A Serie-All, on aime la diversité et l’éclectisme printanier et on n’hésite pas pour le coup à confronter les points de vue. Pour le retour de la meilleure série du monde et le dernier run du showrunner Steven Moffat, nous avons décidé de séparer les critiques en deux, entre ma personne, adorateur de Moffat et l’ami Tan qui le déteste. Bref, de belles empoignades en perspectives !
Il y a toujours eu en moi deux personnes regardant Doctor Who : une première observant la série avec des yeux d’enfants et la seconde beaucoup plus rationnel n’ayant de cesse de pointer les défauts d’écriture d’un show en construction constante. Dans 80% des cas, la première personne l’emportait sur la seconde. C’est pour cela que j’aime profondément la série car elle est une des seules à laisser son récit m’emporter. Or depuis quelques temps, le schéma semble s’être inversé. C’est un peu triste à dire mais je me sens moins impliqué dans Doctor Who. Et cela, c’est le vrai reproche que je peux faire à Steven Moffat : celui de m’avoir détaché de son récit. Cet épisode de reprise devait apaiser mes craintes comme une gentille nounou câline un enfant un peu bougon. Cela n’a pas été le cas.
Inside Steven Moffat
Partant du principe qu’un bon épisode de reprise se doit d’être clair, l’ami Steven choisit de placer directement son intrigue dans le lieu le plus familier pour le spectateur lambda british : en plein centre de Londres. Renouant directement avec un esprit très classique de la série, le scénario suit le schéma préétabli suivant : une menace à Londres --> Un personnage plus spécifiquement visée (souvent la compagne du Doctor) --> Une intervention du Doctor qui cherche des solutions tout l’épisode en balançant des punchlines classes --> Un gros Deus Ex-Machina qui met tout le monde d’accord.
Soyons clair, de « Rose » à « Eleven Hour » en passant par « Smith and Jones » l’intégralité des season premier de la série fonctionnent de la même façon. C’est même la marque de fabrique numéro 1 de la série, peu importe le showrunner. C’est le premier reproche que j’ai à faire à ce « Bell of Saint Johns », cette absence totale d’innovation. Steven Moffat, à la base, avait été embauché pour redynamiser la série par son sens fameux de l’écriture. Là où Russel T. David s’attachait spécifiquement à prendre le plus grand soin à écrire des personnages riches, Moffat préfère barder son récit d’idées brillantes et d’effets de manche dans tous les sens. On voit tout de suite le problème du showrunner actuel : trois ans après sa reprise en main de la série, l’écossais semble avoir épuisé l’intégralité de ces habiles tours de passe-passe. Et lui-même s’en amuse d’ailleurs, faisant constater dans la bouche même de son personnage principal à quel point il aime entendre la question « Doctor Who ? ».
Je l’avais constaté à plusieurs reprises précédemment et c’est un peu triste à dire, mais Moffat peine beaucoup à se renouveler. En calquant son scénario sur Russel T. Davis (les points communs entre les deux sont trop nombreux pour être listés ici), le showrunner parvient tout juste à susciter chez nous un bâillement contenu, mais bel et bien réel. Le problème est plus général. L’univers de Doctor Who est infini et les possibilités scénaristiques tout autant. Et pourtant, l’impression tenue de toujours voir plus ou moins une même variation d’épisodes ne semble pas s’effacer de mon esprit. Cette réflexion a d’ailleurs inspiré à l’ami Tan le diagramme suivant qui pose clairement les choses :
Inside The Tardis
Alors non, je ne suis pas devenu totalement aigri sur la série et j’y ai trouvé quelques friandises (de Pâques) qui m’ont quelque peu rassasié. Tout d’abord, il est indéniable que la série a encore fait un bon en avant esthétiquement parlant. Je suis toujours surpris des innovations graphiques effectuées dans la quasi-totalité des séries britanniques, service public (Sherlock) ou non (Utopia). Les couleurs sont superbes et la gestion de la lumière assez magistrale. Bref, c’est beau.
Cet esthétisme flamboyant est totalement au service d’un sens de la narration assez génial. Ou pour le dire de façon moins chiadé et comme toujours dans Doctor Who, c’est hyper entrainant. Le scénario a beau être assez simpliste, on court derrière le Docteur qui déploie des trésors d’imaginations pour nous maintenir éveillé. Il est bien là le talent de Steven Moffat, cette capacité permanente à produire des idées merveilleuses tout droit sortie du cerveau d’un gamin de six ans jouant avec ses jouets : « Et pis le Doctor, hé ben, il a une moto…. Et elle vole ! ». Comme me le faisait remarquer Tan, c’est inutile oui, mais c’est fun.
L’autre vraie plus value de l’épisode, c’est la première apparition de la troisième version (définitive celle-là) de Clara Oswald, la nouvelle compagne. Il est tout à fait sûr que le personnage est réussi. Elle court dans tous les sens, sautille, sourit et déblatère des monologues à la vitesse de la lumière. Cela en est presque gênant tant elle apparait comme (presque) identique au Doctor. Cet aspect est en partie expliqué dans l’épisode. Il apparait en effet que Clara semble « absorber » ce qui l’entoure. Toujours est-il que cette nouvelle compagne ne dispose absolument d’aucun background. On ne sait rien d’elle, juste qu’elle met des feuilles séchées dans ces livres. Su-per quoi.
Je me demande d’ailleurs si Moffat ne réutilise pas son idée de base sur Amy. Selon moi, l’écossais avait dans « The Eleven Hour » construit le personnage sur un vide affectif. C’était la petite fille perdue sans famille et sans réelle attache (Rory était loin d’être aussi important à l’époque), « proie » facile pour le Docteur. Dans Clara, je retrouve cette même idée poussée à l’extrême. Espérons juste que tout cela est un but réel et ne soit pas une simple fantaisie d’un scénariste en panne d’inspiration pour un de ses personnages principaux.
Le coin du connard (par Tan)
Afin de célébrer en beauté ce nouveau départ pour la saison 7 de notre série de SF favorite, Koss et moi allons vous proposer deux rubriques. D'abord le coin du connard dans lequel je pourrais m'épancher à loisir et de façon totalement irrationelle sur la moindre faille scénaristique (ou pas d'ailleurs, parce que je ne suis juste qu'un connard). Koss quant à lui, fera le coin du Fan destiné à vous montrer son amour éperdu pour la série.
Pour commencer, j'aimerais porter un dernier hommage à ceux qui nous ont quittés. Enfin non. À celle qui nous a quitté (parce que Rory, on s'en fout). Pleurs et drames dans les chaumières brittaniques... Pour toi Amy Pond :
Quelle beauté aux cheveux de feu !
MAIS NON !!! Je blague ! Franchement vous trouvez qu'on a perdu au change ?
Jenna-Louise Coleman, merci de réabiliter les brunettes qui manquaient depuis trop longtemps dans Doctor Who !
Sur ce je vais vous laisser, parce qu'il faudrait pas non plus que l'écriture de ce paragraphe ne me prenne trop de temps. Non mais ho !
Le coin du fan (par Koss)
- Les forums français et anglais regorgent toujours de types encore plus fan que toi, tout à fait disposés à appuyer sur le bouton « pause » dès que la moindre occasion se présente. Dans la pratique, cela donne la chose suivante :
- L’épisode fait la part belle au retour d’un symbole emblématique de la série qui avait disparu depuis 2005 : le « Saint Johns Ambulance » sur la porte du Tardis. Mais si ! Vous savez bien, ce petit macaron là :
S’il apparaissait furtivement par intermittence dans le show depuis la reprise en main Moffatienne, il donne ici son titre à l’épisode. Dérivée de la Saint John’s Association, association caritative d’aide au premier secours, le logo en forme de croix de Malte était apposé depuis la fin de la seconde guerre mondiale sur toutes les cabines bleues de police, afin de prévenir tout malaises dans la rue (futés ces britanniques !). Ce malin de Steven Moffat, toujours disposé à montrer son attachement à l’histoire de la série, fait ici un joli clin d’œil.
Plus tout à fait du Moffat et pas complètement du Russel T. Davis, « The Bells of Saint John » se situe dans un entre-deux difficile à cerner et laisse malgré lui et malgré le rythme qu’il impose, une impression étrange. Pour regagner notre confiance Steven Moffat, il va falloir que tu nous sortes quelque chose d’inédit. Allez, on se pose gentiment à sa table d’écriture et on bosse.
J’ai aimé :
- Moffat qui se fait plaisir : «11 is the best, you'll cry your eyes out » et « [Twitter is] Human souls trapped like flies in the World Wide Web. Stuck forever, crying out for help ».
- Un coté James Bond pas déplaisant du tout.
- Du fun. A tout les étages.
Je n’ai pas aimé :
- Moffat qui se fait trop plaisir : «Don’t clik ! » et « Run you clever boy and remember ».
- L’étrange sentiment de revoir dix fois le même épisode
- L’absence de fils rouges et de certitudes pour la suite.
Ma note : 13/20.