Avis sur les séries
Avis sur les saisons
Avis sur les épisodes
"There's proving and there's knowing" dit Bill.
On pourrait résumer l'ensemble des deux séries comme ça. Deux shows dans lesquels les personnages laissent peu de traces derrière eux et où l'effacement des preuves prend souvent plus de temps que l'action elle-même. Et la plupart du temps, cela ne suffit pas. Puisqu'"on" sait. Que le spectateur sait.
Ce qui est amusant est que l'épisode fait… Exactement le contraire de cet adage. Cliff Main a besoin de "preuves" pour penser qu'Howard prend de la coke (même s'il y est plus sensible à cause de son fils), le spectateur voit les preuves de l'illusion dans lequel se berce Saul "Personne ne sait ce qu'on fait !" et on voit même les preuves de la toute puissance de Gus. Ce moment où Walter (saison 4, épisode 2) va pour tuer Gus chez lui et est arrêté par Tyrus au téléphone prend rétrospectivement une tout autre signification. L'absolu ridicule du personnage de Walter White est encore une fois souligné par la seconde série.
Il y a, enfin, un jeu très amusant entre le spectateur et Giligan. Ce dernier ayant lancé lors de la saison 1 que Wendy et Kim était la même personne, comme une sorte de blague. On sait bien sûr que c'est faux (même si pas mal de gens y ont cru), mais Giligan a quand même voulu débucker par la preuve cette théorie.
Finalement, il y a un seul élément qui n'a pas besoin de preuve pour que tout le monde sache qu'il est dangereux : Lalo. Le Salamnaca, dont la simple absence inonde tous les plans (Mike : "Personne ne sait où il est". Cut. Plan sur Kim de plus en plus parano). Difficile en effet de savoir ce qu'il prépare, mais comme dans tout bon film de Spooky monsters, son absence est peut-être plus terrifiante que sa présence. Le meilleur plan pour lui (et pour moi) serait d'aller en Allemagne pour faire un coucou à la femme de Werner, ce qui permettrait enfin de justifier cet affreux arc du tunnel.
PS : Ce qui est génial dans la scène de rencontre entre Kim et Mike, c'est la fin. Quand l'avocate se rend compte qu'un simple gardien de barrière peut devenir quelqu'un de puissant. Et pour quelqu'un qui a vécu dans la peur toute sa vie (son père, les cabinets d'avocats, le système, etc), on peut sans nul doute s'imaginer l'effet que ça pourrait lui faire de ne plus avoir peur.
Je n'avais jamais vu ça : un épisode dans lequel il ne se passe strictement rien. Cela en est même vertigineux.
Tout le monde est en attente. Comme figé dans la glace du suspens en attente de Lalo. Cette série a vraiment l'art du contre-pied. Il ne reste pas tant d'épisodes que cela et je pense sincèrement qu'on aurait pu passer plus de temps sur d'autres points. Le personnage d'Howard, par exemple, aurait sans doute mérité plus de temps d'antenne, et ce, depuis bien longtemps.
Il y a même d'étranges facilités, comme cette scène où Gus prend soudainement l'envie de retourner voir son super laboratoire secret, afin que le spectateur fasse la connexion dans son esprit avec la femme de Werner (en même temps, c'était il y a quatre ans, donc je peux comprendre). Un fan sur Twitter a pointé le fait que la commande des "frites spéciales" avait fait penser à Gus à l'Allemagne, car il les avait fait tester à Schule lors de la denirèe saison. Donc Schule = Madrigal = Allemagne = Faiblesse pour Gus. Comme d'habitude avec le Breaking Saul verse, tout est justifié et bien écrit, mais l'effet reste quand même là. Un peu maladroit et lourdaud.
"It happen today !"
Sauf que non en fait. C'est déjà arrivé. Et ce, depuis bien longtemps. Kim a déjà pris sa décision. Son choix de faire demi-tour renvoie d'ailleurs immédiatement à la scène de la saison 1 où Kimmy roulait sur la ligne opposée de la route, après avoir refusé le rdv avec Cliff Main. Kim ici refuse la même chose. Les deux éléments sont liés et comme prévu depuis longtemps, Kim va Breaking Bader.
Et ça, pour être tout à fait honnête, cela me pose un problème dans le déroulé de l'épisode et tout particulièrement avec son ouverture. Avait-on réellement besoin de revoir une scène de flashback de Kim et de sa mère ? La série oscille étrangement cette saison entre plans ultra tarabiscotés dont il faut deviner le déroulé a posterio (le "clone" de Lalo, Gus qui cache un flingue dans le labo, l'intégralité des coups de Kim-Saul, etc.) et un bon gros soulignement en rouge de la psychologie des personnages. "Oh, mais adulte Kim aime outrepasser la loi, car sa mère lui a montré qu'elle pouvait s'en tirer sans dommage !" Franchement, je suis désolé, mais je trouve cela complètement con (et ce même si Kim porte les fameuses boucles d'oreille depuis le début de la série). On est vraiment sur de la psychologie de comptoir.
Ce changement permanent entre brouillard opaque et lumière aveuglante créé une sorte de distanciation pour le spectateur. Celui-ci passe son temps d'une part à se creuser la tête sur des plans incompréhensibles qui se résolveront par un micro-détail de dernière minute et d'autre part, par une vraie tentative d'aller au-delà de la simple évidence psychologique de qui nous est présenté (et qui ne comporte souvent pas plus de profondeur que cela). Pour Gould et surtout Giligan, c'est un problème qui est irrésolu depuis le début de la saison 1 de Breaking Bad. C'est réellement leur angle mort absolu qui empêche (pour moi) et pour l'instant ce spin-off de tutoyer les étoiles.
Les plans. Aaah, c’est formidable les plans... Tu sais comment les créer. Comment les exécuter. Et comment les amener jusqu’au bout. En faisant fi des aléas. Mais ce que tu ne gères pas, ce que tu ne peux pas contrôler, ce sont les conséquences. Comme toujours dans Breaking Saul.
Howard sait éviter l’explosion des canettes de sodas. Par une petite rotation, répétée dans le temps. L’exact même rotation répétée dans le temps qui conduit Howard dans la demeure de Jimmy et Kim, là où précisément, il pensait reprendre la main et le contrôle de la situation. De tous les personnages absents de Breaking Bad, Howard était (et de loin) celui qui avait le plus de chance de rester en vie. Mais seulement voilà, il a suffi que Mike pose un micro dans la maison de retraite pour que Lalo change ses plans. Encore une fois, au jeu des causes conséquences, la série s’avère être la meilleure.
Sa mort est véritablement tragique. Je crois bien que c’est le seul personnage qui passe de « méchant » à « bon » dans cet univers. Il aurait sans doute mérité plus de développements d’ailleurs, là où ce spin off s’est parfois attardé sur des problèmes superflus. Il le dit d’ailleurs lui-même aux deux zigotos, terrorisés après coup : « Qu’est-ce que je vous ait fait ? » Et leur silence de défense, coupable, est la preuve du total absence de logique de l’ensemble.