Pitch katrina
Suite au passage de Katrina, la Nouvelle-Orléans n'est plus que l'ombre d'elle même, mais quelques habitants tentent de reconstruire leur passé et les souvenirs d'un passé glorieux. Chacun de leur côté, ils luttent pour leur maison, leur travail, leur culture ou tout simplement leur fierté.
Un récit multiple par le créateur de The Wire
Treme, c'est avant tout un hymne à la gloire de la Nouvelle-Orléans et son identité, avec en fil rouge l'amour de la musique qui baigne cette ville. Pour information, Treme est un quartier de la Nouvelle-Orléans accueillant majoritairement la classe la plus populaire, ainsi que plusieurs artistes locaux. Lourdement frappé par l'inondation, il tente lentement de se reconstruire, pièces par pièces, à travers la musique, le commerce et la défense de son identité culturelle.
Les fans de The Wire reconnaîtront l'excellent Wendell Pierce en joueur de trombone perpétuellement fauché, ruiné par une ville qui n'a plus le coeur à la musique. Loin d'abandonner, il survit au jour le jour grâce à son talent, symbole de ce désir de dépasser la fatalité en ne comptant que sur soi-même.
Car la Nouvelle-Orléans est une ville abandonnée par un état fédéral qui n'a pas l'envie de reconstruire, préférant déplacer les populations vers les villes voisines. Incapable de faire le deuil et de panser ses blessures, la ville a heureusement un coeur énorme, appuyé par un récit qui ne se veut jamais défaitiste.
Que faire lorsqu'on a tout perdu
Creighton Bernette (interprété par l'immense John Goodman) est l'exemple de cette combativité, essayant de faire entendre la cause de la Nouvelle-Orléans par le biais des médias. Refusant d'être un témoin passif et impuissant, il lutte pour que l'honneur de sa ville soit rétabli, refusant de faire la moindre concession aux médias.
Tous les personnages survivent à leur manière, et leur profonde humanité les rend incroyablement touchants et chaleureux. Les acteurs, tous formidables, interprètent des personnages d'une grande originalité, chacun avec leurs faiblesses et leurs forces, tous portés par leur désir de survivre avant tout.
Mention spéciale à Clarke Peters, qui représente à lui seul toute la force de la série, incarnant avec justesse et tendresse un homme brisé qui choisit d'affronter la réalité et de retrouver sa dignité. L'acteur est simplement bouleversant et donne à la série son rythme d'une lenteur réfléchie et contemplative.
De la musique comme thérapie de la souffrance
Petit conseil pour ceux qui veulent regarder Treme, mettre le son bien fort pour profiter de cette musique entraînante qui baigne de nombreuses scènes, symbole d'un monde qui renaît lentement de ses cendres. La bande son est simplement formidable, et permet d'apprécier la culture de la Nouvelle-Orléans, la patrie du jazz. Chaque morceau vient faire le lien entre les différents personnages, accordant à un récit extrêmement touffu quelques instants de repos.
Treme n'est pas une série facile à suivre, car elle a l'ambition d'embrasser la destinée d'une dizaine de personnages en même temps, engendrant rapidement chez le spectateur un léger sentiment de confusion. Heureusement, l'histoire parvient à ne jamais se perdre et permet à cette série à l'ambition remarquable d'emporter la mise, malgré un pilote à la durée conséquente (119 minutes). Comme dit l'expression, le voyage peut sembler parfois long, mais il en vaut largement la peine car une fois tous les personnages posés, la série ne cessera de monter en qualité, preuve de l'extrême soin dont David Simon et son équipe de scénaristes ont su faire preuve.
(Je tiens d'ailleurs à rendre hommage au scénariste David Mills décédé depuis peu, auteur à l'immense talent qui avait déjà participé à The Wire.)
Une série unique qui sait être généreuse
Série austère et complexe au premier abord, Treme est avant tout une oeuvre d'une humanité débordante, présentant une galerie de personnages forts. Porté par une bande-son formidable, elle sera, pour ceux qui oseront le voyage, unréel plaisir tant elle sait se montrer chaleureuse et passionnante, en dépit d'un rythme plutôt lent. Le soin apporté à une réalisation en tout point remarquable fait de ce show un pur produit HBO, digne de la grande époque.
J'ai aimé :
- la musique, un régal pour les tympans.
- les acteurs formidables, avec une mention spéciale pour Clarke Peters.
- le scénario d'un réalisme poignant.
- la direction artistique parfaite
Je n'ai pas aimé :
- l'accumulation de storylines pas assez équilibrées.
- l'intrigue du frère disparu qui aurait eu plus sa place dans le second épisode.
Enfin, là je suis un peu dur, mais je voulais à tout prix trouver au moins un reproche...
Note : 14 / 20