La s2 de Black Mirror suit un peu le schéma de la première saison, mais à l'envers et en moins bien (à mon avis). L'épisode 1 est le drama intimiste autour d'une nouvelle technologie séduisante mais malsaine. Bien écrit/joué, esthétiquement léché, relativement prévisible. Deux épisodes très solides qui feront référence dans leurs thèmes, j'aurais aimé plus d'essais du genre. L'épisode 2 c'est un twist malin qui justifie (ou pas) 40 min d'intérêt très relatif et basées sur des prémisses improbables, même si j'ai bien plus aimé "15 millions merits". L'épisode 3 c'est l'intrigue assez linéaire qui mêle politique, médias, réseaux sociaux et vulgarité. Celui ci est vraiment sans éclats, léger et avec des facilités, mais quand même honorable et pertinent (quoiqu'un peu vain si vous ne vous sentez pas visé). Il climaxe sur la bonne séquence du débat télévisé sûrement.

On ne voit pas trop où ça veut en venir... et malheureusement ça ne mène nulle part : un exercice de genre référencé mais stérile, qui n'ajoute pas grand chose au propos global de Black Mirror à part un "ouais, mauvaise idée". Je vois pas trop la discussion que pourrait engendrer cet épisode. Il semble surtout avoir pour but de jouer avec le spectateur et le surprendre, lui qui est forcément méfiant de ce qu'on lui présente (Sonja, les intentions de la compagnie...). Sympa, mais la mise en place est quand même longue, les bluffs sont faciles à voir sauf le dernier, et le côté filler dans une saison de 6 épisodes est gênant. Puis ce dernier twist est bancal : pourquoi le risque d'interférence n'aurait pas été étudié (ou au moins évité par précaution - d'ailleurs le foreshadowing dans l'avion est très large, vu que les consoles ne font pas d'interférences et c'est même pas vraiment prouvé concernant les téléphones.). Les plans de caméra infrarouge sont aussi manipulateurs si tout se passe dans le cerveau de Cooper. Cela dit, si le personnage principal n'était pas particulièrement sympathique (et le coup de laisser sa mère sans nouvelles pendant des semaines c'était quand même un peu gros) j'ai aimé l'écriture réaliste de ses lignes et la perf de Wyatt Russell. Il a aussi bien vendu l'idée d'intégrer l'alzheimer dans le mix, c'était sûrement le truc plus dérangeant.

Prenez : -le niveau de production et la justesse des jeux d'acteur de la saison 3, -une histoire qui repose moins sur un message ou un twist que sur ses personnages et la façon dont une technologie change les relations et la société, -un twist quand même (et heureusement) mais naturel, précédé sans crainte par plein de petits indices qu'ils soient textuels ou visuels, et dont la recherche forme une seconde couche de divertissement -un ton doux-amer -et un cadre nostalgique vous obtenez un chef d'oeuvre discret et absolument improbable vu le style de la série, "San Junipero". L'épisode le plus beau de Black Mirror, à la fois formellement et humainement ; peut être le plus touchant. Une bande son et une écriture au poil, qui ont souvent un double sens quand on connait l'épisode. C'est vrai que le dialogue greg - kelly est pratique mais on a vu pire. // Attention spoilers en dessous // La fin n'est pas si rose que ça à mon avis et reste ouverte à l'interprétation personnelle. C'est un peu au spectateur de choisir son filtre. Au delà du fait qu'on puisse se demander si la conscience survit la mort du cerveau (et ne soit pas remplacée par une copie intelligente), je ne pense pas que Kelly soit _amoureuse_ de Yorkie et il leur reste potentiellement une éternité à passer dans une ville formatée (cf le bar alternatif). On a aussi une compagnie qui s'enrichit sur l'euthanasie des vieux, et une nouvelle source d'inégalité.

Moui. C'est un peu le même schéma que White Bear quand même - l'histoire autour est plus réaliste, mais en contrepartie plus basique. Je préfère un concept futuriste ou au moins plus large – sociétal - dans mon Black Mirror J'imagine que je suis moins affecté par la révélation que beaucoup, parce que ça change rien à mon expérience pendant les 95% de l'épisode. Dans 15 millions, c'était une conclusion maligne ; dans White Bear, ça recontextualisait toute l'histoire. Là ce qui change c'est un gain de cohérence, un peu de poids dans la conclusion, et les enjeux moraux (sauf qu'ici le débat est avorté vu la finesse des hackers, vu la disproportion entre les fautes des victimes et ce qu'elles ont à endurer). Accessoirement c'est normal de prendre Kenny en pitié avec ce qu'on voit. Un assez bon épisode qui je trouve s'inscrit tout de même dans l'univers de la série (en tant que mise en garde dérangeante de ce qui peut se produire avec la technologie). Mais si l'exécution le tire vers le haut (l'ado est très bien joué, le duo fonctionne bien...), une grande partie de son attrait vient de l'incertitude sur ce qui va suivre donc je sais pas si j'aurai envie de le revoir.