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Si ce sixième épisode semblait présager une rupture brutale entre Jimmy et Kim, il aura fait éclater en éclats toutes nos attentes. La dernière réplique « Or maybe… Maybe we get married? » sonne comme un coup de tonnerre et risque de tout changer. Ce fut le nirvana dramatiquement, thématiquement : tant d’éléments à analyser et assimiler. Néanmoins, il est étonnant qu’à ce stade, si près de la fin, la série semble toujours nager entre deux eaux : lorgnant du côté de Breaking Bad et entretenant son identité rebelle intimiste. Si bien que nous n’avons aucune idée de ce qui peut se passer dans les prochains épisodes ou la prochaine saison (la dernière). Et… est-ce plus mal ?
Alors, émerveillement ou désillusion ? Pris individuellement, l’épisode est bon. Pour l’instant, c’est celui qui se rapproche le plus de Breaking Bad que ce soit stylistiquement ou narrativement. Néanmoins, l’attente était trop grande et il manquait une scène choc pour marquer à jamais les esprits : comme le meurtre de l’enfant dans « Dead Freight » (S5E5 de Breaking Bad) ou le suicide de Chuck dans « Lantern » (S3E10). En considérant l’ensemble de l’œuvre, « Bagman » apparaît comme une pierre fondatrice de la transformation de Jimmy. Le point de non-retour est atteint pour tous les personnages. Tout s’accélère : Jimmy doit se défaire des reliques de son passé (sa voiture, le thermos offert par Kim, son innocence) et alors qu’il est sur le point de se laisser mourir, Mike lui rappelle qu’un être cher l’attend, Kim. « She knows, she’s in the game now. » Nous qui nous inquiétions du sort de Kim, devrions désormais en être terrifiés. Quel somptueux moment de télévision !
Bad Choice Road est un joyau d’écriture, de réalisation, de jeu d’acteurs. Enjeux, tension, surprises, tout y est, si bien qu’on ne peut ressortir de cet épisode qu’ébouriffé. La direction que prend la série est on ne peut plus excitante ; les deux intrigues principales se rejoignent enfin avec Kim qui se retrouve véritablement impliquée. La dernière scène avec Lalo est digne d’un Hitchcock tant la tension est palpable. Un chef d’œuvre absolu !
Plutôt que de nous offrir un final explosif, les scénaristes font le choix d’économiser leurs cartouches. Et ce n’est pas si bête. Alors, oui, finalement, on n’aura pas à verser de larme, aucun personnage n’étant mort. Mais, que les perspectives sont alléchantes. La vengeance de Lalo risque d’être impitoyable et le mystère de Kim s’épaissit encore plus. Compte-elle vraiment saboter la carrière d’Howard qui n’a rien demandé ? Quand Jimmy recrutera-t-il Francesca et acquerra-t-il sa réputation d’avocat véreux (qu’on lui connaît) ? Comment Gene compte-t-il régler « son problème » ?
On pourra pester contre quelques facilités notamment la scène de la fusillade, mais la série mère a toujours assumé son aspect comics/tarantinesque et son cœur se situe ailleurs (la tragédie, les personnages). D’ailleurs, il me tarde de voir la trajectoire choisie par les scénaristes, surtout la gestion de la chronologie. Revisitera-t-on des scènes se déroulant dans l’ère de Breaking Bad ou non ?
En ce moment même, Vince Gilligan et ses sbires sont en train de débattre de ces questions et on ne peut leur souhaiter que bon courage. Plus que treize épisodes en vue ; je n’ose même pas imaginer le casse-tête. Ce qui est sûr, c’est que l’attente sera longue… mais à l’issue, Better Call Saul pourrait atteindre le Graal des séries à l’image de son aînée.