Après un titre un peu provocateur, je tiens à préciser qu'il va de soit que tout ce que je vais dire n'est qu'une opinion personnelle. Toi, le fan de BSG, tu pourras donc continuer à dormir tranquillement en pensant que je ne suis qu'un petit con aigri qui n'aime pas les batailles spatiales kitchs et les triangles amoureux (c'est le seul troll de l'article, je vous jure).
En revanche, je déconseille la lecture de l'article à ceux qui n'ont pas vu la série et qui ont grand espoir de trouver en elle un trésor caché. L'article contient également des spoilers.
Mes attentes
On m'a présenté Battlestar Galactica (que je vais rapidement abrégé BSG par la suite) en m'annonçant une série de space opera d'un nouveau genre. Le genre qui va aborder des aspects de notre société occidentale, et ça toujours dans un univers futuriste. C'est là que je me suis dis chouette, ça commence à être intéressant. Je me lance.
5 saisons plus tard
Dommage, on a raté le coche. Plutôt que de faire une grosse critique négative de ce que je trouve mauvais, j'ai plutôt décidé de parler de tout ce que j'aurais aimé qu'on aborde pour que la série devienne (très) bonne à mes yeux, d'où le titre. Avant de commencer, la seule chose que je vous demande, c'est d'imaginer "vraiment" que ces situations se passent dans la "vraie" vie. On est peut-être dans de la science-fiction, mais au final si on met de côté l'aspect Cylon de la série, le reste est assez réaliste.
Voilà, donc encore une fois, je sais que la série ne voulait peut-être pas traiter des choses que je vais aborder, qu'elle voulait s'axer plus dans le divertissement, la mythologie ou que sais-je. Mais même si je n'ai pas aimé la série dans son ensemble, il y a dans BSG quelque chose qui m'a suffisamment accroché d'une part pour que je finisse la série, mais pour que je réfléchisse ensuite à tout ce que j'aurais aimé voir dedans, ce dont je vais vous parler dès maintenant.
Le synopsis
Avant toute chose, ce qui m'a le plus accroché dans la série, c'est son synopsis de départ : la population humaine est réduite à environ 40.000 personnes, la Terre est devenue quasi inhabitable et les survivants se doivent de trouver une nouvelle maison. A l'heure où l'on commence à douter de l'effet de l'Homme sur la Terre, sur les capacités de cette dernière à pouvoir accueillir 8 milliards de personnes d'ici une vingtaine d'années, où les découvertes sur Mars ou celles sur une nouvelle planète potentiellement habitable pleuvent, ce scénario a tout pour me plaire.
Il y a à la fois :
- une part de science-fiction, du fait de pouvoir voyager dans l'espace qui fait assez rêver
- une part de religion, car nous serions obligé de remettre en question pas mal de nos croyances actuelles
- une part philosophique, avec la recherche du but de l'humanité et plus personnellement du sens de sa vie
- une part sociologique, car toute l'humanité est à reconstruire : des peuples, des traditions, des langues, des croyances...
Alors autant les deux premières parties, ils ont pu en parler à travers les Cylons et la mythologie autour de la série, autant les deux dernières, elles sont passées complètement à la trappe. Et c'est bien ce qui m'embête.
1. La population
Après l'extermination des humains par les Cylons, ceux-ci se retrouvent en nombre très restreint, environ 40.000 nous dit-on. Imaginez donc l'Homme et sa civilisation aujourd'hui si cela se produisait. Déjà, il y a une chance pharaonique que tout le cast de Glee soit éliminé, et ça c'est fabuleux.
Mais surtout, voici les premières questions qui me viennent à l'esprit. Quels pays ont réussi à sauver le plus de population ? Ces pays ont-ils imposé leur culture sur le reste de la population ? Imaginez qu'il y n'y ait plus que 80% de chinois ou que toute l'Afrique soit rasé, quelles conséquences cela aurait-il sur les différentes cultures ? Respecteraient-ils les autres populations, ou s'érigeraient-ils en chefs ? Je commence à divaguer, mais appliqué à BSG, j'aurais voulu savoir les différences entre les planètes. On nous dit vaguement que certaines sont pauvres, d'autres plus riches. D'accord mais dans quelles proportions sont-elles représentées ? Pourquoi ne voient-on jamais de différences de point de vue selon les cultures (à part dans un pauvre petit standalone inutile et superficiel) ?
Bon, ce sont des questions rhétoriques car la réponse je pense la connaître, c'est que BSG est une série occidentale et surtout une série américaine. Qu'il y a des budgets, qu'il y aurait des énormes difficultés à tourner dans différents pays, en différentes langues, avec des acteurs de nationalité différente. Oui mais c'est dommage, tout comme les films catastrophes mondiaux où l'action ne se passe qu'aux Etats-Unis. La série V avait fait l'effort appréciable de parler de plusieurs capitales du monde dans ses épisodes, même si l'action restait aux Etats-Unis. Le fait d'avoir différents pays représentés par des acteurs différents (ethniquement, culturellement) avec une histoire bien ficelée m'aurait tout simplement passionné.
Autre interrogation, des métiers ont-ils complètement disparu ? Oui car vous ne vous en êtes peut-être pas rendu compte, mais dans la flotte de BSG, il y a 2 médecins pour 40.000 habitants. J'aurais voulu qu'on aborde des sujets comme le manque de personnes compétentes dans tel ou tel corps de métier (et pas uniquement "il manque des pilotes"). Ce qui me fait arriver sur mon point suivant.
2. La société
Probablement ce dont j'attendais le plus de la série. Etant donné les conditions incroyables dans lesquelles vivent la nouvelle population (nombre restreint, instinct de survie...), j'aurais voulu avoir une réflexion poussée sur l'organisation d'une société. Avec des conditions pareilles, je pensais assister aux tests de différentes sociétés pour voir laquelle fonctionnerait le mieux, laquelle serait la plus juste, laquelle serait la plus efficace. Pourquoi ne pas aller piocher par exemple des idées dans la démocratie athénienne étant donné que la population est au même nombre qu'à l'époque ? Tout ce dont on a le droit dans BSG, c'est d'observer une sorte de dictature militaire couplée à une oligarchie, pour résumer : les Etats-Unis. Nous nous faisons attaquer, c'est l'armée qui assure notre défense et qui gouverne, point barre.
De temps en temps, quand il faut meubler un milieu de saison, nous avons le droit à un épisode où vingt personnes font grève, un autre où Gaius Baltar se découvre une passion socialiste, puis anarchiste, puis hippie.
Mais le reste des épisodes, nous observons l'armée. Que font les 39700 autres personnes de la flotte ? C'est un mystère. On nous dit que certains travaillent 13 heures par jour dans les "mines". Tout ça pendant plusieurs mois, sans jours d'arrêt. Il y font même travailler les enfants il paraît.
La société que nous montre BSG ne tient pas une seconde la route. Il n'est plus censé y avoir de travail à part périodes spéciales (ravitaillement sur les planètes etc), mais les gens restent tranquillement dans leurs vaisseaux, à attendre. Mettez-vous une seconde à la place de Monsieur Michu, le mec moyen de la flotte. Il a le droit à une conférence de presse tous les trois mois pour qu'on lui dise ce que l'armée a décidé. Et il ne bronche pas durant ces mois et années. Il hoche la tête, retourne on-ne-sait-où faire on-ne-sait-quoi de ces journées. Une belote peut-être. Non sérieusement comment tous ces gens se sont-ils occupés pendant tant de mois dans l'espace ?
C'est quand même une vision désespérante de l'humanité qui est proposée dans la série. 39700 loques qui attendent uniquement qu'on leur trouve une planète pour qu'ils puissent reconstruire une maison, aller à la plage et faire des enfants.
Alors voilà ce que j'aurais voulu voir. J'aurais voulu assister à la naissance d'une véritable société, de sa naissance à son organisation et son fonctionnement. Comment la fait-on vivre économiquement ? J'aurais voulu qu'on s'intéresse un peu aux 39700 loques, qu'on sache ce qu'ils peuvent bien faire de leur journée, de leurs interrogations sur le futur de l'humanité. L'unique espoir de trouver une planète peut-il faire survivre ?
J'aurais voulu que ces milliers de personnes se fassent entendre. Alors on y a presque eu droit avec ce super épisode de grève de ravitaillement. Seulement si vous vous souvenez comment il finit, c'est finalement Tyrol qui, sous chantage d'Adama, va "ordonner" aux gens de continuer à bosser. C'est quand même fou ça, les miniers n'ont donc toujours pas de libre arbitre, c'est Tyrol (de l'armée) qui leur dit quoi faire. Quelle grève, même la SNCF en fait des plus costauds tous les mois. Voir plus de 20.000 personnes se soulever contre la société en place, ça ça aurait été bien plus intéressant à regarder.
J'aurais voulu à la place du plaidoyer larmoyant et chamallow au possible de Lee au tribunal sur la justice, que les gens se révoltent que les jurés soient Adama et la Présidente. Parce que toute la flotte a haï Roslin ou Baltar pendant des mois, qu'elle s'est prise des élections truquées dans la gueule, qu'elle s'est faite abandonner sur New Caprica, qu'elle continue à se prendre des mesures dictatoriales en pleine face (non-liberté de culte notamment) mais que personne ne se réveille, je n'y crois pas.
J'aurais voulu que la série ne s'arrête pas là où une des parties les plus intéressantes commence : leur arrivée sur Terre où l'on aurait pu commencer à répondre à comment apprendre des erreurs passées dans l'Histoire ? Le devoir de reconstruire une civilisation n'est-il pas trop lourd à porter ? Après avoir passé autant de mois confinés dans si peu d'espace, l'envie d'indépendance et de solitude aurait-elle pris le dessus ?
3. Les Cylons
Un être avec une intelligence artificielle peut-il avoir des émotions, peut-il être "humain" ? Ah ça pas de problèmes, on en bouffe pendant la série, pas de soucis.
Je ne vais pourtant pas vraiment avoir d'avis sur la question, ni d'ailleurs sur toutes celles concernant la partie sur les Cylons pour la simple raison que je n'arrive pas à concevoir que notre futur peut se passer de la sorte. Et que je pars du principe que je ne peux pas vraiment argumenter pour ou contre quelque chose que je ne conçois pas. La rébellion de l'IA contre l'Homme, c'est strictement personnel et tranché comme point de vue je le conçois mais c'est quelque chose que je relègue au rang des fantasmes qui ne m'intéresse pas vraiment.
Y'avait quand même quelque chose d'intéressant avec les Cylons.
Ces débats sur l'IA me paraissent donc plus ou moins facultatifs. La seule question que je me suis posé tout le long de la série sur les Cylons, elle est simple : "so what ?". Les Cylons veulent trouver la Terre, d'accord et ? Que veulent-ils faire ensuite ? Faire des châteaux de sable ? Vivre comme des humaines ? Mais les humains ne savent déjà pas vraiment quel est le but de leur existence, alors des êtres programmés ? Mystère et boule de gomme, les seules réponses qu'on aura, elles seront dispersées à coup de "Dieu l'a voulu", "C'est ton destin". C'est d'ailleurs la réponse qui sera apportée à toutes les questions intéressantes de la série.
Egalement, il n'y a aucun personnage qui ne croit en rien, le plus scientifique des personnages devient même un schizophrène-paranoïaque-anarchique-ultracroyant. Il n'y a aucun nihilisme. Alors que la situation s'y prête quand même assez fortement. Les "débats" entre le déisme, le polythéisme et la science ne sont pas suffisamment profonds et restent trop mystiques pour en tirer quoi que ce soit. J'aurais aimé des points de vue et dialogues forts sur ce sujet, des choses qui pourraient ressembler à ce qui se fait dans The Man From Earth en moins cliché.
Conclusion
Non vraiment, Battlestar Galactica partait d'un excellent sentiment. Peut-être que le fait d'en faire une série télévisée américaine l'a "forcé" à devenir ce qu'elle est. Peut-être que de votre côté vous avez aimé le triangle amoureux entre Starbuck, Lee et Dee, la moustache d'Adama, ou que vous avez trouvé votre compte dans la série. Peut-être que ce je demande est tout bonnement impossible à réaliser à la télévision et qu'un livre est un support plus adapté.
Mais bordel qu'est ce que ça aurait été bien.