Vous avez tremblé devant l’Exorciste et Alien, flippé en regardant Rec, Saw et autre 28 jours/semaines plus tard et vous tenez en admiration Freddy, Jason, Chucky et Hannibal Lecter ? Nous aussi. Et c’est pour ça qu’on se demande ce que la série TV propose dans cette même veine. Alors éteignez la lumière, allumez les bougies et installez-vous, nous partons visiter les méandres de l’épouvante horreur.
Ce dossier sera divisé en quatre chapitres :
- L’histoire de l’horreur (1/ Fin XIXeme -> milieu XXeme, 2/ 1960 - 1970, 3/ 1980 - 1995, 4/ 1995 - aujourd'hui)
- Les mécanismes de la peur
- Horreur et tabous
- L’épouvante aujourd’hui et demain.
A partir de cette semaine nous nous attaquons à la partie la plus charnue de l’anatomie horrifique : les trois dernières décennies. Une histoire pleine d'échecs et de triomphes qui va finalement rendre l’horreur grand public et la dédramatiser. Une horreur pour le genre.
Vous pourrez le constater au fil de l’article, nous nous attarderons aujourd’hui sur la période couvrant les années 80 et la première moitié des années 90 pour conclure la semaine prochaine notre chapitre sur l’histoire de l’horreur avec les succès de notre époque.
Le retour de la suprématie hollywoodienne
1980 : Le début de la fin.
Nous sommes en pleine Guerre froide et les USA irradient le “monde libre” d’une culture qui prône une certaine liberté, conditionnée par le libéralisme. La porte est grande ouverte pour le cinéma à sensation qui ne s’encombre plus de puritanisme et autres subtilités. La fin de la décennie précédente a été marquée par l’attrait grandissant du public pour de nouvelles expériences : les jeunes adultes ont tremblé devant L’Exorciste et vibré pendant l’attaque de l’Etoile de la mort de Star Wars. Ridley Scott profite du succès des Space Opera pour réaliser Alien : Le huitième passager en 1979. A la même période, Massacre à la tronçonneuse inspire un jeune cinéaste : si Tobe Hooper a ouvert la voie du slasher movie, c’est John Carpenter qui, le premier, lui emboîtera le pas avec Halloween : La nuit des masques en 1978.
Mais après l’apogée vient la chute, et malheureusement, ce raz-de-marée d’inspiration va aussi sonner le glas d’un cinéma de genre qui faisait alors les beaux jours des fanzines spécialisés comme Mad Movies (première publication en kiosque en 1982) et Starfix (1983). Pour comprendre le déclin de l'imagination des scénaristes, nous nous devons de dresser un portrait du monde culturel d’alors...
Fanzines
Madmovies: 40 ans de promotion du cinéma de genre pour ce magazine né en 1972. Le premier tirage de la revue était de 120 exemplaires. Il atteint aujourd’hui 60 000, en plus du succès de son site internet.
Créé par Jean-Pierre Putters, ce magazine a permis au public de découvrir les noms de cinéastes comme Peter Jackson ou Sam Raimi. Il sera suivi en 1983 de Starfix, dont le comité de rédaction était formé par Christophe Gans, Nicolas Boukhrief, Doug Headline, Frédéric-Albert Lévy et François Cognard. Le premier sera nommé Rédacteur en chef de ce magazine qui fera également connaître des noms comme David Cronenberg, Dario Argento ou encore John Carpenter. Malgré tout, il ne connaîtra pas le succès de Mad Movies et le journal stoppera sa diffusion en 1990. Il renaîtra pour 17 numéros de 1998 à 2001. Puis en 2011.
No limit.
1980 voit le décès d’Alfred Hitchcock, qui pourrait bien symboliser le changement de cap que connaît alors le genre horrifique. La suggestion est morte, vive la surenchère ! Le cinéma se doit de suivre l'ascenseur émotionnel que subit le public depuis quelques décennies, et celui-ci (le public, pas l’ascenseur, suivez un peu !) est de plus en plus difficile à surprendre. L‘homme a marché sur la Lune, et il est capable de détruire une ville avec une bombe mais l’on perd confiance dans les puissants depuis le Watergate. La TV montre de plus en plus de choses et l’ouverture au monde n’est plus l’apanage des riches et autres aventuriers. Le public se fait désormais sa propre opinion et les services secrets comprennent -même si c’est un peu tard pour les vétérans du Vietnam- l’importance de la propagande télévisuelle et cinématographique lors des conflits.
L’avant-dernière décennie du XXeme siècle est donc marquée culturellement par la recherche de limites qui ne seront jamais clairement définies. Seul le box-office fait foi et chaque succès devient potentiellement une saga. La guerre inspire Apocalypse Now, Rambo, Good morning Vietnam, Platoon, Full Metal Jacket et Predator, et on met la réussite individuelle au premier plan dans le domaine du sport (Rocky, Raging Bull et Le Grand Défi) et du crime (Scarface). Les progrès techniques ont impressionné le public de Star Wars qui n’était pourtant pas au bout de ses peines : Rencontre du troisième type, E.T., Blade Runner, Retour vers le futur ou encore Terminator et Robocop ne sont que quelques exemples de films inspirés et inspirant pour la science-fiction. Enfin, les héros indestructibles font leur apparition sur grand écran et ce, dans tous les genres : Rambo le soldat, les flics de L’Arme Fatale ou Le flic de Beverly Hills, Rocky le sportif, le pilote dans Top Gun, etc...
En somme, les années 80 marquent l’arrivée des blockbusters et pour les compagnies de productions hollywoodiennes, un retour à la suprématie dont elles jouissaient entre les années 30 et 60. Comme l’argent et la morale ne font pas bon ménage, l’horreur se voit déclinée en deux catégories pour s’adapter : la superproduction servie par des effets spéciaux toujours plus impressionnants d’un côté, et la série B de l’autre...
Quand l’horreur est partout.
Difficile de choquer un public qui se fait déjà corrompre par le cinéma “traditionnel”. Le sexe ? Neuf semaines et demi en propose à la pelle. Le sang ? Il suffit d’aller voir un film policier. Le langage ordurier ? il n’a plus rien de choquant.
Reste l’inexpliqué, le tabou et ce que les succès du box office ne peuvent pas montrer sous peine de perdre une partie de leur public. Cependant, l’adaptation de romans à succès n’a pas dit son dernier mot et c’est un jeune auteur dont l’imagination intarissable inspirera de nombreuses oeuvres qui va être à l’origine du premier chef-d’oeuvre horrifique des années 80.
Le King de l’horreur.
Dans le grand petit monde de l’horreur de la fin des années 70, un auteur commence à faire parler de lui en associant son nom à ceux d’éminents messieurs de l’épouvante et du cinéma en général. Stephen King voit son premier roman, Carrie, adapté par Brian De Palma, puis Richard Matheson lui est opposé pour le prix World Fantasy du meilleur roman pour Salem, sa deuxième oeuvre, et Stanley Kubrick adaptera la troisième, The Shining.
Trois romans, trois succès, deux adaptations. Inspiré par les travaux de Lovecraft, Poe et Matheson, Stephen King publie The Shining en 1977. C'est son premier roman classé dans la New York Times Best Seller List (le 27 mars 1977). Stanley Kubrick, qui avait déjà à son actif des perles cinématographiques comme Lolita, 2001 ou encore Orange Mécanique, choisit d’adapter le roman de King pour éviter les déboires commerciaux de son précédent film, Barry Lyndon. En effet, quand le réalisateur envisage de transposer Shining à l'écran, Stephen King est déjà une valeur sûre, avec à son actifs 6 romans publiés et 22 millions d’exemplaires vendus.
Le film devient une référence dans le genre horrifique en particulier, mais aussi dans le cinéma en général. Ses répliques cultes, ses scènes dérangeantes, sa réalisation (cf. encadré La steadicam) et l’interprétation de Jack Nicholson le classeront au panthéon du cinéma à jamais.
Au final, les années 80 verront pas moins de quinze adaptations plus ou moins réussies des romans du roi de l’horreur.
La Steadicam
Un harnais, des bras articulés et une caméra. La Steadicam (cf. photo) permet au cameraman de marcher et courir pour réaliser des travelling horizontaux et verticaux tout en gardant une certaine stabilité rendant l’image fluide.
Le film The Shining de Kubrick rendra l’appareil populaire par son utilisation dans les scènes d’anthologie comme le plan dans le couloir avec Danny sur son tricycle ou la scène finale dans le labyrinthe.
Fake Snuff
Si Stephen King porte le rêve américain sur ses épaules, ce n’est pas le cas de l’Italien Ruggero Deodato qui subit, la même année, le scandale provoqué par son film Cannibal Holocaust. Des plaintes sont déposées contre le réalisateur dès la fin de la Première et il est arrêté pour délit d'obscénité. Pornographie, cannibalisme, viol, torture sur des animaux, le public est choqué et Deodato doit prouver que les acteurs du films en sont bien (des acteurs) et que personne n’est mort pendant le tournage (sauf six animaux, dont deux singes).
Cannibal Holocaust avait pourtant de nobles ambitions : dénoncer le sensationnalisme à outrance du journalisme et les dérives de la civilisation. Au lieu de cela et à l’instar des nombreux longs-métrages qui lui succéderont (Hostel, Saw ou Serbian Film pour ne citer qu’eux), il sera classé parmi les extrêmes de l’horreur et n'intéressera qu’une partie marginale du public, notamment les futurs Splat Pack (cf encadré), qui s’en inspireront pour certains de leurs films.
Les Splat Pack
Association créée en 2002, le Splat Pack regroupe les neuf réalisateurs listés ci-dessous, qui désirent faire perdurer la tradition des films d’horreur gore à la mode dans les années 80. Voici la liste des réalisateurs : Alexandre Aja, Eli Roth, Darren Lynn Bousman, Neil Marshall, Greg Mclean, Robert Rodriguez, James Wan, Leigh Whannell et Rob Zombie.
En bref
Nous voilà arrivés au milieu du troisième chapitre de l’histoire de l’horreur et il semble qu’une pause s’impose. Résumons :
L’horreur suggérée et le Thriller horrifique sont nés dans les postes de radio des années 40.
Le gothique est popularisé par la Hammer dans les années 50
Les années 60 sont marquées par les familles gothiques et font la renommée de la Famille Addams. La fin de la décennie verra naître l’iconoclasme avec Rosemary’s baby et popularisera le genre film de zombies avec La nuit des morts vivants.
Dans les années 70, l’iconoclasme triomphe avec L’Exorciste et La Malédiction. Le slasher et le rape and revenge naissent dans la censure la même décennie avec Massacre à la tronçonneuse et La dernière maison sur la gauche. Enfin, Ridley Scott amène l’horreur dans l’espace et la science-fiction avec Alien
A partir de 1980, l’horreur est débridée et explose : le slasher engendre les sagas Freddy, Vendredi 13, Halloween, Chucky, etc.. le film d’horreur inspiré du snuff movie devient un paria dès sa venue au monde sous les traits de Cannibal Holocaust. Sam Raimi apporte de l’eau au moulin du film de zombies avec Evil Dead et John Carpenter tire son succès de l’horreur apocalyptique dans The Thing. Stephen King succède à Richard Matheson comme valeur sûre de l’adaptation cinématographique et les genres se mélangent, l’horreur semble offrir une manne infinie à l’imagination des réalisateurs.
Pourtant, si au moment des balbutiements de l’horreur populaire, la demande dépassait très largement l’offre, au fil des années, la multiplication des films provoquée par la naissance de tous ces genres va totalement étouffer la créativité des scénaristes et inverser la tendance. Le nombre de suites se comptent avec deux chiffres et les seuls films à se démarquer réellement sont ceux qui proposent un scénario bien ficelé en parallèle d’un effroi particulièrement difficile à provoquer.
Dans la période fin 80, début 90, les pages des journaux spécialisés comme Mad Movies et Starfix sont remplis de chiffres après les titres : Gremlins 2, Halloween 8, Freddy 5, Robocop 2... et l’originalité tient davantage dans le traitement psychologique des histoires (L’Antre de la folie, L’Echelle de Jacob) que dans les effets visuels et les mécanismes horrifiques.
Pour ne rien arranger, en 1993, Spielberg sort son Jurassic Park dont les monstres -des dinosaures mêlant animatronics et images de synthèses- seront bien plus convaincants et effrayants que tout ce que l’horreur avait pu produire auparavant. Certaines scènes du film sont choquantes et hissent le réalisme à un niveau jamais atteint jusqu’alors.
Fini les scènes presque réalistes avec trois bouts de ficelle et un carton sur grand écran. Pour attirer le public il faut que les monstres aient l’air vrais ! Oui mais voilà, dans l’horreur, on ne regarde pas, on aperçoit. Que faire alors, devant l’inquiétude des fans du genre horrifique?
Quatre révolutions viendront foutre autant de coups de pied au cul de l’épouvante cinématographique. Mais nous sommes en 1996 et nous n’avons pas parlé de nos petits écrans depuis une bonne quinzaine d’années ! Marquons une pause pour revenir à la télévision.
Box-office des sagas horrifiques :
1 - Les dents de la mer
$420,895,891 pour 4 films
2 - Le silence des agneaux
$397,395,051 pour 4 films
3 - L'exorciste :
$296,721,965 pour 6 films
4 - Scream :
$293,548,040 pour 3 films
5 - Alien :
244, 765, 985 pour 4 films (avec AVP: Alien vs. Predator : $325,047,081)
6 - Vendredi 13:
$231,153,574 pour 10 films (avec Freddy vs. Jason : $313,644,322)
7 - Halloween :
$216,773,167 pour 8 films
8 - Freddy:
$215,962,206 pour 7 films (avec Freddy vs. Jason : $298,452,954)
9 - Saw :
$207,710,138 pour 3 films
10 - The Ring :
$205,035,751 pour 2 films
11 - Massacre à la tronçonneuse :
$151,753,320 pour 5 films
12 - Poltergeist
$129,816,684 pour 3 films
Le retour de la série horrifique.
Dans le contexte cinématographique des années 80 où effroi rime avec effusion de sang, monstres effrayants et course aux effets spéciaux, la TV tient lieu de parent pauvre de l’épouvante. Les tubes cathodiques et surtout leur utilisation familiale n’arrangent rien et si les feuilletons cartonnent auprès des ménagères, ce sont les séries tout public qui s’installent définitivement comme valeur sûre de l’audience.
Nous allons le voir ensemble, les occurrences télévisuelles du genre horrifique se comptent sur les doigts d’une main et demi dans les années 80 mais chacune d’elle est soignée, s’adaptant au format et aux contraintes de l’écran 4/3 (oui, c’est la norme de l’époque !). C’est l’époque où des réalisateurs devenus aujourd’hui des piliers du grand écran -comme Steven Spielberg ou Robert Zemeckis- font leurs gammes dans des productions télévisées et suscitent l’intérêt des fans en mal d’anthologie horrifique. Chemin faisant, l’horreur plante ses graines dans le petit écran et les succès se succèdent des deux côtés de l’Atlantique.
Au début des années 80, c’est en réglant timidement son pas sur les pas du grand écran que la série TV horrifique prend ses marques.
Dahl reprend le flambeau
Après dix ans de disette (cf article précédent), c’est Roald Dahl qui va rabibocher l’anthologie horrifique avec la télévision britannique par l’intermédiaire d’ITV. Pour rappel, Dahl n’est autre que l’auteur de Charlie et la chocolaterie ou encore Fantastic Mr Fox et à l'époque, six de ses nouvelles ont déjà été adaptées à l’écran dans Alfred Hitchcock présente, dont quatre réalisées par le maître.
En 1979 sort donc sur ITV Tales of the Unexpected (Bizarre bizarre en français), une série qui s’étalera sur neuf saisons en reprenant le concept d’Alfred Hitchcock présente et Night Gallery. Une durée tout à fait respectable due à l’image de l’écrivain qui présentait lui-même les épisodes inspirés de ses nouvelles et en expliquait les fondements. Cependant, en dehors de l'intérêt que suscita la série, le téléspectateur n’avait rien de révolutionnaire à se mettre sous les canines. Il faut attendre l’année suivante pour voir poindre un soupçon de nouveauté horrifique sur petit écran.
Générique et crédits final de la série Bizarre Bizarre
La Hammer, le retour.
Les naissances rapprochées du slasher et du thriller satanique dans les années 70 allèrent de pair avec l’effondrement de la Hammer qui s’obstinait dans l’horreur gothique. Les deux derniers films de la société sortiront à quatre ans d’intervalle avec Une fille pour le diable en 1975 et Une femme disparaît en 1979. Pour sauver les meubles, la compagnie s’oriente vers la télévision en 1980 et diffuse sur les écrans anglais son anthologie : Hammer house of horror.
Le succès est mitigé malgré l’utilisation des stars qui firent la renommée de la firme, notamment Peter Cushing.
Pourtant, cette anthologie insufflera de près ou de loin un vent nouveau dans l’horreur télévisée, notamment avec un épisode inspiré d’Amityville : La maison sanglante. Cas exceptionnel dans un pays ou la censure sévit plus qu’ailleurs, l’épisode offre son lot de scènes gores ou à connotation sexuelle tout en proposant un scénario bien ficelé. Malheureusement, cela ne suffira pas et Hammer house of horror ne survivra qu’une saison, sur treize épisodes. Une autre tentative connaîtra le même sort en 1984 et sonnera le glas des productions de la firme : Hammer house of mystery and suspense ne rencontrera qu’un succès d’estime.
Quand l’horreur télévisée passe dans la cour des grands.
Romero, King, Spielberg, autant de noms qui, contre toute attente, ont permis à l’horreur de se refaire une place sur petit écran. Roméro permettra à Stephen King d’écrire son premier scénario pour le grand écran en 1982 avec Creepshow, une anthologie d’histoires horrifiques pour le cinéma. L’année suivante, Warner Bros - qui a produit le film - décide d’utiliser le potentiel du long métrage pour l’adapter à la télévision en s’appuyant sur la renommée de Georges Romero.
La série en question, Tales from the darkside, couvre tous les genres de l’horreur en 90 épisodes de 30 minutes, introduits et conclus par la voix de Paul Sparer (voir encadré Les séries à présentation). Deux épisodes seront adaptées d’histoires courtes de Stephen King : Word processor of the Gods et Sorry Right Number.
Tales from the darkside se terminera en 1988 pour mieux revivre, la même année, au travers d’une autre série : Monsters. Comme son nom l’indique, elle présente un monstre différent par épisode tout en gardant le principe de son aînée. Toujours créépar Romero, utilisant encore des histoires de Stephen King mais cette fois sans surenchère fantastique, le show s’étalera sur trois années et 72 épisodes.
Steve Buscemi y jouera un rôle dans l’épisode Bed and Boar et sera présent également dans l’ultime adaptation de la série au cinéma : Tales from the Darkside : the Movie (Darkside, les contes de la nuit noire en français).
Les séries à présentation
Alfred Hitchcock n'est pas le seul à s'être essayé à la présentation d'anthologie, loin s'en faut. Voici un petit florilège de présentateurs vedettes :
La dream team
Revenons quelques années en arrière pour nous arrêter à 1985, année ou Steven Spielberg crée sa propre série : Amazing Stories (Histoires fantastiques en Français) diffusée sur NBC. Encore une anthologie, mais pas n’importe laquelle. Pour vous en convaincre, voici un florilège de noms présents au casting ou dans l’équipe technique :
Réalisateurs (le chiffre entre parenthèses est le nombre d’épisodes réalisés) :
Steven Spielberg (2), Clint Eastwood (1), Martin Scorcese (1), Burt reynolds (1), Robert Zemeckis (1), Joe Dante (2), Danny De Vito (1), Tobe Hooper (1)...
Acteurs :
Charlie Sheen, Drew Barrymore, Forest Whitaker, Harvey Keitel, Patrick Swayze, Kevin Costner, Christopher Lloyd, Kiefer Sutherland, David Carradine...
Musique :
John Williams, James Horner, Lennie Niehaus...
Il ne reste plus grand chose à dire, hormis que cette série, bien que contenant certains codes horrifiques, était davantage orientée fantastique et ne connaît pas un succès à la hauteur de son casting : 2 saisons et 45 épisodes ont raison du show. Et malgré 12 nominations aux Emmy, NBC ne renouvellera pas le contrat.
Le générique d'Amazing Stories, on reconnait bien le style de John Williams
Un Vendredi 13 sans Jason
Alors que l’horreur reprend du poil de la bête (mais pas trop, ça fait tousser) en Angleterre avec Dahl en porte-drapeau et que la série de Spielberg s’éteint, c’est CBS qui prends le relais en 1987 avec un show au titre pour le moins racoleur : Friday the 13th : the series (Vendredi 13 : la série).
Produite par le fils du président de la Paramount de l’époque, Frank Mancuso Jr (qui a produit depuis Vendredi 13 2-8, Internal Affairs, Stigmata, Ronin) ce Vendredi 13 là n’a pour seul rapport avec le tueur au masque de hockey que le nom et quelques coups marketing un tantinet fumeux. La trame suit en effet un certain Lewis Vendredi (ça alors !) qui s’est vu offrir l’immortalité en échange d’un petit pacte avec le diable l’engageant à vendre des objets maudits dans sa boutique d’antiquité. Fatigué d’habiter sur la planète Terre (sur ce brin de poussière sur ce caillou minable... pardon) il rompt le pacte et meurt, laissant sa lourde tâche à deux de ses neveux éloignés qui se donneront pour mission de récupérer les marchandises volées.
Si vous aussi, vous cherchez le rapport avec les films éponymes, il faut regarder du côté des anecdotes qui bordent le show : celui-ci était destiné initialement à porter le titre moins accrocheur The 13th hour (La 13eme heure), mais le producteur de la franchise horrifique estima qu’étant propriétaire des droits, il pouvait se permettre une stratégie de communication pour le moins douteuse sur une série qui tire davantage du côté de Warehouse 13.
Le show s’étalera tout de même sur trois saisons, couvrant les sorties cinéma des septième et huitième épisodes de la franchise. A noter que l’une des stars du neuvième opus de la saga : John D Lemay (Steven Freeman dans Jason va en enfer) était l’un des acteurs principaux de la série et que David Cronenberg a réalisé un épisode avant de jouer Wimmer dans Jason X (Vendredi 13 10).
Dernier fait notable concernant la série, une rumeur populaire -démentie depuis- voulait que le dernier objet maudit de la série fasse le lien avec la saga : le masque de Hockey de Jason.
L’horreur décryptée
Après CBS et NBC, c’est HBO qui servira de dealer télévisuel de l’horreur aux fans. Associé à Joel Silver à partir de 1989 et forte d’une solide équipe de réalisateurs (Robert Zemeckis, Richard Donner, Walter hill et David Giler), la société de production dépoussière une bande dessinée de EC Comics des années 50 : Tales from the Crypt. Le succès est immédiat (93 épisodes de 30 minutes étalés sur 7 saisons) et mérite que l’on s’y attarde sur quelques lignes.
La recette est simple : adaptée d’un comics à succès qui jurait avec le puritanisme de l’époque, la série est confiée à des ténors cinématographiques garantissant un travail soigné. Il ne reste plus qu’à saupoudrer régulièrement le tout de stars du grand écran, et à le décorer d’un ton cynique à l’humour mordant. Même si la recette miracle n’existe pas, on n’en était pas loin. Parmi les vedettes qui ont défilé dans les épisodes, on peut citer notamment Dan Aykroyd, Patricia Arquette, Timothy Dalton, Kirk Douglas, Tim Roth, Whoopi Goldberg, Tom Hanks, Teri Hatcher, Demi Moore, Brad Pitt, Christopher Reeve, Martin Sheen, Ernie Hudson, Bill Paxton ou encore Brooke Shields. La réalisation n’est pas en reste, avec des épisodes signés entre autre par Michael J. Fox, Tom Hanks, Kyle MacLachlan, Arnold Schwarzenegger, Robert Zemeckis, Richard Donner, Howard Deutch, John Frankenheimer, William Friedkin, Walter Hill, Tom Holland et Tobe Hooper.
Pas de miracle, donc, concernant ces Contes de la crypte. Juste la preuve incontestable qu’une série -même horrifique- qui se donne les moyens finira forcément par être récompensée. Vous allez d’ailleurs pouvoir le constater vous-même dans la suite de l’article, ces histoires pleines de sadisme et d’esprits pervers marquèrent un renouveau entre le genre et le grand public.
L’horreur au pays des ados
Quelques années avant la popularisation de l’épouvante auprès du jeune public avec Scream, les ados des années 90 pouvaient commencer à dompter leur peur avec deux séries venues du canada : Fais-moi peur et Chair de poule. Deux titres qui disent bien la puérilité de leur contenu, deux séries inspirées des Contes de la crypte et totalisant 11 saisons à elles deux (7 pour la première et 4 pour la seconde). A partir de 1990, l’horreur n’est plus l’apanage des grands.
Fais-moi peur naît un an après Tales from the Crypt de l’imagination d’un écrivain orienté jeunesse, Donald James MacHale. Elle présente une anthologie horrifique dont les protagonistes ont le même âge pubère que le public visé. Le résultat se passe de commentaires : 91 épisodes sur 7 saisons, diffusés au fil des années dans 35 pays, rien que ça ! Le principe est pourtant d’une simplicité enfantine : une fois par semaine, une bande d’ado se faisant appeler "La société de minuit" se réunit dans les bois pour se raconter des histoires qui font peur autour d’un feu. Chacun à leur tour, à raison d’un conte par épisode, nos jeunes héros racontent leurs histoires en commençant systématiquement par jeter une poudre mystérieuse dans le feu tout en récitant la formule : « Soumise à l'approbation de la société de minuit, cette histoire s'intitule… » suivi du titre naissant des flammes provoquées par la susdite poudre.
Dans le même principe, Chair de poule est diffusée sur la même chaîne canadienne (YTV) à partir de 1995 et s’inspire des romans de R.L Stine, écrivain connu comme étant le Stephen King des enfants avec sa saga de livre éponyme. Cette fois c’est l’écrivain lui-même qui présente le show et les ados sont confrontés à des forces maléfiques ayant pris possession d’un objet ou d’une personne.
Moins populaire que son aînée Fais-moi Peur, Goosebumps (le titre original de Chair de poule) tiendra tout de même 4 saisons, soit 74 épisodes de 21 minutes, à une époque ou une première révolution horrifique avait lieu parallèlement.
Repères chronologiques télévisuels
- 1979 : Tales of the Unexpected (R-U)
- 1980 : Hammer house of horror (R-U)
- 1983 : Tales from the darkside (US)
- 1984 : Hammer house of mystery and suspense (R-U)
- 1985 : Amazing Stories (US)
- 1987 : Vendredi 13 : la série (US)
- 1988 : Monsters (US)
- 1989 : Les contes de la crypte (US)
- 1990 : Fais-moi peur (Canada)
- 1990 : Twin Peaks (US)
- 1993 : X-Files (US)
- 1995 : Chair de poule (US)
La télévision se lâche.
Nous ne pouvions pas clore cet article sans parler des deux séries qui marquèrent la première moitié de la dernière décennie du siècle dernier.
En 1990, David Lynch n’a plus rien a prouver. Il a déjà triomphé avec Elephant Man, Blue velvet et Dune et remporté nombre de distinctions. Désirant réaliser un film sur la vie de Marylin Monroe, il fait la connaissance du scénariste Mark Frost, avec qui il sympathise. Le projet d’origine n’aboutira jamais mais Lynch et Frost ont déjà commencé à imaginer une ville et à en dessiner les plans. Ils baptisent cette dernière Twin Peaks et placent un corps sans vie sur le bord d’un lac à proximité de celle-ci. L’intrigue est posée, un whodunit fictif dans une ville fictive avec des personnages fictifs et leur vie mystérieuse. Car c’est là qu’est l’originalité de la série : elle ne cherche pas la démagogie en proposant aux téléspectateurs des situations et personnages auxquelles ils pourront s’identifier. En fait, c’est plutôt l’inverse qui se produit et Twin Peaks pousse le public à s’interroger sur son rapport au petit écran par une mise en abyme de la fiction. Le résultat est dérangeant sans que l’on sache trop pourquoi et les téléspectateurs sont conquis.
La "Peaksmania" qui s’en suivra fera beaucoup de bien a l’épouvante télévisuelle. Même si la série n’appartient pas, à proprement parler, à ce genre, elle attirera l’attention des producteurs sur le succès de l’étrange auprès du grand public et ouvrira la voie à l’une des plus grandes séries de tous les temps.
Top audiences tous genres confondus et comparatif séries horrifiques
1/ M.A.S.H :
105,9 millions de téléspectateurs le 28 février 1983
2/ Cheers :
80,4 millions de téléspectateurs le 20 mai 1993
3/ Seinfeld :
76,3 millions de téléspectateurs le 14 mai 1998
4/ Friends :
52,5 millions de téléspectateurs le 6 mai 2004
5/ Magnum :
50,7 millions de téléspectateurs le 1er mai 1988
(...)
10/ Twin Peaks :
34,6 millions de téléspectateurs le 8 avril 1990
14/ X-Files :
29,9 millions de téléspectateurs le 26 janvier 1997
(...)
- The Walking Dead :
- Buffy contre les vampires :
- American Horror Story :
Plus de 140 nominations et 65 récompenses dont 5 Golden Globes et 16 Emmys Awards et un record d’audience à 29,9 millions de téléspectateurs, X-Files fait incontestablement partie du panthéon des séries TV tous genres confondus. Encore une fois, on ne peut pas parler d’horreur proprement dite, mais ce show -qui avait pour vocation de rendre le paranormal grand public en surfant sur le thème du complot extra-terrestre- proposait de temps à autre des stand-alones qui empruntaient beaucoup au genre horrifique. Deux épisodes de la première saison mettaient par exemple en scène une enquête sur un personnage culte parmi les fans de la série : Victor Eugene Tooms, un serial-killer mutant introverti qui ne pouvait survivre qu’en se nourrissant de foies humains fraîchement cueillis. Tous les ingrédients du film d’horreur étaient présents, et les téléspectateurs du monde entier pouvaient continuer leur domptage de la peur déjà entamé par les Contes de la crypte.
Par dessus tout, X-files fait partie des séries qui ont renouvelé la demande du public et par voie de conséquence, l’offre des compagnies de production. Une tripotée de séries allait naître du succès de ce show, dont celle qui fit autant de bruit sur le petit écran que Scream sur le grand : Buffy contre les vampires.
Nous voilà à la fin de cette troisième partie. La semaine prochaine nous nous attaquerons à la dernière partie (promis) de l’histoire de l’horreur en partant du milieu des années 90 jusqu’à nos jours. Un programme tout aussi chargé.
Retrouvez les autres volets de ce dossier :
- La série TV peut-elle encore faire peur ? #1 (Fin du XIXeme siècle -> fin des années 50)
- La série TV peut-elle encore faire peur ? #2 (Début des années 60 -> fin des années 70)
Sources :
- Imdb
- Allociné
- Mad Movies
- Histoire des films d'horreur
- Wikipedia
- Ecran Large
- Des Séries et des Hommes
- DVDcritiques
- Horreur-web
- Horreur Morbide Video