Avis sur les séries
Avis sur les saisons
Avis sur les épisodes
J'ai commencé la série en décembre 2019 et, pour le moment, je n'ai jamais pris le temps de commenter un épisode. Mais, l'occasion est venue de le faire, tant la saison 6 mérite tous les louanges.
L'étau se resserre de plus en plus autour des personnages et ce sentiment inéluctable de fatalité, de fatigue psychologique inonde l'écran toutes les secondes. Le double jeu des protagonistes est magnifié par cette scène de Thanksgiving où Stan fait son discours anti-URSS ; au même moment, la caméra se concentre sur le visage de chacun (Page qui baisse les yeux, la femme de Stan, etc.).
Du grand art ! Jamais on n'aura atteint une tel niveau d'enjeux narratifs. Il me reste quatre épisodes ; si l'atterrissage se fait dans les règles de l'art, cette S6 risque de figurer parmi mes saisons préférées de tous les temps à côté de la S5 de Breaking Bad et la S5 de Six Feet Under. Allez, on croise les doigts...
Le plus touchant dans cet épisode, c’est la justesse avec laquelle la réalité rattrape tous les personnages. Elisabeth qui découvre que le Centre complote contre Gorbatchev et qu’elle n’est qu’un pion au milieu de tout ça, Philip, endetté, désabusé par le rêve américain, regarde un film russe comme un retour aux racines, Stan qui découvre avec effroi que ses voisins ne sont pas ce qu’ils prétendent être.
Ces années de filature, de mensonges et de déceptions ont marqué psychologiquement nos protagonistes, comme le montre si brillamment cet épisode. C’est surtout la pauvre Elisabeth au regard hagard, sur le point de craquer d’une minute à l’autre qui occupe le centre des attentions. D’ailleurs, est-ce un hasard si le titre du prochain épisode porte son nom ? J’ai peur pour maman.
Un crève-cœur, cet épisode final.
Toute cette accumulation de crimes, de mensonges, de trahisons retombe comme un couperet sur la tête des personnages. La scène la plus déchirante est sans doute celle du garage où Philip répète presque implorant « We had a job to do ». Apeurés, les Jenning en viennent à supplier Stan. Ce contraste est saisissant, eux qui nous étaient montrés comme des tueurs froids et manipulateurs. Ils montrent là leur vrai visage : fini les artifices, ils nous font presque pitié.
Là, où cela fait encore plus mal, c’est la fracture familiale : les adieux avec Henry sont poignants et ceux de Paige sonnent comme l’ultime coup de poignard. Cette famille qu’il avait construite n’est plus. Et si les créateurs nous laissent avec une lueur d’espoir à la fin (les espions retournant sains et saufs en URSS), la fin est douce-amère. Fin douce, car on peut espérer pour les personnages un avenir meilleur, surtout connaissant l’Histoire (la fin de la guerre froide). Fin amère, car personne n’en ressort indemne ; la blessure est profonde pour chaque personnage.
La conclusion est satisfaisante, car c’est la continuation logique des évènements. Il restera quelques questions ouvertes, mais l’on retiendra surtout cette heure magistralement cathartique de télévision faite de tension, de larmes et de lamentations. L’une des meilleures fins de série de tous les temps. Mention spéciale au jeu de Matthew Rhys et aux références symboliques disséminées ici et là (McDonald, la boisson bue par Paige, le rêve d'Elisabeth…).