Avis sur les séries
Avis sur les saisons
Après le relatif fiasco saison 15, même si la saison avait ses qualités, elle restait une transition très mal gérée entre la team Hinchliffe/Holmes et la team Williams/Baker. Ces derniers se devaient de se renouveler. Leur solution : cette saison 16 avec une intrigue feuilleton sur la Clé du Temps qui donne un thème commun et un but à toutes les six histoires de la saison, retrouver les fragments de la fameuse Clé du Temps. Exit la compagne humaine, place à Romanadvoratrelundar, Romana (ou Fred ^^) pour faire plus court, une Time Lady qui sait aussi bien se débrouiller que le Docteur et qui est recrutée et non pas invitée dans le TARDIS.
Ce coup de frais fait un bien fou au show. Pour tous ses défauts, cette saison 16 restera en effet très charmante et je l'aime pas mal.
Premièrement, Romana I est une superbe compagne à mes yeux, qui challenge plutôt bien le Docteur, de façon plus ou moins variable selon son rôle dans les épisodes (certains ne lui faisant pas toujours honneur). L'actrice Mary Tamm est top et son animosité avec Baker et la série ne se ressent à l'écran qu'à travers des piques et des remarques cyniques qui, en fait, donnent beaucoup de charme et d'originalité au personnage et à leur relation. ENFIN ! Une compagne qui ne prend pas le Docteur pour Dieu dès qu'elle le voit ! Ce qui restait un peu le cas avec Leela. Romana ne se place pas en apprentie du Docteur, même si elle apprend beaucoup sur le côté "pratique" du voyage dans le temps, elle qui est la première élève assez agaçante et terriblement attachante. Sarah Jane avait déjà bousculé les choses à son niveau par rapport à une Jo Grant, Leela avait été un gros pied dans l'originalité, et Romana vient enfin finir l'entrée dans la "modernité" pour la série... enfin, du point de vue du personnage plus que des scénarios, comme je l'ai déjà dit. Mais il y a clairement eu un avant et un après Romana.
Ensuite, l'idée de la Clé du Temps qui donne toujours un but à chaque arrivée dans un contexte, dynamise le récit. Il a fallu sans doute un sacré boulot de showrunning pour Williams de faire marcher tout ça, et il s'en sort plutôt très bien. Il faut dire que c'est sur la base d'un pitch de saison feuilleton que Graham Williams a eu le post de producteur, un an auparavant pour la saison 15. Il peut donc enfin faire "ce qu'il veut" et ça marche plutôt bien.
Aucune histoire n'est véritablement à jeter et les ambiances sont suffisament variés pour que, même si toute la saison sans exception se compose d'épisodes avec des éléments futuristes (logique, la Clé du Temps ne va pas aller se cacher à Londres tout le temps...), l'ensemble forme un tableau assez charmant, avec des histoires "pseudo-historiques-futuristes" sur des planètes aux civilisations peu avancées (moyen-âgeuse pour The Ribbos Operation, chevaleresque pour The Androids of Tara).
La saison a cependant eu beaucoup de mal à se conclure, et cela se ressent. C'est une constante dans les trois saisons de Graham Williams pour la série. Il y a un assez gros fossé entre la qualité des trois premières histoires et les trois suivantes. Je dirais donc que la saison se joue en deux temps.
D'abord, un superbe opener The Ribos Operation, où le génie Robert Holmes se permet quelque chose à petite échelle et pourtant très drôle et mémorable. Ensuite, le chef d'oeuvre de la saison, The Pirate Planet, le premier script de Douglas Adams pour la série, un épisode extrêmement ingénieux et de loin mon préféré de la saison. Enfin, The Stones of Blood, pour un épisode qui se recentre sur des enjeux terrestres et qui démarre assez mollement pour finalement nous bluffer avec des changements de ton bien vus et des personnages mémorables.
Ensuite, s'il n'y a pas beaucoup d'épisodes à jeter non plus, la qualité baisse. The Androids of Tara est LE gros coupable qui a replacé Romana dans sa situation de demoiselle en détresse, une très mauvaise idée. Qui a pensé que parodier une histoire chevaleresque classique était une bonne idée avec une compagne pareille, qui était forcément destinée à remplir le rôle cliché ? Bien que joli, le sérial est beaucoup trop déjà-vu pour plaire. Enfin, les deux dernières histoires sont d'un cheap absolu. The Power of Kroll est vraiment horrible et a éloigné Mary Tamm et Robert Holmes de la série. Quand un épisode est tellement mauvais qu'il a causé des problèmes de production en plus de ceux qu'il induisait, c'est le signe que c'est vraiment un gros cas. Quant au final de saison, The Armaggedon Factor, il montre à nouveau la limite des "fins de saisons en six parties" popularisées par l'ère Hinchcliffe, avec beaucoup de creux au milieu, mais aligne tout de même quelques bonnes idées notamment dans sa dernière partie, qui conclut la saison de façon satisfaisante.
C'est donc une saison parfois inégale mais méritante. Je dirais que c'est l'une des saisons les plus normales, tout en restant assez innovante. Clairement, on retiendra deux éléments de la saison 16 : la superbe Romana, et le concept d'un fil rouge et des "Gardiens du Temps" qui enclenche une mythologie assez fascinante et qui s'éloigne un peu de Gallifrey comme on a beaucoup eu ces dernières saisons.
Ces éléments ont tout de même marqué la série durablement, puisqu'elle y reviendra par la suite, que ce soit sur des figures Gallifreyiennes innovantes, des compagnons rebels ou des histoires liées.
Un cap important !
- The Pirate Planet - 15.5
- The Ribbos Operation - 14.25
- The Stones of Blood - 13.5
- The Armaggedon Factor - 12.83
- The Androids of Tara - 11.25
- The Power of Kroll - 10
Moyenne de la saison (par histoire/par épisodes) : 12.89 / 12.88, très proches puisque la seule histoire au nombre de parties différente est pile dans la moyenne de la saison.
Difficile, de conclure l'ère de Tom Baker qui aura été la plus longue de l'histoire du show à ce jour - et probablement à jamais. Pour sa septième saison en plus, les circonstances ont fait qu'une nouvelle team totale est entrée dans les coulisses : John-Nathan Turner remplace Graham Williams à la production, Christopher H. Birmead remplace Douglas Adams sur le poste de "script editor"/showrunner, le compositeur change, les compagnons partent et trois autres débarquent, etc. Et les années 1980 sont là. Beaucoup de changement pour une saison censée offrir un dernier tour de piste au Docteur le plus chouchouté, une tâche difficile. Est-ce réussi ?
Globalement oui. Le début de la saison m'a beaucoup inquiété justement parce que tout est trop nouveau, que la team prend ses marques de façon beaucoup trop faiblarde. The Leisure Hive et son design épilleptique reste assez mémorable mais le scénario est une légère catastrophe. Méglos est encore pire et retourne dans la cheapness habituelle de la série. Ces deux histoires, de loin les pires de la saison, ne laissent clairement pas de place à Tom Baker de s'exprimer. Tout au long de la saison, l'acteur est dépossédé de sa vie, parfois malade en tournage, il a clairement vieilli moralement et physiquement et cela se voit sur son visage. Dénuée d'humour et de second degré pour faire passer ses idées loufoques, voulant aller à l'encontre de l'approche Douglas Adams de la saison 17, la série en prend un coup.
Fort heureusement, l'arrivée de la trilogie E-space avec Full Circle, est une véritable bouffée d'air frais. Les décors respirent, du vrai sang neuf a été choisi comme scénariste (un jeune fan de même pas 18 ans), on introduit enfin un nouveau compagnon après deux saisons et demi en la personne d'Adric, personnage certes pas ouf et à l'acteur amateur, mais à mon sens sur-haï sans raison par les fans, le tout dans une histoire classique mais ingénieuse où la série semble retrouver de ses couleurs. State of Decay poursuit les histoires dans l'univers E-space, avec un script de Terrance Dick très gothique à souhait qui n'est pas sans rappeler les classiques de Baker, Horror of Fang Rock ou Brain of Morbius. Avec cette histoire très second degré, fun et plutôt joli dans son macabre, la saison semble vraiment vouloir rendre un peu hommage à la période d'âge d'or de Tom Baker, où les histoires se suivaient toujours les unes sur les autres (en saison 12 avec l'arche de l'espace) et où l'inspiration gothique donnait lieu à de superbes trouvailles. Warrior's Gate enfin, conclut la trilogie sur une bonne note, bien que le scénario alambiqué le retienne un peu trop. Il reste un bel exemple d'innovation de la saison, visuellement hybride entre le macabre et le futuriste, et bien plus réussi que The Leisure Hive sur ce point.
C'est aussi l'occasion pour Romana II de tirer sa révérence, ainsi que celle de K9, dans un départ aussi expéditif que les autres de la série mais pourtant très joli pour cette compagne marquante, qui reste malgré tout celle que j'aime le moins de toutes les compagnes principales de Tom Baker, Lalla Ward en faisant souvent beaucoup trop. Le personnage aura eu cependant ses bons moments dans la saison, et la complicité avec Tom Baker, moins originale et amusante que la rivalité avec Romana I, reste une note forte pour une compagne globalement bad-ass et novatrice.
Enfin, The Keeper of Traken ouvre la "troisième" partie dans la saison avec une histoire franchement molassonne et pourtant incontournable puisqu'elle ramène le Maître. C'est en fait un simple avant-goût avec Logopolis, clairement le gros morceau de la saison, où les scénaristes deviennent fous, entre destruction de l'univers, révélation sur le TARDIS, les Time Lords et le fil rouge de l'E-space de la saison, alliance Maître-Docteur, introduction de deux nouvelles compagnes (dont Tegan qui semble juste géniale) et apparition prématurée fantômatique de Peter Davison, c'est sans aucun doute l'un des meilleurs finaux que la série ait sorti et il élève complètement la saison en donnant un sens au personnage du Docteur avec une sortie incroyable et très émouvante avec peu de choses.
Une saison en montagnes russes et assez inégale, mais riche en changement que ce soit dans le ton ou l'univers de la série, et qui vaut le détour notamment pour son sublime final et la régénération vraiment réussie de Tom Baker. La transition est globalement assurée, que ce soit dans le ton (même si c'était un peu violent au début de la saison), l'humour ou les compagnons/antagonistes, avec une "trilogie du Maître" qui se poursuivra immédiatement lors de la prochaine saison. Peter Davison a beaucoup de pression sur ses épaules pour réussir à égaler Tom Baker, mais d'un autre côté, cette saison démontra aussi les limites et la fatigue de ce dernier. Elle fut un relatif fiasco d'audience et je pense qu'il était temps de changer d'air. Pour citer les derniers mots du quatrième Docteur :
It's the end. But the moment has been prepared for.
Classement de la saison :
- Logopolis - 15.75
- Full Circle - 14.5
- State of Decay - 13.75
- Warrior's Gate - 12.75
- The Keeper of Traken - 11.5
- The Leisure Hive - 10.5
- Meglos - 9.75
Moyenne de la saison (par histoires/par épisodes) : 12.64/12.64 - fun fact, il s'agit de la seule saison de l'histoire de la série qui ne possède qu'un seul type de format d'épisodes (ici, en quatre parties), ce qui explique qu'absolument aucune différence ne puisse être faite entre juger la saison par histoires ou en prenant en compte "l'importance" de ces histoires par nombre d'épisodes !
Je profite de cet avis sur la dernière saison d'un Docteur, pour livrer quelques tops généraux, car les tops c'est cool, et oui, je suis beaucoup trop "Statistax" :
Classement des saisons de Tom Baker (avec une moyenne grossière pour représenter les écarts) :
- Saison 14 - 15.0/20
- Saison 13 - 14.4/20
- Saison 12 - 14.0/20
- Saison 17 - 13.7/20
- Saison 16 - 12.9/20
- Saison 18 - 12.6/20
- Saison 15 - 12.4/20
Classement des compagnes de Tom Baker (entre parenthèses les compagnons "pas terminés", notés sur leur potentiel) :
- Sarah Jane
- Leela
- Romana I
- (Tegan)(oui, même avec seulement un épisode)
- Romana II
- K9
- (Adric)
- (Nyssa)
- Harry
La première saison de Tom Baker occupe une place très spéciale dans la série. C'est un peu l'équivalent "saison 5" pour la nouvelle série : le début d'une ère populaire, qui fait pourtant suite à une ère très populaire et le Docteur préféré du public jusqu'alors. C'est un pas dans la modernité et un très bon point d'entrée pour les curieux de la série classique. C'est par cette saison que j'ai en effet commencé, Robot étant mon premier classique ! Et c'est pourtant encore une structure limitée, qui ne représente pas tout à fait la grandeur de l'ère qui viendra.
On sent toutes les prémisses de ce qui fera l'ère qui va venir une des meilleures de la série. Premièrement, Tom Baker y est absolument fabuleux. Il habite le rôle du Docteur sous ses aspects, du plus cocasse et décalé au plus dramatique. Il s'adapte aux scripts, à leurs qualités ou leurs défauts, et transmet tous ses dialogues avec une main de Maître. Sa dynamique avec Sarah Jane est l'une des meilleures de la série classique, même si Elisabeth Sladen n'est pas toujours servie, principalement car l'introduction d'Harry Sullivan et le besoin de lui donner des scènes d'action, pousse Sarah parfois au second plan, avec les restes de ce que doit faire un compagnon : être en danger. Les personnages n'en restent pas moins toujours réussis, sauvant certains épisodes qui dans une autre ère, auraient été bien plus ennuyants sans un sourire de Tom Baker ou une réplique de Liz Sladen.
Et c'est aussi une saison très différente de ce qui viendra par la suite. Principalement car dans la période classique, la série était produite à l'année, et il fallait toujours anticiper d'une saison à l'avance les scénarios. Ainsi, l'ancienne team de production avait déjà commandé les 4 scripts à venir : une arche spatiale, un épisode Sontarien, un épisode Dalek et un épisode Cybermen. Et ils ont carrément été totalement en charge du premier sérial de Tom Baker, Robot ! Pas facile pour les nouveaux arrivants Robert Holmes au script, Philipp Hinchcliffe à la production, d'imposer leur marque... surtout quand Holmes détestaient les ennemis récurrents de la série et n'en a ensuite plus jamais ramené, et qu'on lui imposait ici de faire un truc avec les trois plus grands.
Et pourtant, quoi de mieux pour permettre à un Docteur et une team de se distinguer, qu'en jouant exactement sur le même terrain que les saisons précédentes et en prenant un autre angle d'attaque ? Robot est ainsi un premier épisode qui certes, est totalement résiduel de l'ère de Jon Pertwee, mais la performance des acteurs, l'intelligence derrière la simplicité du scénario et le ton de renouveau de l'ensemble suffit à en faire une très bonne introduction à la saison et au Docteur, en plus de simplifier la transition. On y voit clairement un Docteur plus détaché, plus alien et plus rieur que celui de Jon Pertwee, ce qui nous fait des vacances.
The Ark in Space impressionne ensuite immédiatement et témoigne de l'approche très mature, SF et avant-guardiste de Robert Holmes, qui a presque entièrement réécrit le script de base. Un des meilleurs sérials de la série, ni plus ni moins. Et cet épisode a aussi le mérite de lancer une intrigue fil rouge sur la saison, puisque toutes les histoires seront centrées autour de cette arche. Une idée assez cool qui renouvelle les enjeux de chaque épisode (le TARDIS n'apparaît pas du reste de la saison, ce qui est du jamais vu).
Ce concept élève The Sontaran Experiment, un épisode un peu médiocre, qui aurait été bien pire dans une autre saison. Ici, ce petit "two-parter" qui vient compléter The Ark in Space est la note faible de la saison, mais parvient à s'enchaîner sans trop de dégâts. Cela avant qu'on bascule sur le fameux Genesis of the Daleks, chef d'oeuvre incontesté de la série classique et à juste titre, puisqu'il nous saisit dès sa première scène pour ne plus nous lâcher avant la fin.
Il est un peu dommage qu'une saison qui a réalisé un quasi sans-faute s'écroule un peu sur la fin, avec un Revenge of the Cybermen en soi pas hideux mais assez plat, long et peu imaginatif, qui échoue à ramener les Cybermen après 6 ans de hiatus, et qui causera même à nouveau 7 ans de hiatus ! Dans la longue traversée du désert pour les fans des Cybermen, entre la saison 6 et la saison 19, il n'y a donc que ce Revenge of the Cybermen à se mettre sous la dent, et c'est un peu difficile à digérer. D'autant qu'ils ne sont pas la pire partie de l'épisode, et que c'est la réécriture de Robert Holmes qui a clairement tout niqué.
La dernière partie du final est d'autant plus étrange qu'elle donne la sensation de ne pas boucler la saison. Et en effet, c'est le premier sérial de la saison 13, Terror of the Zygons, qui était censé la conclure, ce qui a beaucoup plus de sens. Toujours est-il que si l'épisode sontarien est un peu limité, et que l'épisode Cybermen nous laisse sur notre faim, ils ont le mérite d'être assez courts et de passer vite. Ils n'empêchent pas cette saison 12 de briller, surtout grâce à son casting, et grâce aux sommets atteints par The Ark in Space et Genesis of the Daleks.
Cette saison 12 a donc encore ses limites, parce que la créativité de Holmes n'a pas encore pu être totalement libérée, il n'empêche qu'on comprend tout de suite où Doctor Who veut nous amener : vers une série plus alien, plus centrée sur des enjeux sérieux notamment autour de la science - un thème commun aux quatres premières histoires, tout en étant bien plus décalée. A l'image de son Docteur, en fait. C'est certes un brouillon d'ère, qui tâtonne encore un peu et se cherche encore, mais si c'est un brouillon, on a qu'une hâte : voir le résultat final. Et autant dire que les deux prochaines saisons ne déçoivent pas...
- Genesis of the Daleks - 16.17
- The Ark in Space - 15.5
- Robot - 13.25
- Revenge of the Cybermen - 11.25
- The Sontaran Experiment - 11
Moyenne de la saison (par histoires/par épisodes) : 13.43/13.95. Il est logique de constater une si grande différence (la plus grande de tous les classics je pense) entre la note des parties et la note des sérials, puisque le pire sérial ne contient que 2 épisodes et le meilleur de très loin en contient 6. Leur donner le même poids a peu de sens ici et se dire "deux histoires sur cinq sont décevantes" fait peu honneur à la saison et au souvenir très positif qu'elle nous laisse.
Une sublime saison. Pour moi l'apogée de l'ère de Holmes et Hinchcliffe, et donc celle de Tom Baker, et donc celle de la série classique.
C'est bien simple : pas une histoire n'est faible. Toutes sont au moins impressionnantes sur un ou plusieurs aspects, et elles ont forgé l'image de la série idéale.
La saison se divise grosso modo en trois parties.
Il y a tout d'abord la partie la plus faible, et pourtant d'un bon niveau dans la continuité de la saison 13 : le départ de Sarah Jane Smith. The Masque of Mandragora est un épisode historique extrêmement beau et intéressant, au pitch saisissant, aux personnages secondaires travaillés et au contexte parfaitement exploité, malgré quelques longueurs dommageables. C'est l'histoire qui sur le papier a donné envie à Elisabeth Sladen de rester dans la série plus longtemps, et on ne peut que la comprendre. Vient ensuite sa véritable histoire finale : The Hand of Fear. Si les premières parties sont les plus lentes et les épisodes les moins bons de la saison, le sérial nous subjugue avec l'un des aliens les mieux réussis des classiques dans une troisième partie saisissante, et une dernière partie qui vaut le détour rien que pour le départ émouvant et emblématique de Sarah Jane Smith, toujours la compagne la plus pure, la plus naturelle et la plus emblématique de la série toute entière. J'en ai toujours un énorme pincement au coeur.
La deuxième partie de la saison n'est constituée que d'un épisode : mais quel épisode ! The Deadly Assassin est probablement le sérial le plus ambitieux réalisé sous l'ère H&H. C'est un épisode déconcertant, qui prend des risques inouïs dans la série et même au sein de son récit, ce qui donne certes certaines séquences plus faibles que le reste, mais c'est un épisode qui est bien plus que la somme de ses parties. Il définit la grande majorité de tout le lore le plus fondamental de Doctor Who aujourd'hui, et l'a fait avec tout un propos méta sur la fabrication de légendes autour du canon que je trouve personnellement être un véritable coup de génie. Un outrage à l'époque, mais probablement le meilleur héritage qu'a laissé Robert Holmes derrière lui aujourd'hui. Le dernier épisode en date où je poste cet avis se fonde entièrement sur cet épisode. C'est absolument dingue la portée que revêt l'histoire et cela illustre la beauté d'une série à la mythologie à la fois flexible et généreuse de Doctor Who.
La dernière partie de la saison consiste à introduire une nouvelle compagne et parvenir à démarrer une sorte de nouvelle ère tout en en clôturant une autre, le producteur Hinchcliffe quittant la série en fin d'année. Nous retrouvons donc deux épisodes permettant d'introduire la nouvelle compagne, Leela, sans aucun doute la plus originale à ce stade et probablement ma préférée à ce stade également. En très peu de temps, elle s'impose comme l'une des meilleures idées que la série ait eu. En dépit d'une relation épineuse avec Tom Baker en coulisse, la dynamique entre Leela et Four est à la fois unique, attachante et intéressante, tant les acteurs et l'écriture sont solides. Ces deux histoires sont de très bonnes factures ; écrites par le même scénariste, elles permettent à donner un début remarquablement convaincant à Leela qui est écrite uniformément sur les deux épisodes, qui partagent également un thème commun autour de la robotique, avec des prismes très différents : dérives de la technologie elle-même d'une part, dans The Face of Evil, une histoire très sous-estimée qui prend des tournants inattendus, et étude sur l'uncanny valley dans le second épisode du scénariste, The Robots of Death, un classique au contraire très sur-estimé qui bafoue toute règle de cohérence dans un Whodunnit, et pourtant totalement saisissant, avec des antagonistes à nouveau marquants.
C'est d'ailleurs une constante dans cette saison voire cette ère : la volonté de rendre les antagonistes du décor plus complexes, fouillés, ou déjà moins "bricolage" et "alien vert". Ces deux épisodes ont également la particularité d'être de véritables mash-up de genres, d'ambiances et de tons, ce qui donne une identité si particulière à la série et qui a ravivé la définition de Doctor Who à mon sens.
La saison s'achève enfin par The Talons of Weng-Chiang, un épisode historique qui en apparence paraît anodin et qui est en réalité un festival de tout ce qui fait la réussite de la série à son époque. C'est mon histoire classique préférée à ce stade, constituée par mon épisode préféré (la quatrième partie), et contenant lui-même mon passage préféré de la série, où le scénariste et la réalisation livre selon moi la plus belle prestation de ce qu'est Doctor Who dans une scène simple et pourtant, si riche. J'ai déjà écrit des tartines sur la plupart des épisodes de ce sérial, qui reste tout à fait imparfait, mais tellement jouissif et tellement important. Pas dans la mythologie (il y a déjà The Deadly Assassin pour cela), pas dans l'émotion (il y a déjà The Hand of Fear) ou dans l'ambition, mais un épisode tellement important dans tout ce que peut être Doctor Who et qui en reprend toute sa magie, avec une mise en abyme explicite à ce sujet.
Une grande saison qui inspirera probablement toute la suite de la série sur ce qu'il faut faire, sur ce qu'il ne faut pas reproduire également car elle est loin d'être sans défauts. Une saison qui offre tout de même deux compagnes, un Docteur, des scénaristes nouveaux comme anciens à leurs paroxysmes respectifs. Une saison qui mélange tous les tons d'une main de Maître et qui reste ambitieuse à chaque instant, sur pourtant tant de niveaux différents.
Certes, cela reste 1977. Les effets visuels ne sont pas du niveau spectaculaire moderne, les personnages sont bien souvent plus caractérisés par la performance des acteurs et actrices ou par le scénario, et non par des speechs grandiloquents, et les histoires sont globalement indépendantes et ne se répondent pas toujours forcément entre elles.
Pourtant à peu de choses près, c'est la saison de Doctor Who parfaite, où chaque épisode apporte quelque chose de distinct et de nécessaire.
Tout, depuis Robot, The Ark in Space et la saison 12, conduit vers ces moments, où un peu moins de la moitié du run de Tom Baker vient de s'écouler et où la série a progressivement gagné en qualité jusqu'à atteindre des sommets. Et comme bien souvent avec les Docteurs ou la série, pour citer River : atteindre aussi haut le sommet signifie qu'on chutera également plus bas que jamais très bientôt. C'est peut-être au fond un dommage irréparable à court terme, qui a pu à terme enterrer toute la série : la violence, la maturité, l'originalité et les décisions prises dans cette saison ont conduit à un effet inverse violent qui a infantilisé la série, créé un effet de lassitude et un trop grand culte autour d'une nostalgie d'une ère "dont la grandeur n'est plus jamais atteinte". C'est ce qui a causé l'existence du Cinquième Docteur, puis du Sixième, puis de l'arrêt de mort de la série... avant que celle-ci ne revienne toujours plus forte que jamais, et puise finalement beaucoup de son inspiration dans cette saison.
LA saison de Doctor Who, avec un grand "la".
Mon classement :
- The Talons of Weng-Chiang - 16.33
- The Deadly Assassin - 15.75
- The Face of Evil - 15
- The Masque of Mandragora - 14.25
- The Robots of Death - 14.25
- The Hand of Fear - 14
Moyenne de la saison (par histoires/par épisodes) : 14.93 / 15.04