Critique : Suburgatory 1.14

Le 19 février 2012 à 12:38  |  ~ 7 minutes de lecture
Un épisode de Suburgatory réussi qui confirme l'évolution intéressante du show vers une forme plus aboutie.
Par sephja

Critique : Suburgatory 1.14

~ 7 minutes de lecture
Un épisode de Suburgatory réussi qui confirme l'évolution intéressante du show vers une forme plus aboutie.
Par sephja

L'esprit de compétition

Surnommé « The Body » par ses camarades de classe grâce à ses performances de lutteur et son physique d'athlète, Ryan Shay redescend brutalement à terre après une défaite et une blessure le bloquant dans un fauteuil roulant. Peu adepte du sport, Tessa jette un regard cynique sur cette fascination de Chatswin pour le corps, mais choisit de se présenter contre deux de ses camarades pour devenir la représentante des élèves après avoir appris leurs intentions de doubler le nombre d'heures de gymnastique.

 

Résumé de la critique

Un épisode agréable que l'on peut détailler ainsi : 

  •  une intrigue chez les Shays très amusante
  •  une storyline chez les Altman agréable 
  •  des dialogues qui jouent le jeu de l'incompréhension
  •  une histoire avec Dallas qui fait tâche

 

 

L'âme des guerriers 

Si l'épisode est à classer parmi les meilleurs de la saison, c'est avant tout grâce à la famille la plus allumée qui soit, les Shays, très bien mis en avant dans cet épisode. L'idée de faire de Ryan un lutteur est plutôt bien vue et la façon dont Anne Gasteyer se moque de la conception de Georges de la réussite pose parfaitement la philosophie de cette famille. Il s'agit clairement ici d'un esprit de compétition exacerbé et pour Fred et Sheila, une conviction qu'une bataille s'achève toujours par la reconnaissance du vainqueur et le désaveu du perdant, imposant un chantage affectif poussé à son maximum à ces enfants. 

Une fois Ryan blessé, les parents se retournent vers Lisa qui devient pour la première fois le centre de toutes leurs attentions. L'occasion d'une métamorphose qui permet à Allie Grant de nous offrir un numéro très amusant, oubliant son personnage de fille timide en affirmant une autorité nouvelle qui montre sa capacité à sortir du schéma habituel de la fille impopulaire. A l'opposé des Altman, les Shays incarnent une Amérique de la gagne, plus obsédé par les trophées et la popularité que par le mérite, fondant leur orgueil sur l'idée que ce qui ne tue pas rend plus fort.

C'est ce culte du corps que la série aborde sans cynisme, où la souffrance est synonyme de rédemption et où le courage est représenté par le besoin de dépasser ces limites. Une caricature fine et intelligente de cette course à la performance dans un monde où les perdants sont seuls et les gagnants revêtent le costume d'un super-héros invincible. Moins cynique et plus attachée à ces personnages secondaires, Suburgatory s'offre un joli parallèle entre les Altman et leurs voisins qui dépasse enfin le cadre restreint de la relation citadin - banlieusard. 

 

L'instinct de survie 

A l'opposé des Shays, les Altman incarnent une vision de l'existence tournés vers l'épanouissement personnel, cherchant dans la vie la satisfaction des plaisirs non mesurables. Le temps n'est pas du tout le même et le silence y occupe une place singulière, toute décision devant être le fruit d'une mûre réflexion. La performance apparaît comme surévaluée et l'existence se définit par la solidité d'une routine, privilégiant le cerveau au culte du corps. Une bonne idée, mais qui va trouver une expression discutable avec le désir de Tessa de se présenter à la présidence du conseil des élèves.  

La séquence du débat, en dépit de son côté totalement décalé, ne fonctionne pas vraiment, malgré les tentatives flagrantes des auteurs de lorgner vers un humour plus absurde à la Community. Si Rex Lee fait un personnage comique assez réussi, la position de Tessa ne parvient pas à prendre du sens, laissant l'impression d'un show qui cherche à opposer vainement les intellectuels avec les sportifs. Une vision simpliste abandonnée à temps pour revenir à une idée plus porteuse, à savoir pousser Tessa à cesser de se plaindre et à faire l'effort de triompher de ses peurs. 

L'important n'est pas la victoire aux yeux des autres pour les Altman, mais plutôt la satisfaction de mener des combats personnels contre leur propre démon. Une bonne idée qui change de l'habituel dynamique du show tournant autour de l'opposition entre Chatswin et les Altman. Ici, ce sont deux philosophies totalement opposées qui s'affrontent, donnant lieu à plusieurs dialogues particulièrement réussis. 

 

 

Dialogue de sourds autour d'un lac 

Pour exploiter parfaitement cette opposition entre les Shays et les Altman, la série va proposer plusieurs conversations surprenantes et particulièrement réussies entre Ryan et Georges. Cette amitié singulière va prendre du sens grâce à la réaction méprisante d'Anna Gasteyer à l'égard de la philosophie de l'épanouissement personnel de Georges, le poussant à prendre en sympathie ce fils rejeté. Essayant de lui venir en aide, il tente de lui inculquer l'importance de cultiver une singularité, d'apprécier le silence au travers d'une discussion avec un peintre totalement surréaliste. 

C'est la séquence réussie de l'épisode où la série atteint un niveau d'abstraction surprenant, proposant un dialogue de sourds particulièrement bien écrit. La façon dont Ryan comprend totalement de travers les mots de Georges est un vrai régal, scène largement supérieure aux standards la série. Un moment qui marque, espérons-le, un tournant dans la saison, poussant Suburgatory vers un humour absurde qui se charge de sens et sort de l'habituel opposition clichée entre la banlieue et la ville. 

Mais la scène la plus marquante reste celle où s'affronte Anna Gasteyer et Jeremy Sisto autour d'une fleur, la voisine voulant tuer ce qu'elle apparente à une mauvaise herbe là où Georges souhaite lui laisser sa chance. Les deux acteurs sont formidables et voir la comédienne jouer avec des ustensiles coupant possède un effet angoissant indéniable. Mieux gérée, l'opposition entre les Altman et les Shays prend une nouvelle dimension avec cette intrigue, donnant tout son sel à cet épisode. 

 

Une troisième partie délaissée

L'épisode serait donc parfait si la série n'avait pas sacrifiée la troisième storyline autour de Dallas et la célébration de sa situation de célibataire. Si les scènes entre Alan Tudyk et Cheryl Hines sont amusantes, elles laissent une impression d'inachevée, cette intrigue n'étant pas du tout exploitée dans la suite de l'épisode. Si l'idée de souligner le fait que Dallas fait une crise d'hystérie est particulièrement intéressant, l'absence de conséquence à son blanchiment des dents donne le sentiment d'une simple anecdote sans lien avec le reste de l'épisode. 

En conclusion, une histoire réussie grâce à une confrontation très intéressante entre les Shays et les Altman sur la philosophie de l'existence, entre culte du corps et importance donnée à la recherche du soi. Les séquences entre Ryan et Georges sont particulièrement drôles, dialogue de sourds délicieusement absurde sur le sens de la vie. Dommage par contre que les storylines de Tessa et Dallas ne soient pas au niveau du reste de l'épisode, intrigue trop anecdotique pour convaincre vraiment. *

 

J'aime :

  •  les dialogues entre Georges et Ryan
  •  l'humour absurde bien maîtrisé 
  •  la scène de la fleur entre Anne Gasteyer et Jeremy Sisto 

 

Je n'aime pas : 

  •  l'histoire de l'élection qui avorte en cours de route 
  •  l'intrigue de Dallas trop anecdotique

 

Note : 13 / 20 

Un épisode référence qui prouve que Suburgatory est capable de proposer un humour d'une finesse largement supérieure à ce qu'elle nous a proposé depuis le début de l'année. Malheureusement, certains storylines comme celle de Dallas sont assez peu exploitées et donnent un ensemble assez inégal. 

L'auteur

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Image Suburgatory
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