Pour moi qui n'ai jamais aimé le principe un peu mesquin des séries qui consiste à faire attendre le spectateur en lui soumettant une oeuvre inachevée, cet épisode me laisse amer. Ils ont voulu, en un seul épisode, conclure le thème de cette première moitié de saison tout en introduisant celui de la seconde. La clôture comme l'ouverture sont donc un peu hâtives, et ce uniquement pour satisfaire l'exigence du cliffhanger. Ce moment depuis si longtemps espéré par le spectateur où Hank établit clairement un lien entre Heisenberg et son beauf est complètement gâché. Tant d'efforts pour un misérable coup de chance qui intervient après une longue ellipse temporelle durant laquelle les choses se sont visiblement tassées, c'est vraiment pas clean. J'irais même jusqu'à dire que ça fait un peu grosse ficelle d'amateur. Enfin, je parle d'un coup de chance... quand la chaîne causale (et même intestinale) qui mène Hank dans la salle de bain de Walter rencontre la chaîne causale qui mène le livre dédicacé dans icelle salle de bain, ce n'est pas un coup de la chance mais plutôt un coup de la stupidité de Walter. Pardon ? Walter White serait imprudent, inexpérimenté, et ignorant en matière de dissimulation ? Je ne le connais pourtant pas comme ça depuis quelques temps. Je trouve que tout ça est un peu bâclé pour de sales raisons, et ça me déplaît drôlement. Finalement, je regrette de n'avoir pas eu une seule véritable saison de 13 épisodes.

Je me laisse aller à mettre une note élevée parce que je n'ai rien à reprocher à cette reprise de Breaking Bad. Ils m'ont fait l'immense plaisir de ne pas céder à la tentation de repousser la confrontation Hank/Walt, et poursuivent sur cette voie en nous servant sans lambiner tous les duels tant attendus. Le boulot est très bien fait, de ce point de vu là, je n'ai rien à redire, chaque scène est au niveau. En revanche, je suis un peu frustré par la cadence : elle me semble encore plus soutenue que dans la 5-A, et ça me perturbe quand je songe aux longs traitements qu'ont reçu, tout au long de la série, certains points de l'intrigue insignifiants comparativement aux évènements qui se jouent en ce moment à une vitesse folle (l'histoire de Marie la chapardeuse va-t-elle aboutir un de ces quatre ?). Je pense que les scénaristes se sont senti à l'étroit avec ces huit épisodes, et qu'il leur aurait sans doute été préférable de travailler sur une saison de 13 épisodes pour clôturer tout ça. Breaking Bad ne respecte pas vraiment l'équilibre des actes dans la tragédie... Le parterre des théâtres parisiens du XVIIème en serait horrifié, et j'avoue que ça me titille moi-même un peu... M'enfin, Vince et ses potes n'y pouvaient pas grand chose je crois. Sinon, je suis étonné de voir que Hank et sa copine font front contre Walt. On aurait pu imaginer qu'un cas de conscience se poserait pour Hank et Marie, mais visiblement ils ont les idées arrêtées sur la question : Walt est un bâtard à coffrer d'urgence. C'est plutôt inattendu, mais ça ne me déplaît vraiment pas que l'intrigue se polarise. Ca fait gagner du temps, et on est pressé.

J'ai fini par craquer émotionnellement au moment où Walt, devant le spectacle de son fils protégeant sa mère, prend conscience de l'état dans lequel il a plongé sa famille. J'ai vraiment versé des larmes singulières qu'aucune oeuvre cinématographique n'avait fait couler de moi jusque là. Il s'est agit, et ça n'a rien d'extraordinaire, d'une tristesse par empathie, mais accompagnée de surcroît, et ça c'est tout à fait nouveau pour moi, d'un craquage psychologique provoqué par la tension. Je pleurs quand on sort les violons, jamais pendant une scène d'extrême tension... Ce subtile mélange d'émotions que sont parvenus à susciter en moi les ouvriers de la série vaut bien un 20. Ca a été une expérience unique dans ma vie de téléspectateur. Il y aurait beaucoup à dire sur l'épisode, mais je me contenterais de souligner la beauté de cette scène où Walt fait rouler son tonneau. Le clin d'oeil au vol de méthylamine est, je trouve, très amusant ; et surtout, l'image du Sisyphe très éloquente. Walt n'aura jamais cessé, tout au long de la série, de gagner, puis de perdre, puis de regagner cet argent ; dans un but précis, certes, mais pour un résultat final absurde : une quantité phénoménale de flouze enterré dans le désert, puis une quantité de flouze raisonnable qui ne profitera jamais à ses destinataires...

Bon épisode, mais avec encore une grosse réserve sur Junior, qu'ils persistent à bâcler comme des bourrins... Pour le dernier épisode, j'espère vraiment qu'ils ne vont pas partir sur une simple histoire de vengeance entre Walt et la Jack's bande.