Steve Thompson aurait pu livrer un chef d’œuvre, il livre un épisode correct.

Cet épisode est strictement le triste reflet de cette saison : une saison anniversaire, une saison hommage, une saison de fan-service. L'épisode ne prend stricto-sensu aucun risque : The Eye of Harmony fantasme des spectateurs est en réalité un soleil qui explose, la piscine existe et il y a un livre sur la guerre du temps qui mentionne le nom du Doctor (sans que l'on sache qui a écrit ce livre, le Doctor ou le Tardis ?).

Alors c'est agréable, entrainant, malin souvent mais à mille lieu de ce que j'attends de la série. Le scénario accumule des scènes de poursuites de zombies mal filmées pour cacher le manque d'inventivité flagrant. A la fin, le Doctor annonce à Clara la vérité... avant que celle-ci soit annulée 10 minutes après. Absence de risque encore...

Et pendant ce temps-là, Moffat n'avance pas dans son intrigue principale et se garde la part du lion pour son unique plaisir et épisode final...

"Partons en voyage au centre du TARDIS", est probablement un pitch d'ampleur colossal pour la série. Sur ce point, je maintiens que la hype a été très néfaste pour cet épisode et qu'elle a entraîné beaucoup de déceptions de la part des fans qui est injustifiée. Sans être à la hauteur de The Doctor's Wife sur l'approfondissement du TARDIS, l'épisode nous fait découvrir des tas des choses à son sujet, même si c'est plus du côté visuel et dans l'ingénierie que dans sa dimension psychique comme on l'avait eu en saison 6 à travers le personnage d'Idris.

Car nous avons vu tout de même plus de choses que jamais dans le TARDIS, malgré le grand nombre de couloirs toujours présents. A ce sujet, l’épisode fourmille de petits détails qui me font rêver. L'encylopédie Time Lords, revoir tous les objets d'anciens épisodes tels que le berceau, le parapluie... Cet épisode est une pure successin de fan-service, au point de nous dévoiler enfin des images de la bibliothèque ou de la piscine (certes, trop peu longtemps pour celle-ci). A côté de ça il apporte des idées neuves et totalement originales telles que l'oeil de l'harmonie ou l'arbre fabriquant des machines. Et même si frapper sur le fanservice est un avis souvent populaire, je suis très bon client de la démarche. Je dirais même que l'épisode est presque TROP avare et timide en fanservice ! J'aurais aimé encore plus de folies dans les références. Mais cela aurait été sans doute au prix d'idées originales, donc je m'en contente bien.

DOCTOR: Salvage of a lifetime. You meant the ship. I meant Clara.

Je suis tout de même fan de la gestion de la menace de l'épisode et de la montée en tension. Puisqu'il s'agit du TARDIS, évidemment, il s'agit d'une histoire temporelle. L'idée des zombies qui sont en fait le devenir des personnages est assez fabuleuse. La révélation se produit dans la scène de l'oeil de l'harmonie, qui est dans son intégralité magnifique et très bien jouée. La confrontation finale Clara/Docteur est également très forte et tout le dernier quart de l'épisode au sens large est fantastique. Le desespoir du Docteur de garder Clara hors de danger est assez tragique à voir et Matt Smith est excellent dans l'épisode, sombre sans en faire trop, tantôt inquiet, tantôt confiant.

DOCTOR: Listen, I brought you here to keep you safe, but it happened again. You died again.
CLARA: ... what do you mean, again?

Je dirais que le défaut de l'épisode réside surtout avant cela. Pendant 10/15 minutes le scénario semble s'égarer. Clara erre dans les couloirs et les salles du TARDIS pour que l'on remplisse le cahier des charges de montrer de belles salles. Parallèlement, le Docteur et les Van Baalen tournent en rond, et l'épisode autour du pot. C'est un peu trop faible en contenu pour échapper à ce ventre mou. 

On se met alors à imaginer ce qu'on aurait pu faire de mieux. On aurait pu laisser Clara explorer les salles du TARDIS pour échapper aux Zombies (cette partie-là est bonne), mais en parallèle donner une interface, un compagnon d'un jour au Docteur que le TARDIS créé (un genre d'Idris, ou de Handles en fait) pour l'aider à retrouver Clara. On aurait aussi pu créer de meilleurs personnages secondaires. Le trio de frères est clairement peu mémorable, ou pas pour les bonnes raisons. Un des acteurs joue mal. C'est chiant, car l'existence de personnages tiers est plus ou moins nécessaire pour ne pas créer un épisode ne comportant que le duo principal, et permet notamment de justifier de l'existence de plusieurs zombies. Mais toute leur intrigue n'a que trop peu d'intérêt ou de lien avec le scénario du jour. Le fait qu'un des frères soit pris pour un cyborg "mais soit en fait un vrai humain", est, sur le papier, top. C'est une inversion d'un twist classique (un humain est un cyborg), mais elle est tout simplement trop mal exécutée. Les personnages ne sont pas assez bien présentés pour que l'on comprenne vraiment les enjeux.

Dommage, car derrière cette idée de "machine qui est en fait consciente", il y avait un vrai parallèle intelligent à faire avec le TARDIS, mais ça ne va pas assez loin. Finalement, pendant ces quelques minutes passées à cotoyer les frères, les moments d'émerveillement en découvrant le TARDIS nous paraissent encore plus courts face aux moments d'ennui.

Le reste de l'épisode (le début et la fin) est plus ou moins excellent cela dit. C'est un peu une constante cette saison, d'avoir des ventre mous au milieu. Le gros du gâteau est notamment réservé pour le dernier tiers, quand le Docteur brise le tabou auprès de Clara sur qui elle est.

DOCTOR: What are you, eh? A trick, a trap?!

Le livre et le nom du Docteur que Clara trouve est aussi une forme de rappel sur ce teasing du nom du Docteur, une des parties du fil rouge... et bien que la fin opère un soft-reboot, l'évolution du personnage de Tricky (le cyborg-humain) rappelle que tout n'est pas oublié et que les éléments pourraient bien ressortir...

J'ai également adoré le passage où il faut sauter de la falaise, la déduction du Docteur jusqu'à la représentation visuelle magnifique du coeur du TARDIS en explosion, représentant à la fois sa géométrie complexe et son aspect temporel, le Docteur et Clara se baladant dans un décor figé dans le temps.

Je pense sincèrement que l'épisode est desservi par le poids de sa propre ambition, et par la trop grande attente qu’il pouvait engendrer. Pourtant, au-delà des clins d'oeil, l'épisode apporte une vision sur la machinerie du TARDIS très créative et transforme le lieu le plus sûr de la série en chaos imprévisible, pour livrer un excellent twist (les zombies) pour basculer sur le conflit au coeur des protagonistes de la saison. Il amène donc plus loin l'idée lancée par The Doctor's Wife.

Le voyage est peut-être un poil court et aurait mérité une ou deux relectures de plus pour écumer des scènes et rebondissements superflus (les trois frères notamment), mais le dernier acte est si satisfaisant et l'épisode est si bien réalisé et jouissif que je ne peux bouder mon plaisir.

Un peu déçu vu le potentiel de l'épisode.

Néanmoins, ce n'est pas mauvais, loin de là. Mais les monstres, dont l'identité est assez vite éventée, gâchent un peu ce voyage dans le coeur du Tardis. Une menace d'autodestruction aurait été largement suffisante, permettant au Docteur et à Clara de visiter toutes les pièces du Tardis en train de s'effondrer.

Cependant, l'épisode est solide, les seconds rôles sont légèrement caricaturaux, mais pas déplaisants pour autant. L'arc de la saison avance encore un peu, et il est agréable de voir le Docteur directement confronter Clara. Dommage que le twist final (qui est proche de la Deus Ex Machina) annule tout.

L'épisode offre tout de même son lot de bons moments, entre la bibliothèque, le coeur du Tardis, les voix des anciens compagnons et Docteurs, les petites références cachées ... Je trouve juste que l'ensemble manquait d'unité, de thématiques fortes (comme le lien entre le Docteur et son vaisseau par exemple) pour donner plus d'impact à l'intrigue.

Mais globalement, cela reste un bon épisode, dans la lignée des précédents. J'espère que nous aurons d'autres occasions de visiter l'intérieur du Tardis !