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"Just Make Money". Le conseil que donne Lalo à Saul s'applique en réalité comme mantra pour l'ensemble des personnages de la série. Lalo n'est pas différent de Gus sur ce point, ni moins de Kevin. Et encore moins de Peter Schuler que Gus parvient à convaincre en jouant la comédie comme il l'a toujours fait. C'est le nerf de la guerre. "Just follow where the money goes" disait-on dans The Wire et on pourrait appliquer la même chose ici. La monaie achète tout. L'éthique de Saul, bien que freinée par Kim (et encore que...) Le calme de Peter Schuler. La libération de Lalo ("7 Millions ? Not a problem"). Et ce, au dépend de la famille en deuil.
Il y a aussi cette formidable scène finale d'explosion de Saul face à Howard. Une scène qui a sonné, pour moi, très David Tennant à la fin de The End of Time dans Doctor Who, (" I can travel in worlds you can’t even imagine! You can’t conceive what I’m capable of! I’m like a god in human clothing! Lightning bolts shoot from my fingertips!“ " dit même Saul). Et on sait tous bien comment se termine ces deux histoires.
"She is in the game."
Quand Better Call Saul a été annoncé, beaucoup de fans se sont imaginés une série, telle que nous la présente cet épisode : Mike, Saul, des gangsters et le désert. C'est nettement l'épisode de BCS le plus proche de Breaking Bad. C'est d'ailleurs pour cela qu'il est dirigé par Vince Gilligan, qui s'était pourtant un peu éloigné du show. C'est l'autre versant de l'épisode "4 Days outs" où Jesse et Walt se retrouvaient seuls dans le désert et il y a même des rappels au pilot de la série, à l'épisode To'hajiilee mais aussi à El Camino quand Jesse va dans le désert avec Todd.
Là où Walt utilisait son intelligence pour s'en sortir, Saul se sauve avec Mike en faisant la seule chose pour laquelle il est doué : une arnaque. Là où l'épisode touche au génie (et je pèse mes mots), c'est que pour se faire, il utilise la couverture de survie, qui renvoit bien évidement à son frère pour se faire. Couverture qu'il avait d'ailleurs évidemment refusé lorsque Mike la lui tend la nuit d'avant. Chuck n'est absolument pas présent dans cet épisode, son fantôme est pourtant bien présent dans toute la dernière saison. Il y a quelque chose d'absolument poignant à voir Saul revêtire une dernière fois les habits de son frère pour s'en délaisser une fois le coup réussi, avant que Mike ne la piétine dans un dernier plan saisissant.
Quel épisode ! Un des tous meilleurs de la série, qui touche plusieurs fois au sublime, notamment dans cette scène où Mike explique à Saul qu'il fait tout ça pour mettre sa famille en sécurité. Or, ayant regardé Breaking Bad, nous savons bien que sa belle-fille et sa petite fille n'auront pas l'argent. L'absurdité de l'ensemble de la situation et le tragique du personnage du personnage de Mike est ainsi immédiatement souligné et renforcé par le ton que prend Jonathan Banks quand il prononce ce mantra.
PS : La cadillac nettoyée en début d'épisode est peut-être celle que Saul aura dans Breaking Bad, surtout maintenant qu'il n'a plus de voiture.
L'amour et la haine ne sont pas des sentiments très différents.
Saul et Gus (pour une fois) n'ont pas été des hommes rigoureux et on laissé des trous derrière eux. Trous que Kim, puis Lalo vont bien entendu trouver, comme une plongée directe dans l'âme de Saul. La haine que ressent Lalo pour Saul est aussi infinie que l'amour que Kim lui porte. Jamais dans aucune série je n'ai vu un aussi beau et fort acte d'amour d'un personnage envers un autre. Il y a d'abord ce moment où Kim explique à Saul qu'il peut se confier à elle, ce qu'il ne fait bien évidemment pas. Et puis, il y a cette fin où Saul et Kim passent litéralement en thérapie de couple, avec un psy qui a un gun. Saul a peut-être perdu sa magie de magic man dans le désert, mais il n'a pas perdu son dernier atout, qu'il ne perdera plus jamais (y compris avec Jesse et Walt dans le désert) : son incroyable capacité à mentir et à s'en tenir au mensonge. Même à sa femme. Même alors que sa propre vie et celle de sa femme est menacée.
Survient alors la plus belle action d'amour que j'ai vu et qui m'a mis les larmes aux yeux : la défense de Kim, qui va raconter absolument n'importe quoi à Lalo, qui va se Saulifier sous nos yeux, en définissant Saul par tout ce qu'il n'est pas : "Un homme qui ne ment jamais, ni à moi, ni à ses clients." Quelle scène ! Quel dernier quart d'heure ! Le plus beau sans doute du Breaking Bad verse. Une déclaration infinie, immense, un saut dans le vide pour un homme (et c'est montré juste avant) qui n'est absolument pas capable de la même chose.
C'est peut-être cette route de l'amour qui sera le Bad Choice Road de Kim, mais dieu, bon dieu, qu'elle est belle.
Chef d'oeuvre.
PS : Info intéressante de l'épisode : nous sommes bien en 2004 et il reste 11 mois avant la sortie de prison de Tuco. Breaking Bad commence elle en 2008.
PS 2 : Le film que regarde Kim et Saul plus tôt dans la série est "La Dame du vendredi" d'Howard Hawks. Ce film parle de la relation malsaine entre un homme et une femme qui ne cesse de revenir vers lui, parce qu'il est très charimatique et assez menteur. Ce personnage, joué par Gary Grant s'appelle d'ailleurs Walter.
"This. It's not you."
Le chemin de Kim est une boucle. De la salle d'archive de HHM où Saul l'a trouvé en saison 1, à la salle d'archive d'un tribunal dans cet épisode. Le premier est un travail aussi ingrat que le second, mais il prestigieux. Il montre l'importance de l'entreprise, son historique (ce dont l'Amérique manque, par ailleurs, cruellement) et sa crédibilité. La face de la seconde archive est tout autre. Ce sont les failles béantes d'un système à l'agonie (et il est le même en France). Tous les laissées pour compte, ces cas, ces vies empactées dans des boites et dont tout le monde se fout, par manque d'argent et parce que ce n'est pas rentable.
C'est pour eux que Kim se propose de rendre la justice à la manière du cowgirl à la toute fin de cet épisode. Se faisant, elle reproduit le trajet inverse que Saul avait fait quelques épisodes pour passer de la chambre à la cuisine. Cette fois, c'est l'avocat qui reste seul, avec ces certitudes, sa surprise et son son saut dans l'inconnu, tandis que la caméra recule lentement (le même mouvement qu'il y avait sur Kim à la fin de la saison 4, dans le tribunal). Kim est devenue Saul et l'avocat, cette fois, reste seul.
Mais ne nous trompons pas, Kim ne fait pas cela pour les autres. "I did it... Because i liked it" dit Walter à sa femme à la fin de Breaking Bad. Il est en bien sûr de même pour elle. C'est une rage qui vient sans doute de l'intérieur, du plus profond de son enfance, son envie (et elle apparait maintenant au grand jour) de faire vengeance, contre ces millionnaires et ce système qui écrase tout le monde. "Revenge" disait Gus à Mike. Kim l'a bien compris, quitte à tout faire brûler.
Un mot quant même sur Lalo, extraordinaire méchant. Le plus fort et le plus beau, Gus excepté. La règle Hitchockienne du "Plus le méchant est bon, meilleur est le film" n'a jamais été aussi vrai et cela sera le cas en saison 6. On connait, en tout cas, désormais, le fond de la phrase que Saul lachait à Jesse et Walter : “No, it wasn’t me. It was Ignacio [Nacho]. He’s the one. Lalo didn’t send you ? Oh thank god!"
Incroyable saison, qui a tout reversé et qui a définitivement instauré Kim tout en haut, confirmant qu'elle est bien l'héroine du show, la seule donnée non maitrisable, disons. Je continue de croire qu'elle sera là dans Breaking Bad, tirant les ficelles. L'envie de voir une dernière saison de série n'a, en tout cas, jamais été aussi forte. What a ride.