Symphonie minimaliste
Martin Bohm tente d'utiliser la tablette graphique de sa belle-soeur pour aider son fils à communiquer, mais celui-ci ne semble s'intéresser qu'à utiliser une application transformant une suite de chiffres en composition musicale. Avec Clea, il envisage de visiter l'appartement d'Arthur, espérant pouvoir trouver ainsi les réponses concernant la mystérieuse chambre six. Seulement, Jake est percuté par une passante qui lui renverse son café dessus, obligeant son père à le ramener à la maison.
Résumé de la critique
Un épisode correct que l'on peut détailler ainsi :
- un démarrage poussif qui installe un faux rythme gênant
- une progression intéressante de la relation entre Martin et Jake
- une série naïve aux frontières de l'angélisme béat
- une série en début de rémission
Une mécanique difficile à maîtriser
Pour cet épisode de Touch, Tim Kring fait appel à un de ses partenaires habituels sur Heroes et Crossing Jordan, à savoir Rob Fresco qui va avoir la lourde tâche de relancer une mécanique à l'arrêt. Le démarrage est de ce point de vue assez désastreux, le seul choix judicieux étant de sortir Clea de son rôle de psychologue pour l'intégrer à l'intérieur de l'intrigue sur Teller. Retrouvant sa liberté, la jeune femme cherche encore sa place au sein de la série, remplaçant sans convaincre un Danny Glover dont l'ombre est encore bien présente, mais commence à s'atténuer petit à petit.
L'exposition des différentes storylines du jour est loin d'être concluante, la faute à l'absence d'incarnation de cette vendeuse d'instruments de musique qui occupe pourtant une place centrale dans l'épisode. Construire une intrigue sur l'interconnexion entre les individus tout en délaissant le point central de ce réseau paraît un choix plutôt discutable et va entrainer un gros problème de fluidité dans les transitions d'une intrigue à l'autre. Reprenant le principe originel de la série, Rob Fresco propose une intrigue où la communication occupe une place centrale, opposant au langage écrit l'universalité de la musique où le discours s'inscrit uniquement dans le domaine du sensible.
Petit à petit, le scénario trouve sa dynamique et fournit un mélodrame plaisant, empesé par une structure de base toujours aussi lourde qui semble atteindre ses limites. Le moment parfait pour Tim Kring de repenser la structure de son show, obstacle récurrent à des intrigues plutôt sympathiques, même si celle-ci offre un twist un peu facile à l'image d'une série qui assume un peu trop sa profonde naïveté. Victime de son ambition, l'intrigue de la chambre 1188 ne parvient pas à convaincre, les auteurs hésitant sur l'orientation à donner à une histoire beaucoup trop vague.
Une relation père - fils singulière
Depuis le début de Touch, la question se pose souvent de découvrir ce qui pousse Martin Bohm à poursuivre sa lutte, son fils restant hermétique à la moindre de ses tentatives pour établir le contact. C'est sur cette relation que Rob Fresco va imposer une idée assez bonne en rétablissant un dialogue silencieux, Jake semblant comprendre les intentions de son père. Loin d'être le boulet qu'il fut à plusieurs reprises, il reprend un poste de chef d'orchestre, poussant son père comme un bon samaritain en réunissant les destins brisés et en aidant ceux qui se sont perdus de vue à rétablir le contact.
Et pourtant, Martin Bohm s'avère être particulièrement égoïste, accomplissant ses missions dans le seul d'obtenir l'attention de son fils, cherchant à gagner l'affection de son fils pour le pousser à établir le contact avec lui. Son refus d'assumer la différence de son fils, sa volonté de pousser le jeune autiste à s'exprimer lors de dialogues de sourd était un des défauts de ce début de saison, entraînant une frustration qui ruinait la crédibilité du show. La mise en évidence de ce comportement apporte ici une vraie respiration, obligeant le père à trouver seul le sens des messages laissés par Jake, brisant le fantasme ridicule d'une possible normalisation de leur relation.
Il apparaît alors que la communication n'est pas coupée entre le père et le fils Bohm, prenant juste des canaux différents, opposant l'universalité de la musique aux limitations de la langue. Une idée qui relance l'épisode, fournissant un deuxième acte plus dynamique où la relation entre le fils et le père retrouve son mystère, preuve que Touch n'est pas une série qui gagne à vouloir tout expliquer. Maintenir une dose d'étrange, priver le spectateur de certaines clés, jouer sur l'effet de surprise, voilà les ingrédients manquants d'un show qui retrouve ici un début de second souffle.
Happy World
Série utopiste et volontairement positive, la série de Tim Kring affirme son identité mélodramatique, affichant un goût marqué pour une certaine morale. Essayant de guérir les blessés de la vie, Jake est en mission, posant la question du bonheur qui se cristallise ici autour d'une famille qui se recompose devant nos yeux, la reformation de la cellule familiale devenant à plusieurs reprises le but à atteindre. Très naïve, la conclusion est à l'image d'un show qui refuse le drame, proposant une vision du monde à l'écart de la réalité, où le bonheur n'est qu'une affaire de connexions et de rencontres.
Le monde de Touch est un univers très positif et trop léger où l'humanité s'exprime positivement par le partage, univers interconnecté à la toile mondiale du monde dont le jeune autiste serait un des réparateurs. Sa rencontre avec le meilleur ami d'Arthur Teller va amener à l'évocation des 36 Justes, reliant la fascination pour les nombres des scénaristes avec celle de la religion juive, très friande de numérologie, en particulier les 72 lettres du nom de Dieu. Martin Bohm deviendrait alors un tsaddiq, rendant la référence à la Torah plutôt amusante tant que les auteurs se limitent à l'exploiter au premier degré.
Le vrai problème avec cette série, c'est qu'elle repose sur un concept tellement bancal qui lui est quasiment interdit de se prendre au sérieux. Toujours à la limite du ridicule, le show de Tim Kring tient à flot grâce à ses interprètes et à son caractère particulièrement inoffensif, divertissement léger et légèrement coupable. Basculer dans le fantastique avec Amelia serait une façon d'affirmer un univers imaginaire, coupant court aux problèmes de crédibilité du show, petite trahison avec le plan de départ qui apparaît de plus en plus indispensable.
Des raisons d'espérer
Autant le dire après le dernier épisode, je me faisais beaucoup d'inquiétude pour Touch, tant la mort d'Arthur Teller semblait condamner le show à sombrer dans le pathétique. Si l'épisode confirme en partie cette sensation, il vient aussi lancer deux pistes intéressantes qui viennent donner un peu d'espoir pour la suite, à savoir le changement dans la relation de Martin Bohm à son fils et le virage du récit vers le fantastique que le show hésite à réaliser. En donnant corps à Amélia, les auteurs inséreraient un peu de mystère dans un show qui en a terriblement besoin, les petites intrigues mélodramatiques donnant un spectacle à la limite du pathétique.
En conclusion, un épisode qui démarre très mal, reprenant tous les défauts de l'épisode précédent tout en cherchant à lancer une intrigue très longue à mettre en place. Mais, grâce à quelques bonnes idées, le show retrouve une partie de son charme, même si l'allusion aux 36 Justes peut prêter à sourire. Très utopique par principe, celle-ci fournit un mélodrame inoffensif et bien pensant plutôt gênant, soulignant les gros problèmes que représente la structure narrative particulièrement bancale du show.
J'aime :
- que Martin arrête de harceler son fils de questions inutiles
- les comédiens plutôt bons
- le retour d'une légère touche de mystère
Je n'aime pas :
- un mélodrame trop naïf dans sa conclusion
- l'histoire romantique clichée
- une structure qui ne fonctionne pas
- l'allusion aux 36 Justes un rien excessive
Note : 11 / 20
Toujours convalescente, Touch nous offre une intrigue terriblement mélodramatique qui confirme les problèmes d'une série reposant sur une structure qui perd en efficacité. Fréquemment aux frontières du ridicule, le scénario tient grâce aux comédiens et à quelques bonnes idées, encore trop rares malheureusement.