Bien sûr que si on arrive à choisir un camp. Moi c'est Daenerys depuis le début, et tous les autres ne "m'intéressent" pas lorsqu'on en revient à la thématique du pouvoir. Et le manichéisme n'a jamais vraiment existé si ce n'est par Ned Stark qui incarnait le bien, tous les autres ont toujours eu leur part d'ombre. Entièrement d'accord avec CFF, il y a largement la place pour développer deux ou trois intrigues associées soit géographiquement, soit politiquement, soit généalogiquement... et ne s'attarder que sur elles pendant un épisode, puis passer sur un autre groupe ensuite... dans The Wire par exemple y'avait pas 15 intrigues mais il y avait beaucoup de groupes, beaucoup de personnages, c'était très riche, et ça n'a jamais semblé aussi décousu (peut-être en saison 5 avec la presse) que Game Of Thrones. Et ça c'était une réussite. Et je demande même pas aux scénaristes de faire en sorte qu'on s'attache à tout le monde, mais au moins qu'on s'attache à quelqu'un. En 3 saisons, il n'y a que Ned et Daenerys qui m'ont vraiment fait ressentir quelque chose...

ouah c'est bien intéressant tout ça. Juste un ptit truc à rajouter : là où je pense qu'on a un "avantage" quand on a lu les livres, c'est vis à vis de l'attachement aux personnages, justement. J'avoue que j'ai beaucoup de mal à me mettre dans la peau de quelqu'un qui découvre cette histoire à travers la série pour cette raison. Tous ces personnages dont vous voyez des bribes à l'écran, on a été dans leurs têtes pendant des milliers de pages quand on a lu le bouquin. Forcément, on ne porte pas le même regard sur eux.

Ben ouais, là est bien le problème...

Pour ceux qui pensent qu'ils apprécient la série parce qu'ils apprécient le bouquin, rappelez vous comment le public est souvent / toujours très dur avec les séries ou films qui adaptent les livres qu'ils ont lu. Combien de fois avons vu lu quelque part, de toute manière c'était mieux dans le livre ? Là où je veux en venir c'est que lire le livre avant avantage rarement (si ce n'est jamais) l'adaptation. Je peux d'ailleurs le montrer très facilement pour GOT. Regardez les notes. Vous verrez qu'il n'y a pas un écart assez important pour laisser place à une différence significative entre ceux qui ont lu le bouquin et ceux qui ne l'ont pas lu. Par conséquent ceux qui n'ont pas lu le livre, apprécient la série autant que ceux qui l'ont lu. Autrement dit le fait de lire le livre n'a pas d'impact sur l'évaluation de la série.

Ah j'allais parler de The Wire justement ! Scarch, tu dis qu'il n'est pas possible de créer un attachement aux personnages, tout en jonglant avec 15 à la fois. Sauf que si. The Wire en est la preuve. On peut le faire, et je pense même que c'est bien plus aisé qu'il n'y paraît. Prenons le tout dernier épisode. Qu'est ce que ça aurait coûté de revoir le montage, pour suivre Arya et le gros colosse (me rappelle plus du nom) pendant les 10 premières minutes ? Là y'aurait un vrai suivi, et du temps pour créer de l'émotionnel. Mais non, on choisit d'entrecouper ça par une scène de discussion très calme et posée à Portréal. Wtf ? C'est vraiment pas le moment, et juste pas pertinent du tout. Ben c'est pareil pour le reste de la série. Les scènes ne se répondent jamais, il n'y a pas vraiment de courbe d'évolution logique ou naturelle dans un épisode, juste des tableaux qui se suivent, remplis de symboles, de jolis phrases, et d'une volonté de bien faire qui transpire à l'écran. Mais les tripes et l'inspiration n'y sont pas. Les scénaristes se contentent d'assembler les pièces d'un puzzle, sans jamais vraiment réaliser ce que c'est, de raconter une histoire. GoT, c'est une de ces œuvres dont l'image a pris le pas sur l'âme. Ca ne veut pas dire que c'est mauvais, ça veut juste dire que la série s'est cristallisée dans une sorte de représentation d'elle même, de telle manière que plus rien ne peut venir du cœur, car tout vient de l'extérieur. Elle est comme le mec qui au contact du groupe agit différemment : elle est écrite en fonction de ce qu'elle devrait être, de comment elle devrait être perçue par une majorité, et non pas juste écrite en tant que telle. C'est ça, je pense, qui sclérose les émotions de certains d'entre nous par rapport au show, c'est qu'elle ne sonne pas "vraie", elle n'a aucun élan créateur. C'est une adaptation dans le plus pur sens du terme, en fait. Alors vous parlez de symboles, de niveaux de lecture, et de pistes de réflexion, je veux bien, mais qu'est ce que ça vaut tout ça, si derrière il n'y pas de passion dans la narration ? Il suffit pas que les scénaristes se disent (comme ils le font quasi tout le temps) "tiens on va faire une scène remplie de niveaux de lecture", pour que ça nous touche. Il suffit pas de foutre des symboles à tout va pour que ça nous parle. On va peut être retirer du visionnage de la scène un plaisir purement intellectuel et mental, mais ce sera tout. L'émotionnel et les sensations sont quant à eux absents de l'équation. Selon moi, cette série est une construction purement mentale, pratique, et fonctionnelle. Toutes les scènes sont là "dans le but de", afin de toucher un certain répertoire, de sonner d'une certaine manière, etc, etc. Mais il n'y jamais de véritable ardeur dans cette construction. Du coup je comprends un peu le buzz de la série, et je ne peux pas dire qu'elle soit surcotée. Elle est appréciée comme elle devrait être appréciée, car les scénaristes excellent à polir au maximum le bel objet qu'ils ont entre les mains. Quand ils oseront rentrer dans le cœur des choses, là on pourra peut être parler de chef-d'oeuvre. En attendant pour moi ce n'est qu'une série d'excellente facture, que je me délecte à regarder sur un plan intellectuel, mais qui ne me touche quasiment jamais (à part lorsque les images sont particulièrement puissantes). Voilà. Je sais pas si j'ai été très clair, je rentre du boulot, et il fallait à tout prix que je poste un avis avant de me coucher sinon j'allais tout oublier o/ Et je suis d'acc avec Altaïr pour dire qu'il y a une nette amélioration en saison 3 par rapport à la 2.

si si c'est extrêmement clair gouloudrouioul et très justement dit.

Goulou <3

En même temps c'est un peu cruel de comparer GoT avec The Wire - cette série est quand même vraiment hors catégorie niveau qualité d'écriture !

Quand on entend ici et là que Game Of Thrones est la meilleure série de tous les temps, forcément on est obligé de comparer avec d'autres très grandes séries. Et pour moi, au niveau de la qualité d'écriture, de la profondeur des personnages, de la maîtrise du rythme, elle se retrouve loin, très loin du trio magique d'HBO The Wire / Six Feet Under / Les Sopranos. En ce sens elle est légèrement surcôtée. Alors pour les deux dernières c'est un peu plus facile de donner de la profondeur aux personnages je le reconnais sans problème vu qu'on se concentre sur moins de personnages et moins de storylines, mais pour The Wire on l'a déjà dit, c'est dense et c'est maîtrisé. Donc c'est possible pour Game Of Thrones. Après, pas la peine de développer plus ma pensée, Goulou l'a formidablement bien fait pour moi.

Aaah, en voilà une réponse intéressante Goulou ! je vais essayer d’être exhaustif : 1er paragraphe : Si on joue à GOT vs The Wire, le jeu n’est pas équitable pour la seule raison que The Wire est une série complète et donc bouclée, ou les arcs ont eu un dénouement. Pour GOT, même le roman n’est pas bouclé En plus de cela, je ne peux pas participer à la partie car je n’ai pas vu the Wire. Cela dit, si je me fie à ce que j’en ai entendu, c’est une série réaliste, les bases sont déjà posées, c’est la réalité. Il n’y a pas besoin d’installer une mythologie, une spiritualité, un système féodal et de présenter trois régions du monde. Il est donc plus simple de se concentrer sur les personnages et de laisser la place libre à l’intrigue. Encore une fois, le « bien plus aisé qu’il n’y parait » me semble être à mettre en perspective. Mais je l’ai déjà expliqué plus haut. 2eme et 3eme paragraphe : Hum, je pense que depuis le début, GOT gère l’émotionnel à sa manière et encore une fois ce n’est pas une série bouclée. Il est totalement subjectif de penser qu’un montage est préférable à un autre tant qu’on ne connait pas l’aboutissant de tout ça. De plus, je n’ai pas l’impression qu’Arya et le limier soient là pour qu’on s’y attache. Elle est en train de devenir une psychopathe et lui commence à s’attendrir. Il faudrait sortir du débat sur l’attachement aux personnages ou trouver un accord consensuel… Certains trouvent que les personnages sont attachants, et d’autres pas assez. « juste pas pertinent du tout. » « les tripes et l'inspiration n'y sont pas. Les scénaristes se contentent d'assembler les pièces d'un puzzle, sans jamais vraiment réaliser ce que c'est, de raconter une histoire. » Qu’est-ce donc que raconter une histoire ? Est-ce que c’est la structurer en épisodes et faire en sorte que la personne qui écoute/voit ait envie de continuer l’histoire ? Là aussi c’est subjectif et un peu facile de dire que ce n’est pas pertinent et qu’ils ne savent pas ce que c’est que de raconter une histoire. Encore une fois, ce format - 10 épisodes d’une heure par saison - impose des sacrifices. Après il faudrait me définir la structure parfaite sans citer un épiphénomène de fin de saison ou toutes les trames doivent s’ouvrir pour la suivante. Et pas non plus UNE structure, c’est-à-dire décomposer l’ensemble de l’histoire de Martin, la découper en saison, puis en épisode, et faire le choix des trames sans perdre le spectateur. De mon point de vue, ces scénaristes savent parfaitement bien raconter une histoire vu que malgré sa complexité, je suis capable (tout comme toi, j’en suis sûr) de me rappeler de chaque trame, de voir ce qui les lie, d’envisager un passé à l’ensemble et aussi un dénouement dont je suis de moins en moins sûr parce que l’histoire justement nous réserve des surprises. Pour le reste, dire que les trippes n’y sont pas, je ne compte plus le nombre de « séquences émotions » que j’ai vécu dans cette série. La mort de Ned, la rebellion du peuple contre Geoffrey et la tentative de viol sur arya, la tête de Ned empalée, la mort des loups, la bataille de darkwater, l’histoire d’amour entre Jon et Ygritt… Je ne vais pas toutes les citer mais bon… de ce que j’ai entendu sur The Wire, ce n’est pas non plus une série qui accroche juste par sa photographie et ses dialogues fun. Il faut s’accrocher, il faut rentrer dans l’histoire. 4eme paragraphe : ça veut juste dire que la série s'est cristallisée dans une sorte de représentation d'elle même, de telle manière que plus rien ne peut venir du cœur, car tout vient de l'extérieur. Elle est comme le mec qui au contact du groupe agit différemment : elle est écrite en fonction de ce qu'elle devrait être, de comment elle devrait être perçue par une majorité, et non pas juste écrite en tant que telle. C’est joli, mais ça pourrait être écrit non seulement pour TOUTES les séries, mais également pour le cinéma, la musique… voir même tous les arts. Du moins ceux qui sont populaires. Je pense que si je peint un tableau surnaturelle sans qu’il n’y ait aucune clé de compréhension, ben je resterais le seul à le comprendre. De la même manière que tout le monde agit différemment au contact d’un groupe. L’ego prend le dessus et s’adapte à son environnement. Espérer qu’une série reste fidèle à elle-même au mépris de son public, c’est prendre le risque qu’elle se viande totalement et qu’elle disparaisse. Même si Breaking bad est une série qui à de grosses corones, ben elle n’échappe pas à la règle : la série s'est cristallisée dans une sorte de représentation d'elle même, de telle manière que plus rien ne peut venir du cœur, car tout vient de l'extérieur. Elle est comme le mec qui au contact du groupe agit différemment : elle est écrite en fonction de ce qu'elle devrait être, de comment elle devrait être perçue par une majorité, et non pas juste écrite en tant que telle. Sauf que la subjectivité et l’immense amour que je porte pour cette série me fait me dire qu’en fait non ^^. Après, tu réponds toi-même à ta remarque. C’est une adaptation. L’écrivain est consultant et scénariste sur la série. Le mec à des millions de fans, c’est devenu une pointure de la littérature et le scénariste va arriver, poser ses couilles sur la table et lui dire « écoute Georges, ton histoire elle est sympa mais moi j’trouve qu’elle est désincarnée ». Réponse : « Ok, jeune padawan, fait mieux que moi »… 5eme et 6eme paragraphe : J’avoue : la masturbation intellectuelle est mon sport préféré. Parce qu’elle suppose de l’émotionnel. C’est presque jouissif de se rendre compte qu’au-delà de l’image, il existe d’autres niveaux de lectures en filigrane. Cela fait intégralement parti de l’émotionnel et si je laissais parler ma subjectivité, je dirais qu’il vaut mieux obtenir une jouissance cérébrale qu’une jouissance purement émotionnelle. Parce que faire du mélo et tirer sur les grosses cordes de l’émotion, ça me semble plus simple que d’amener le spectateur à comprendre les enjeux pour qu’il s’en émeuve lui-même. Mais tout comme toi, c’est purement subjectif. A vrai dire, là, ça me parait difficile d’être objectif sans être consensuel encore une fois. Je dirais juste qu’il suffit d’allumer sa télé pour voir à quel point il est facile de jouer sur l’émotionnel pour au contraire empêcher le téléspectateur de réfléchir. C’est peut-être justement ça qui nous plait à nous autres, les pros : la caméra ne prend jamais de point de vue. Elle semble se déplacer dans ce monde en ne faisant qu’observer. Ce n’est pas un reportage Tf1, c’est un reportage Arte. Du coup, pour répondre à ton dernier paragraphe, je suis au contraire content que la série ait pris le partie d’être compréhensible sur plusieurs niveaux et d’amener le spectateur à s’émouvoir par lui-même, en comprenant les tenants et aboutissants de chaque scènes. Pourquoi obligatoirement prendre le parti d’imposer une ame à une œuvre quand celle-ci dispose déjà de la sienne ? L’ambiance y est, les personnages sont crédibles, l’intrigue même si elle n’est pas assez bien structurée pour vous est, malgré tout et en la regardant avec du recul, formidablement bien ficelée, on « connait » chaque famille et pourtant… on sait qu’il n’y en a pas un qui est éternel. Il n’y en a pas un auquel on pourrait prendre le risque de s’attacher en ayant la certitude qu’on aura pas le cœur déchiré au bout du compte. Donc j’ai compris : pour toi, c’est juste une bonne série. Pour moi, en admettant qu’elle reste sur le même rythme ou qu’elle prenne encore de la vitesse, elle n’aura pas volé sa place au panthéon de la série TV avec Breaking Bad, The wire (même si je ne l’ai pas vu) et autre 6 feet under. Et c’est surement parce qu’elle amène des discussions comme celle-là, ou mine de rien on se titille le bout du cerveau. Ou encore parce qu’après chaque épisode il faut faire le point de la somme d’information reçue, et de manière fort esthétique qui plus est, pour l’intégrer à notre anticipation des évènements. On joue perpétuellement contre cette série, et on perd la plupart du temps parce qu’elle ne répond pas aux codes habituels. Enfin, c’est pour ses multiples niveaux de lectures, pour le fait qu’elle soit conseillée par des profs à leurs élèves de philo parce que c’est plus simple à comprendre que, disons Machiavel (cf le 20 minutes de ce matin), pour ses antagonismes (Hodor/Thirion, Littlefinger/Varys), pour sa manière d’amener l’inconnu (ce qu’il y a au-delà du mur est d’abord présenté comme étant tout dans le même panier, tous des morts vivants assoiffés de sang, alors qu’il y a des sauvageons, des royaumes, et même un roi au-delà du mur) et pour sa manière de rester neutre dans la narration. Vouala, à vous ^^.