibnall malgré tout est prometteur sur pleins d'aspects (l'écriture des persos), et qu'il peut encore s'améliorer comme Davies en son temps Très bonne critique sinon :)

Avatar OmarKhayyam
OmarKhayyam
* "No more Nardole." Graham c'est Nardole qui s'est régénéré

Avatar Koss
Koss
Oui, complètement d'accord. Chibnall a une grosse marge de progression. "Graham c'est Nardole qui s'est régénéré " Ptain, mais oui !

Image Doctor Who
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