Comme pour Mort sur le Nil, la série semble avoir du mal à adapter avec succès les grands classiques d'Agatha Christie.

Bon, celui-ci se justifie plus que Mort sur le Nil en terme d'échec, la structure si particulière du roman étant très difficile à restituer en film. Malheureusement, l'adaptation prend toutes les mauvaises décisions dans la structure de son récit. Le rajout autour du criminel dans le dernier acte est totalement incohérent avec le roman, nous privant du dénouement doux-amer qui faisait le charme de l'assassin. Ici, tout est grossier et bas de gamme. Malheureusement, au-delà de son twist brillant, Le crime de Roger Ackroyd est une intrigue assez classique. En l'adaptant comme n'importe quel épisode, la série rate le coche.

Au moins avons-nous une jolie scène nostalgique où Poirot retrouve Whitehaven Mansions, la série commençant à préparer la transition vers un Poirot plus solitaire et moins guilleret. Pour le reste : du gâchis.

Plus que "Mort sur le Nil" ou "Le Crime de l'Orient-Express", il est fascinant de constater que "Les indiscrétions d'Hercule Poirot" incarne tous les archétypes du whodunit lorsqu'il s'agit de le parodier aujourd'hui. C'est donc du très bel ouvrage, forcément un peu prévisible sur certains points, avec quelques rajouts un peu artificiels pour le format TV (mais pas incohérent non plus) et un casting vraiment solide (coucou Fassbender), notamment pour l'assassin qui s'en sort admirablement avec un rôle pourtant peu évident. 

On est ici dans une adaptation dans le sens le plus noble du terme.

La série s'empare du roman culte et parvient un double exploit : l'intégrer de façon cohérente dans l'évolution psychologique de Poirot (il est ici dans ses dernières années, et les pistes abordées ici reviendront le hanter dans sa dernière aventure) et rendre le dilemme moral plus pertinent que dans le roman.

Car c'est ici l'enjeu principal de l'épisode. On perd forcément l'aspect le plus ludique de l'intrigue (le Whodunnit), mais on gagne en travail sur les personnages, notamment grâce à Jessica Chastain qui forme un superbe duo avec Suchet. Ajoutons à cela un superbe travail sur l'ambiance, un Poirot crépusculaire qui retranscrit à merveille le lugubre de la situation. On est bien loin de l'adaptation clinquante et crétine de Branagh.