Pitch retour à la réalité
Alors que Davis croit avoir trouvé les clés du succès, la situation lui échappe brutalement lorsqu'il se retrouve placé sur la touche par la réussite foudroyante de son protégé. Vidé de sa substance, son enthousiasme laisse place à une jalousie destructrice. Antoine Baptiste, lui, va découvrir la réalité de la concurrence. De même, le lieutenant Colson, pour avoir voulu dénoncer les méthodes discutables de la police locale, va se retrouver dans une situation intenable.
La revanche des survivants
Alors que le destin s'éclaircit pour les habitants de la Nouvelle-Orléans, l'heure est venu pour chacun d'entre eux de prendre leur revanche. Pour Davis, la voie du succès lui permet de revenir aux sources en portant son message de résistance et de lutte contre un gouvernement qu'il n'a de cesse de condamner. Antoine Baptiste se sent glorifié par son travail auprès des jeunes, s'imaginant un rôle de mentor qui lui permet d'oublier l'époque des vaches maigres de la saison un.
Pour Delmond Lambreaux, l'arrivée de son père au studio d'enregistrement lui donne la sensation de se rapprocher enfin de lui et d'une culture dont il se sentait de plus en plus exclu. Retrouvant une part des racines, il a l'impression d'unifier ce qu'il était et ce qu'il est devenu, de relier le passé et le présent dans une harmonie parfaite. De même, Ladonna Williams se décide à reprendre le chemin de son bar et de revivre à nouveau en surpassant le traumatisme de son agression. D'une blancheur immaculée, Treme parle d'optimisme et du plaisir de prendre sa revanche, de crier sa victoire sur une destinée particulièrement tragique..
Les langues se délient, le monde redevient un lieu de prospérité et de bonheur où le passé disparaît, chassé par la force de la conviction d'une population qui retrouve l'espoir. Là est le miracle de Treme, avoir réussi à passer de la noirceur la plus forte à un optimisme rayonnant, où les personnages retrouvent leur fierté et la capacité de se battre. Pourtant, David Simon et Georges Pelecanos nous réservent un coup terrible en détruisant tout ce bel optimisme lors d'un terrible retour à la réalité à la puissance dramatique impressionnante.
Le retour à la réalité, une douche glacée
Tour de force spectaculaire que cet épisode qui parvient en une demi-heure à réduire à néant tout l'espoir des personnages, victimes de leur propre arrogance. La réalité ressurgit et vient vaporiser l'illusion d'un monde meilleur dans des scènes d'une violence et d'une cruauté spectaculaires, jusqu'à un final dramatique d'une froideur clinique. Pour Antoine Baptiste, Davis, Ladonna et surtout Delmond, l'illusion du bonheur va être entièrement détruite par un retour brutal à une triste réalité à laquelle personne ne voulait plus croire.
Un basculement terrible à la fois évident et imprévisible, signe de la fragilité de ces moments de grâce où l'être humain croit avoir enfin trouvé la solution à son malheur. Confronté au refus de son père de lui accorder l'amour qu'il mérite, Delmond comprend que tous ses efforts n'ont rien changé, qu'il n'a aucune emprise sur la réalité. De la volonté flagrante d'une hiérarchie de briser un homme à la cruelle découverte de la réalité de la concurrence, la série brise l'esprit léger qui avait empli les derniers épisodes pour décrire la cruauté d'un monde où le bonheur des uns fait le malheur des autres.
Vidant son intrigue de tout espoir, la série fait éclater cette bulle de joie et d'enthousiasme pour mieux plonger chacun des personnages face à la difficulté de voir passer sa chance sans espoir de la rattraper.
L'impuissance, la jalousie et la rancoeur
Après neuf épisodes très réussis, Treme monte en puissance au travers de ce renversement surprenant qui ne laisse que peu de place à un quelconque espoir pour le final. Confrontés à la difficulté de reconstruire une vie, les habitants de la ville auront retrouvé un instant le goût du bonheur pour mieux laisser, encore une fois, s'échapper ce semblant d'harmonie qui s'était petit à petit installé. Sans misérabilisme aucun, les auteurs témoignent de la dureté et de brutalité d'un monde qui ne fait jamais aucun cadeau, et frappe au moment où rien ne le laisse prévoir.
La musique reste la même, mais les modes passent et le groupe d'Antoine Baptiste se retrouve confronté à la volatilité de spectateurs à la recherche perpétuelle de nouveautés. Par son refus des mode et sa soif de continuité dans le récit, Treme nous parle d'un monde que tout le monde connaît, celui de l'échec et de la frustration. Ladonna devient le symbole de cette incapacité à aller au-delà, à dépasser sa propre souffrance, la preuve que vouloir n'est jamais pouvoir.
De nouveaux sentiments surgissent, la jalousie et la colère vienne balayer les espoirs d'un monde qui retombe dans un éclat de violence gratuite et cruelle. Le bonheur a un prix et il est temps pour chacun des habitants de payer la note.
J'aime :
- un renversement de ton puissant et superbe
- des comédiens remarquables
- un réalisme toujours aussi remarquable
- une réalisation impeccable
Je n'aime pas :
- l'intrigue de Janette qui semble hors contexte
Note : 16 /20
Après nous avoir fait croire à des lendemains qui chantent, David Simon nous plonge dans un profond désarroi et chasse l'illusion du bonheur pour ne laisser que la triste réalité d'un monde toujours en convalescence. D'une grande force, le récit nous mène vers un final qui devrait être celui des espoirs déçus pour les habitants de la Nouvelle-Orléans.