Passer après le premier épisode, forcément la chute est rude…

Il y a du bon mais surtout du moins bon dans ce qui est l'un des moins bons épisodes de Sherlock. Personnellement c’est sans doute celui que j’aime le moins.

L’épisode a une caractéristique évidente, c’est qu’il se déroule majoritairement hors de Londres et des sentiers connus de la série. C’est à la fois sa grande force et sa plus grosse faiblesse.

Force tout d’abord car ce changement d’ambiance le démarque. Les scènes dans la lande ou au laboratoire, si elles ne sont pas toujours réalisées avec la plus grande inspiration, donnent au moins un coup de frais et une ambiance lugubre appropriée. On notera aussi pas mal de bonnes interactions qui renforcent le lien Sherlock/Watson et questionnent la compétence, ou la toute-puissance de Sherlock, en le mettant face à sa plus grande peur : celle d’avoir peur. Tout cela le préparant au grand finish à venir de la saison contre Moriarty. Je suis fan de l’idée de questionner Sherlock, être très rationnel, sur ce qu’il croit voir ou pas.

Maintenant, il y a plein de problèmes sous-jacents à tout ça…

Premièrement, qui dit hors de Londres, dit hors de tous les personnages qu’on connaît. Ne pas voir Molly, Mrs. Hudson, Mycroft, et ne voir Lestrade qu’à travers un caméo à peine forcé, c’est juste peu judicieux dans une saison de trois épisodes. Surtout vu le prochain et son thème.

Deuxièmement, la réalisation par moments très maladroite comme je l’ai dit, est un vrai plombeur d’ambiance. L’épisode vieillit mal en grande partie à cause de cela. Il y a d’ailleurs tout un plan assez horrible où Sherlock et Watson sont filmés tous les deux pendant une période prolongée avec le focus, ce qui est censé souligner le fait qu’ils sont tous les deux dans un état de peur viscérale et de vulnérabilité… mais c’est vraiment moche.

Troisièmement, et c’est pour moi le pire truc : cet épisode est super prévisible. C’est en cela qu’il échoue le plus à mon sens. Même les épisodes les plus inégaux en termes de rythme ou d’énigmes (The Blind Banker ou The Great Game) nous épataient avec certaines parties de leur intrigue.

Ici, les déductions sont approximatives au mieux (le “maggie” qui démarrait bien mais aurait vraiment pu être étoffé avec plus de tentatives et un nom plus complexe pour être crédible), et surtout la conclusion avec le fait que Sherlock est drogué se voit venir dès le début. Certes, il faut avoir un certain sens de logique et un bon coup d’oeil pour comprendre que les deux barmans avaient un rôle à jouer avec leur chien et que le café était ce qui était à l’origine de la droguerie de John… néanmoins tout cela ne semble être qu’une invention pour faire de la brume un leurre, plus que la solution logique et naturelle des choses.

Idem pour l’implication du médecin louche qui connaissait le père de la victime, qu’on voit venir. Et mine de rien, comprendre des trucs avant Sherlock, c’est un peu fatal. Certes la fin vient corriger des choses avec ce twist pas mal du chien abandonné des deux époux. J’aime aussi assez l’implication du lapin fluorescent qui révélait un truc qui clochait, même si l’idée est directement reprise de l’épisode précédent avec les “micro-enquêtes anodines qui en fait sont connectées à l’ensemble”, et ici elles sont bien moins cachées puisqu’on se doute que le thème animalier implique que mentionner un chien ou un lapin n’a rien d’anodin.

Mais tout de même, tout l’enjeu principal autour de nous faire croire à l’existence de la bête, est raté. C’est le plus gros problème et ça fait que certaines scènes, comme celle où John a peur, son assez longues.

Au final, le rythme est assez mou, après des épisodes comme The Great Game et A Scandal in Belgravia, cela fait tâche. Les éléments qui rallongent la durée de l'épisode auraient mérité d’être de vraies intrigues et non pas des fausses pistes (comme les lumières en code morse).

J’ai tout de même bien aimé le guest principal de l’épisode joué par Russell Tovey que j’aime beaucoup en tant qu’acteur. La révélation finale n'est pas insatisfaisante, c'était assez malin de ramener ça à un trauma et une peur collective qui rentre bien dans l'idée du concept de l'épisode, le problème est que l'aftermath est inexistant, et finalement, les motivations du méchant semblent bien tirées par les cheveux juste pour faire garder le silence à un homme tourmenté.

Le "mind palace" est une idée assez douteuse dont la mise en scène est passable puisqu’on comprend à peine comment Sherlock arrive à faire le lien entre tous les éléments, ce qui était pourtant tout le but de nous plonger dans sa psychée. Le concept sera, heureusement, bonifié par la suite, lorsque de futurs épisodes bien mieux réalisés nous montreront de véritables "lieux imaginés" par son subconscient, ce qui est bien plus fidèle au concept (qui existe dans la vraie vie).

Bref, un épisode qui part d’un bon postulat mais qui ne sait pas corriger ses faiblesses, avec pas mal de rajouts artificiels pour faire perdurer l'intrigue sur 90 minutes quand 60 auraient largement suffit, qui masque une enquête peu fournie dans l'ensemble, même si elle dispose quand même de quelques bonnes idées et offre un paysage nouveau qui permet à cet épisode au moins de se détacher pour son ambiance atypique.

Dommage que la saison 2 ne semble pas avoir appris de ses erreurs de la première, en proposant un autre épisode déconnecté du fil rouge. Seule l’ultime scène vient nous teaser, de façon totalement décorrélée à l’épisode, ce qu’il se passera dans le prochain. La scène est capitale pour la suite de la série et ici n’a pourtant que peu de valeur hormis celle du teasing pur.

On compare souvent cet épisode à The Blind Baker, mais malgré tous les problèmes de ce dernier, je lui préfère son intrigue complexe à tiroirs bien ficelés plutôt que cet intermède dans la lande. Pas une mauvaise 1h30 de télévision, mais pas de quoi impressionner non plus à mon sens. Quand on sait que c’est la nouvelle la plus célèbre du détective dans l’oeuvre de Conan Doyle, il y aurait peut-être eu moyen d’y injecter un peu plus de passion et d’aura culte, de quoi faire rayonner Sherlock dans tout le pays par exemple. Ils ont opté pour une voie plus simple, pourquoi pas, mais trop simple, ça ne fonctionne pas des masses pour cette série.