Pitch à deux à la Nouvelle-Orléans
L'avocate Sofia Bernette est débordée entre Ladonna et son frère disparu, Davis et Antoine victimes tous deux d'une police visiblement à cran et sa fille qui diffuse des vidéos sur YouTube à la gloire de la Nouvelle-Orléans. Entre haine et passion, la ville ne peut plus compter que sur la bonne volonté de quelques âmes pour survivre.
Des couples se forment, d'autres se séparent
Pour cette troisième partie, David Simon va s'intéresser aux relations de couple, en particulier celui formé par Sonny et Annie, artistes contraint de jouer dans la rue pour pouvoir survivre. La jeune violoniste éclaire de son talent tout l'épisode, jouant avec une expressivité et une élégance remarquables, tandis que son couple se brise lentement sous le poids de l'orgueil de son amant. Victime de ses propres démons, Sonny témoigne de la dualité des habitants de la Nouvelle-Orléans, entre désespoir et grâce, orgueil et dévouement.
Pour Davis et Janette, leur relation n'est qu'un remède ponctuel, un moyen de chasser une réalité, de la faire disparaître quelques heures. L'utilisation du jeune musicien en personnage comique s'avère assez payante, Davis possédant cette énergie positive qui entraine toute la série dans son sillage. Ce couple a beau être totalement artificiel, il apporte une touche d'humour remarquable, et permet d'alléger la tension qui règne au sein de la ville.
Ladonna quant à elle vit en couple, mais sa relation avec son mari se dégrade lentement, celui-ci refusant de revenir à K-City. Incapable de mener les choses à leur but, la jeune femme incarne cette souffrance retenue, montrant une dignité remarquable à garder sa volonté intacte.
Une dernière scène absolument superbe
Scène symbolique de l'âme du show, elle nous amène en plein enterrement où les derniers habitants du quartier se sont réunis pour chanter à la mémoire du disparu. La dignité des personnages, la beauté de la musique, tout laisse penser à un final positif, celui d'une ville qui se reconstruit lentement une âme et une identité.
Soudain un bus de touristes surgit, affichant sur les côtés "Katrina Tour", emmenant avec lui un lot de touristes avides, inconscients du drame qui se déroule devant eux. Le flash des appareils crépitent, comme autant de coups de poignards dans le coeur des habitants de la Nouvelle-Orléans. Si la charge contre l'indifférence et la bêtise d'une partie de l'Amérique peut sembler un peu facile, cette scène témoigne merveilleusement d'une réalité qui fait le corps de la série.
Car Treme n'est pas seulement une série, c'est avant tout un témoignage sur un monde à l'agonie, sur une culture en train de s'évanouir. L'oeuvre de David Simon a d'abord pour but de sauvegarder les dernières traces du passé tout en donnant une vraie identité aux victimes de cette catastrophe. Prenant le contrepied des images de journaux télévisés auxquelles nous sommes de plus en plus habitués, il essaie de redonner une dignité aux survivants. Contrairement à l'actualité télévisée qui humilie, la fiction possède ce pouvoir, surtout lorsqu'elle est parfaitement maitrisée comme ici.
Une femme au bord du désespoir : Ladonna Baptiste-Williams
Superbement interprétée par Khandi Alexander, Ladonna est celui des personnages qui possède le plus de raison de quitter la Nouvelle-Orléans. La seule chose qui la rattache à la ville est un bar qui a réussi à survivre au passage de la tempête. Portée par une volonté remarquable, la jeune femme tente de tout reconstruire, mais tout semble vouloir se liguer contre elle. A la recherche de son frère, prisonnier disparu lors de l'évacuation de la prison de la ville, elle va se retrouver face à une administration qui préfère faire la sourde oreille.
Toujours plus prés de l'abandon , elle continue de s'accrocher, symbole d'une ville qui perd lentement espoir face à l'inertie et l'indifférence des pouvoirs publics. Tout comme son toit, son univers est en morceaux, la laissant seule et impuissante, incapable de recommencer à vivre avec ce poids sur la conscience.
Un épisode plutôt léger alors que de sombres jours s'annoncent
Loin de sa réputation d'élitisme, Treme est avant tout la seule série à faire preuve d'une vraie générosité envers les spectateurs en fournissant une histoire riche et chaleureuse. Mélangeant parfaitement drame et d'humour, la série sait surprendre, même dans les épisodes plus légers comme celui-ci. Parfaitement structuré, le récit est prenant, jamais ennuyeux pour autant qu'on accepte de s'intéresser aux différents personnages qui composent le récit.
Un épisode de transition, rempli d'une vraie tendresse pour des personnages dont les destins commencent à peine à se croiser.
J'aime :
- la musique superbe
- une scène finale poignante
- des personnages remarquables
- un style quasi-documentaire élégant et brillant
Je n'aime pas :
- une épisode moins intense que les précédents
- les gens qui pensent que Treme est une série "intello" ou "branchée"
Note : 15 / 20
Treme saison 2 démarre dans deux semaines. Je vais donc passer au rythme d'une critique tous les deux jours (en ajoutant à cela un focus et un bilan de la saison 1)
Osez découvrir Treme, une série digne de la HBO.
While jamming and having fun !
(59)