Hier encore, j'avais 20 ans
Les acteurs nous l'ont dit et répété à longueur d'interview, le sujet de la série, c'est la crise de la quarantaine, et l'amitié masculine. Et au vu du premier épisode, on se demande bien comment la seconde peut survivre à la première.
Car même sous le soleil, même dans des décors de rêve, la quarantaine a l'air d'un cap difficile à passer pour Bax (John Simm), Quinn (Philip Glenister), Rick (Marx Warren) et Woody (Max Beesley).
Ces quatre-là se connaissent depuis un bail, depuis l'enfance apparemment, et ils se retrouvent pour passer un long week-end chez le cinquième élément du groupe, Alvo (Ben Chaplin), qui vient de prendre une retraite anticipée au soleil.
Tout ce qui nous sépare
Ce qui pourraient être de joyeuses retrouvailles se révèle assez vite pénible. Car ces cinq-là ne sont plus vraiment sur la même longueur d'onde. Les années ont apporté leur lot de frustrations, de non-dits, de regrets. Et ont visiblement séparés les personnages. C'est bien fait, bien campé, et le malaise s'installe rapidement. Quoi qu'il fassent, les personnages n'ont jamais l'air à l'aise, il y a en permanence, entre eux, une espèce d'agressivité contenue, et les acteurs le rendent parfaitement. Quelque chose va exploser, on ne sait pas quoi, on ne sait pas quand, mais de toute façon, le séjour va mal se passer.
En revanche, et c'est là que ça pêche, on en sait peu sur la façon dont ces cinq-là sont devenus amis. Sur ce qui a pu, un temps, les rapprocher, et qui justifie leur présence ici. En même temps, ça n'est pas le sujet de la série de montrer à quel point ils ont changé. Le but est plutôt de nous montrer comment ils vont se débrouiller face à une situation inattendue, compliquée.
Installer le décor
SPOILER. Mais pour ça, il faudra attendre le prochain épisode. En effet, ces premières 45 minutes sont véritablement un épisode d'exposition, dans lequel il ne se passe pour ainsi dire rien, excepté dans les dernières minutes, où le rythme s'accélère et où l'on assiste successivement à un déballage de linge sale entre amis, une intrusion de Tony Blair nain et une exécution en bonne et due forme. Mais avant cela, juste des vacances à l'arrière-goût de plus en plus amer.
FIN SPOILER
Alors d'où vient la tension qui baigne le premier épisode ? D'abord de la première scène, qui nous laisse clairement entendre que quoi qu'ils fassent, les personnages vont se retrouver jusqu'au cou dans les emmerdes. Une scène qui a le mérite de les mettre à nu d'emblée, lorsqu'ils adressent ce que l'on suppose être un dernier message, via la caméra, aux personnes qu'ils aiment. Une bonne idée de les confronter à eux-mêmes avant d'entamer un long flash-back, qui durera probablement quatre épisodes, et qui nous les montre ensuite avec toute leur couche de mensonges et de vernis social.
Il y a ensuite cette espèce de menace permanente qui plane au dessus de l'ennui des personnages, l'alcool, qui coule à flots et n'est plus vraiment festif, la sonnerie du téléphone, d'autant plus stridente que le réalisateur ménage ses silences et s'abstient de noyer l'épisode sous la musique, l'interprétation de Ben Chaplin enfin, qui est tour à tour un Alvo séduisant, menaçant, grossier, généreux, inquiet et laisse ses invités (et nous) dans l'incertitude.
La réalisation est soignée et installe un vrai malaise. Et au final, la piscine apparaît plus comme une tombe potentielle que comme un luxe, le soleil écrase plus qu'il n'éclaire, et les montagnes même semblent hostiles aux Anglais paumés sur cette île.
Bref, un réalisateur qui sait prendre son temps pour pourrir celui de ses personnages, ce n'est pas si mal. Reste à voir maintenant comment il va gérer l'arrivée de l'action dans l'épisode suivant.
Casting cinq étoiles
Un dernier mot, celui-là sur les acteurs. C'est pour eux que j'ai entrepris de regarder la série, et je ne le regrette pas. Philip Glenister, dans un registre totalement différent de Life on mars, prend encore toute la place quand il est à l'écran, même quand il traîne une carcasse fatiguée et un visage désabusé. Ben Chaplin est vraiment magnifique en grand seigneur pris au piège. SPOILER Et c'est bien dommage qu'il disparaisse FIN SPOILER. Marc Warren est parfait en ado attardé. Quant à John Simm, si son personnage ne lui a pas encore donné tout le loisir de s'exprimer, j'attends de grands moments des prochains épisodes.
Bref, une bonne note, pour une ambiance parfaitement installée, et un premier épisode qui m'a donné envie de voir la suite.
Note : 14/20